28 ans de vie sur terre. C’est mon anniversaire. Voici l’histoire de ma vie. C’était en septembre 2002. Un petit villageois que j’étais venait d’arriver à Douala, après avoir passé les premières années de ma vie à Bafou, mon village natal.
Cette année-là, j’ai été inscrit à l’école maternelle de New Deido. Petit garçon timide, au style vestimentaire drôle, je faisais mes premiers pas à l’école. Je ne comprenais pas un mot de français. Je m’exprimais en Yemba, ma langue maternelle. Même si personne ne me comprenait, les gestes et les regards parlaient à ma place.
J’ai grandi à Douala. Mon enfance, je l’ai passée dans les rues de Deido, à vendre de l’eau glacée. C’est là que j’ai appris à compter, à entreprendre, à épargner. Parce qu’on n’avait pas le luxe de manger du pain et du lait chaque matin. Mais malgré tout, Douala reste pour moi une source de souvenirs précieux : les balades sur l’ancien pont du Wouri, le football pieds nus dans la rue, les jeux de cache-cache avec mes amis d’enfance : Doumbè, Penda, Tsata, Owono…
Mais je ne peux pas parler de ma vie sans parler de Yaoundé. Ah Ongola, la ville aux 7 collines… C’est là que je suis devenu un homme. Là que j’ai appris à survivre, à me battre, à ne compter que sur mes forces. À 14 ou 15 ans, je passais mes journées entre les chantiers de Mendong et le pousse-pousse à Mokolo.
Il fallait lutter pour espérer gagner un peu d’argent chaque semaine. Mais on tenait bon, on ne lâchait pas, parce qu’un lion affamé peut renverser toute une armée de buffles. Aujourd’hui, je sais que cette étape a été essentielle, car après avoir connu la misère, plus rien ne fait peur.
Aujourd’hui, je suis à Boston. On n’est pas encore au sommet, mais l’avenir se dessine. Je garde la même rage, le même courage, la tête toujours haute, même les jours où le moral vacille.
Je veux prendre un instant pour remercier mon entourage, en particulier ma famille. Sans vous, j’aurais pu sombrer. Ma survie est le fruit d’un effort collectif, chaque membre de ma famille a contribué à mon élévation, de ma naissance à aujourd’hui. Et même maintenant, je sais que je peux compter sur vous.
Et comme Dieu sait faire les choses, Il a mis sur mon chemin une lionne, une femme forte, qui m’accompagnera pour le reste du voyage.
En 28 ans, j’ai tiré quelques leçons de la vie : un arbre n’est rien sans ses racines. On n’oublie jamais d’où l’on vient. Tu peux faire le tour du monde, mais tu ne te sentiras jamais aussi bien qu’à la maison. La souffrance est une école de sagesse. Elle te forme, elle t’endurcit, elle te prépare à affronter l’avenir.
Mais le plus précieux, mon plus beau cadeau d’anniversaire, c’est d’être Camerounais. Ma nationalité est mon trésor, mon drapeau est ma fierté. Je suis né Camerounais, et je resterai patriote pour la vie.