Selon des révélations exclusives de Jeune Afrique, une nouvelle obédience maçonnique cherche à s'établir au Cameroun à quelques mois d'une élection cruciale.
À six mois de l'élection présidentielle camerounaise, le paysage franc-maçonnique du pays connaît des bouleversements significatifs qui pourraient avoir des répercussions sur la scène politique nationale. D'après des informations exclusives révélées par Jeune Afrique, le Grand Orient de France (GO) devra statuer en juin prochain sur la reconnaissance d'une nouvelle obédience nationale : le « Grand Orient du Cameroun ».
Ce projet, porté par Yves Martin Ahanda Assiga, député à l'Assemblée nationale et chirurgien réputé à l'hôpital général de Yaoundé, vise à « revivifier » la franc-maçonnerie camerounaise. Selon des sources citées par Jeune Afrique, cette initiative naît d'un constat : l'absence des voix maçonniques dans les grands débats sociétaux alors que le pays s'apprête à vivre une présidentielle déterminante en octobre prochain.
« On n'entend pas les maçons dans les grands débats de société alors qu'en octobre, notre pays organisera une présidentielle cruciale pour notre avenir en tant que peuple », confie à Jeune Afrique l'un des frères impliqués dans le projet.
Le 18 avril dernier à Douala, berceau historique de la franc-maçonnerie camerounaise, s'est tenue une cérémonie qualifiée d'« historique » par ses organisateurs : l'allumage des feux de la loge baptisée « Lumière du Cameroun ». Il s'agit en réalité d'un « rallumage », puisqu'une loge portant ce nom avait existé avant les indépendances, accueillant des figures marquantes comme Félix Eboué, gouverneur général de l'Afrique équatoriale française, et Blaise Diagne, premier Africain ministre de la République française.
Selon les révélations de Jeune Afrique, en ressuscitant cet atelier maçonnique qui a accompagné la décolonisation avant de fermer ses portes il y a quatre-vingt-treize ans, les initiateurs font un clin d'œil vers le passé mais aussi vers l'avenir, non sans arrière-pensées politiques.
Les investigations menées par Jeune Afrique révèlent que parmi les promoteurs de cette nouvelle structure figurent des personnalités de premier plan du monde économique et juridique camerounais : Olivier Behle, ancien président du Groupement interpatronal du Cameroun (récemment renommé Gecam), occupe le poste de vénérable maître, tandis que le banquier Hervé Emmanuel Nkom et l'avocat Théodore Elessa occupent respectivement les fonctions d'orateur et de second surveillant.
Le projet est également soutenu par Richard Ndjock, secrétaire général du ministère de la Santé, qui dirige cette nouvelle organisation. Point notable révélé par l'enquête de Jeune Afrique : cette nouvelle obédience affirme compter parmi ses membres des frères proches tant du pouvoir que de l'opposition, une diversité qui pourrait s'avérer précieuse en cas de tensions post-électorales.
Malgré l'enthousiasme affiché par ses promoteurs, l'avenir de cette nouvelle obédience reste incertain. Jeune Afrique rapporte que plusieurs maçons camerounais doutent que le Grand Orient de France accorde sa patente à la nouvelle structure, notamment parce qu'elle viendrait concurrencer la Grande Loge unie du Cameroun (Gluc), déjà affiliée au Grand Orient.
Le verdict tombera en juin prochain, lors du convent du Grand Orient de France, dans un contexte où la franc-maçonnerie camerounaise apparaît plus divisée que jamais.