Nathalie Moudiki et Chantal Biya
Une mainmise clanique et familiale sur les hydrocarbures ? C’est désormais une certitude. À la faveur d’une alliance trouble avec la première dame Chantal Biya, Nathalie Moudiki, épouse de l’ADG de la SNH, a pris le contrôle stratégique de l’entreprise pétrolière la plus sensible du Cameroun. Et elle impose, sans retenue, ses règles à un appareil d’État tétanisé.
Selon nos sources, le lancement officiel de CSTAR, une société chargée de construire un dépôt stratégique de 250 000 tonnes de carburants à Kribi, a été unilatéralement fixé au 28 juin 2025, sans l’aval de la présidence. L’État a-t-il définitivement cédé face à ce tandem redouté ?
Un coup de force silencieux
L’ascension de Nathalie Moudiki à la tête de la SNH ne doit rien au hasard. Ancienne attachée de direction, elle a méthodiquement gravi les échelons grâce à son intimité avec Chantal Biya. Depuis, elle dirige l’entreprise comme un fief privé, marginalisant directeurs et cadres, imposant une gouvernance de la peur. L’administration est en crise, et l’ambiance délétère.
Malgré l’état de santé très dégradé d’Adolphe Moudiki, son époux et DG nominal, aucune nomination intérimaire n’a été officialisée. Un vide qui permet à Nathalie Moudiki d’agir en toute impunité, jusqu’à convoquer seule des conseils d’administration... sans le PCA en fonction, qu’elle cherche activement à évincer. Des correspondances confidentielles auraient déjà été envoyées à Paul Biya pour exiger son départ.
Le pouvoir de l’ombre
Ce déséquilibre institutionnel révèle une autre réalité : Chantal Biya gouverne désormais à visage découvert. Son soutien indéfectible à Nathalie Moudiki transforme la SNH en bras financier d’un pouvoir parallèle, hors de tout contrôle démocratique. Selon nos sources, l’un des fils de la première dame, à savoir Franck Hertz, a été récemment introduit au conseil d’administration de CSTAR. Une affaire de famille, littéralement.
Le projet CSTAR lui-même interroge. Construit sans validation présidentielle, il est porté par un SPV nébuleux basé... au Vanuatu. Ce micro-État du Pacifique Sud, réputé pour son opacité fiscale, abrite le montage offshore du projet. Aucun impôt, secret bancaire total : l’argent du pétrole camerounais y sera invisibilisé, loin des regards de l’État.
Coup d’État économique en douce
C’est le point de rupture. Depuis quand la SNH, entreprise d’exploration et d’exportation pétrolière, détient-elle le mandat de stocker les réserves stratégiques du pays ? Cette mission, historiquement réservée à la SCDP, a été discrètement dévoyée. Sans décret, sans débat, sans contre-pouvoir.
Cerise sur le baril : Nathalie Moudiki s’est autoproclamée présidente du conseil d’administration et CEO de CSTAR, lors d’un conseil tenu à Dubaï, en avril 2025. Elle y représentait... son propre mari, pourtant toujours en poste officiellement. Qui l’a nommée ? En vertu de quel texte ? Personne ne le sait.
Silence au sommet, malaise au pays
Alors que l’appareil d’État observe sans mot dire cette dérive, les questions s’accumulent :
Quelle légitimité pour Nathalie Moudiki dans la gestion des hydrocarbures ?
Pourquoi le président Paul Biya ne tranche-t-il pas ?
Quelle est l’étendue réelle du pouvoir de Chantal Biya ?
Le réveil pourrait être brutal. Le chantier du dépôt de Kribi n’est peut-être qu’un prélude : si la dérive continue, le Cameroun pourrait bientôt voir sa souveraineté énergétique confisquée par un clan.