L'économiste et consultant de Vision4 analyse le comportement électoral au Cameroun à travers le prisme de l'appartenance communautaire, remettant en question l'idée du vote basé sur le bilan
À l'approche de l'élection présidentielle de 2025 au Cameroun, les analyses des motivations électorales des citoyens se multiplient. Dans ce contexte, Dieudonné Essomba, économiste et consultant régulier sur la chaîne Vision4, vient de livrer une lecture sociologique du vote camerounais qui fait débat.
Lors de sa participation à l'émission "Club d'Elite" diffusée dimanche dernier, l'économiste a remis en question l'idée selon laquelle les électeurs du RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais) se détermineraient en fonction du bilan du régime en place.
"Qui vous a dit qu'on vote au RDPC sur la base du bilan ? Mais ça ne correspond à aucune réalité sociologique", a déclaré Dieudonné Essomba, rejetant ainsi les analyses purement programmatiques du comportement électoral camerounais.
Selon lui, la dimension communautaire joue un rôle prépondérant dans les choix politiques des Camerounais. "Nous sommes dans un pays qui a sa sociologie. Il faut d'abord partir de ce fait. Les partis sont fortement communautarisés", a-t-il souligné, pointant une réalité souvent évoquée mais rarement assumée dans le débat public national.
L'analyse la plus controversée de Dieudonné Essomba concerne ce qu'il présente comme un vote de rejet. "Les gens peuvent voter Biya parce qu'ils ne veulent pas de Kamto, tout simplement", a-t-il affirmé, suggérant ainsi que la popularité du président sortant Paul Biya pourrait résider en partie dans la crainte qu'inspire Maurice Kamto, président du MRC (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun), à certains segments de l'électorat.
Cette déclaration intervient alors que Maurice Kamto est considéré par plusieurs observateurs comme l'un des principaux challengers potentiels du président Biya pour l'élection de 2025, malgré les tensions qui ont suivi l'élection de 2018.
Le consultant de Vision4 a également mis en lumière l'importance des intérêts locaux dans la formation des choix électoraux. "Les gens peuvent voter Biya parce qu'un village qui bénéficie d'un ministre ou d'un directeur, ou qui espère en bénéficier, peut le voter rien que pour ça", a-t-il expliqué.
Cette perspective met en évidence un phénomène de clientélisme politique où les communautés voteraient non pas pour un programme national, mais pour préserver ou espérer des nominations de leurs ressortissants à des postes de responsabilité.
Les propos de Dieudonné Essomba ont suscité des réactions variées au sein de la classe politique camerounaise. Si certains partisans du pouvoir y voient une analyse lucide des réalités sociopolitiques du pays, les représentants de l'opposition, notamment ceux du MRC, dénoncent une vision réductrice qui cautionne le communautarisme.
À moins d'un an de la prochaine élection présidentielle, cette analyse illustre les défis auxquels fait face la démocratie camerounaise, où les clivages communautaires continuent d'influencer profondément le jeu politique national.