Cette fronde intervient au moment où Joseph Le, nouveau patron politique de la région prépare un méga-meeting à Bertoua pour début mai 2025, destiné à mobiliser la contrée Est derrière le candidat du RDPC pour la présidentielle d'octobre. La lettre d'Angouing, par son caractère public, jette une ombre sur cet événement censé sceller l'unité du parti.
Alors que Joseph Le, tout nouveau chef de la délégation permanente régionale du RDPC pour l’Est, appelait récemment dans les colonnes de L’Action, le journal du Rassemblement démocratique du peuple camerounais à « rassembler tous [ses] frères de l’Est » au sein du parti, Michel Ange Angouing, éminent militant et ancien ministre, lui adresse une rebuffade cinglante. Par une lettre datée du 12 avril 2025, dont votre journal a obtenu copie, le conseiller technique du ministre de la Justice demande son retrait immédiat de la délégation permanente départementale du parti pour le Haut-Nyong.
Le ton est donné dès les premières lignes : « Je te prie de bien vouloir me retirer de la délégation permanente départementale du RDPC pour le Haut-Nyong ». La suite confine à l’humiliation politique : « Cela t’évitera, à n ’ en point douter, d’oublier ton frère jumeau dans tes décisions souveraines ». Ce sarcasme à peine voilé vise directement le style de gouvernance de Joseph Lé, promu il y a moins de trois mois à la tête de la région Est.
Loyauté au parti, distance avec les hommes
L’ancien ministre de la Fonction publique prend soin de préciser : « Je reste et demeure un citoyen respectueux des institutions de la République et de ceux qui les incarnent ». Mais l’avertissement qui suit sonne comme un camouflet : « Souvenons-nous que dans le secret de l’isoloir [...] chacune des voix compte, quel que soit le rang ou le statut social ». Un rappel à l’ordre à peine voilé sur les réalités du terrain électoral. La charge devient plus directe : « Ta mission principale, c’est de t’assurer qu’aucune voix ne manque au décompte final. Ta mission, c’est d’éviter que tes décisions embarrassent ou divisent ».
Angouing, fin connaisseur de l’appareil du parti, enfonce le clou : « Qui mieux que toi [...] sait que le RDPC est un parti de rassemblement ? ».
Contexte
Plusieurs éléments expliquent la gravité de la situation. D’abord, le statut de Michel Ange Angouing donne un poids particulier à sa prise de position. En tant qu’ancien ministre et cadre historique du RDPC, sa voix compte dans le paysage politique.
Ensuite, le choix du Haut-Nyong comme épicentre de la contestation n’est pas anodin. Ce département représente un bastion électoral stratégique pour le parti au pouvoir. Toute division interne y est donc particulièrement sensible à l’approche des échéances électorales.
Enfin, le calendrier politique aggrave la portée de cette crise. La présidentielle d’octobre 2025 approche à grands pas, et ce genre de dissension publique au sein des rangs du RDPC est rarement vu si près d’un scrutin majeur.
Selon des observateurs politiques interrogés par nos soins, cette affaire révèle une fracture générationnelle au sein du parti. Les anciens cadres comme Angouing supportent mal les méthodes des nouveaux responsables comme Joseph Le.