Disqualification de Biya: les arguments en béton de Me Akere Muna qui relance tout

Ombre Paulbiya Paul Biya

Wed, 20 Aug 2025 Source: www.camerounweb.com

Le 18 Août dernier, Me Akere Mouna, avocat, candidat à l'élection présidentielle de 2025 a saisi le Conseil constitutionnel du Cameroun en vue de la constatation de l'inéligibilité de Paul Biya.

Voici les faits exposés par l'ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun:

"Qu’il formule, par les présentes, une requête en constatation d’inéligibilité prévue par l’Article 118 de la Loi électorale, Loi N0. 2012/001 du 19 Avril 2012 portant Code électoral, modifiée et complétée par la loi No. 2012/017 du 21 décembre 2012 et la Loi No. 2019/005 du 25 Avril 2019.

●EXPOSÉ DES FAITS

Contexte de la saisine :

- L’article 118(1) de la Loi électorale dispose que : « sont inéligibles les personnes qui, de leur propre fait, se sont placées dans une situation de dépendance ou d’intelligence vis-à-vis d’une personne, d’une organisation ou d’une puissance étrangères ».

L’alinéa 2 précise que cette inéligibilité est constatée par le Conseil Constitutionnel sous 3 jours après saisine.

Depuis le lancement du processus électoral, Monsieur Paul BIYA n’a pas été vu par le public camerounais dont il sollicite les votes. Il a informé la nation de sa candidature par un simple message diffusé sur les réseaux sociaux via le compte « X », sans jamais se présenter physiquement. Il n’a pas déposé lui-même son dossier à ELECAM, confiant cette tâche à des tiers. Lorsqu’un membre de son propre parti a contesté la validité de son investiture devant le Conseil Constitutionnel, il s’est encore fait représenter par procuration, sans jamais apparaître en personne.

Cette investiture, d’ailleurs, s’est déroulée dans des conditions pour le moins singulières, qui trahissent une incapacité croissante à assumer les exigences d’un scrutin public.

Depuis plus de dix ans, aucun organe statutaire du parti au pouvoir – dont les mandats ont tous expiré – ne s’est réuni en sa présence.

Le Conseil supérieur de la magistrature, qu’il doit présider, n’a pas tenu de séance depuis six ans, bloquant ainsi la prestation de serment de six promotions de magistrats.

En 43 ans de pouvoir, il n’a assisté qu’à trois sommets de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) ou de l’Union Africaine (UA).

Chaque apparition publique est désormais chorégraphiée pour masquer sa dépendance et ses limites physiques. Les protocoles sont adaptés non pas pour servir le peuple, mais pour accommoder un homme dont l’état exige une assistance permanente. Cette situation n’est pas seulement une question d’âge : c’est une violation flagrante de l’article 118 de la Loi électorale, qui interdit à quiconque, du fait de sa propre situation, de se placer dans un état de dépendance incompatible avec l’exercice autonome du pouvoir.

●Lors du sommet États-Unis-Afrique de décembre 2022, le Président Paul Biya a présenté un comportement alarmant, révélateur d’une profonde dépendance physique et cognitive. Les images diffusées ont montré un dirigeant manifestement désorienté, semblant ignorer où il se trouvait et pourquoi il y était. Il est apparu surpris lorsqu’on lui a indiqué qu’il devait prononcer un discours, comme s’il découvrait l’événement au dernier moment. Plus grave encore, il a nécessité une assistance constante pour des décisions élémentaires, comme le choix de s’asseoir ou de rester debout pendant son allocution.

Cette situation n’est malheureusement pas isolée. Elle s’inscrit dans une logique de dépendance systématique, déjà explicitée à laquelle il faut ajouter ses hospitalisations prolongées à l’étranger, notamment en Suisse, où il séjourne régulièrement pour des raisons médicales non transparentes.

Ces éléments démontrent qu’il ne remplit plus les conditions d’indépendance exigées par l’article 118 dont il s’agit. Un Président qui ne peut pas, sans aide extérieure, décider de s’asseoir ou de se lever lors d’un discours officiel est incapable d’exercer les fonctions exigeantes de Chef de l’État.

Sur la recevabilité de la requête :

●Légitimité du requérant : En tant que candidat à la même élection, l’exposant a un intérêt direct et actuel à contester l’éligibilité d’un rival non conforme à la loi électorale (Art. 118 al. 2).

●Délai impératif : Contrairement au cas de saisine en cas de rejet de candidature, l’article 118 ne fixe pas de délai de saisine mais fixe un délai de trois jours pour que le conseil vide sa saisine.

Il s’ensuit donc que la présente requête est recevable.

Sur le Fondement juridique

Interprétation de l’article 118 :

●La « dépendance » inclut toute situation où un candidat n’agit plus de manière autonome, que ce soit pour des raisons de santé, d’âge, ou de soumission à des tiers.

●La loi vise à protéger l’indépendance nationale ; un président incapable physiquement est de facto sous l’emprise d’autrui.

●The « Mischief Rule » : en application des principes dualistes du système juridique camerounais, cette requête s'appuie égalementsur la jurisprudence Common Law, notamment la « mischief rule » consacrée par l'arrêt Heydon (1584) 76 ER 637.

Cette règle d'interprétation impose au juge de rechercher l'objectif premier du législateur et le vice (mischief) que la loi entendait corriger.

L'article 118(1) du Code électoral dispose que « sont inéligibles les personnes qui, de leur propre fait, se sont placées dans une situation de dépendance ou d’intelligence vis-à-vis d’une personne, d’une organisation ou d’une puissance étrangères ».

L'esprit de cette disposition, le mischief visé, est clair :

●Empêcher qu’un candidat à la présidence ne soit sous l’emprise d’autrui, rendant impossible l’exercice indépendant et souverain de ses fonctions.

●Éviter qu’un dirigeant ne devienne une simple marionnette, incapable de prendre des décisions autonomes pour la nation.

Or, les faits sont incontestables :

1. Le Président actuel s’est volontairement placé dans un état de dépendance physique et cognitive, comme en témoignent :

●Ses absences prolongées et répétées (42 jours consécutifs à l’étranger en 2024);

●Son incapacité à présider les institutions (Conseil Supérieur de la Magistrature non réuni depuis 6 ans, RDPC sans congrès depuis 10 ans, Conseil des Ministres depuis 2019) ;

●Sa gouvernance par procuration (instructions données par des tiers non élus, y compris des fonctionnaires censés être apolitiques).

2. Cette dépendance n’est pas une simple délégation de pouvoir(licite dans certains cas), mais bien une incapacité structurelle à agir sans guidance externe, comme le démontre :

●Sa désorientation manifeste lors du sommet États-Unis-Afrique 2022 (incapacité à prononcer un discours sans assistance) ;

●Ses aveux mêmes du Ministre de la Justice (Journal du Ministère n°034/2024) sur les « injonctions » illégitimes paralysant l’appareil judiciaire.

À l’instar de l’arrêt Corkery v. Carpenter (1951) 1 KB 102, où la Cour a interprété le terme « carriage » dans le Licensing Act 1872 pour y inclure un vélo (bien que non explicitement mentionné), le Conseil Constitutionnel doit ici interpréter l’article 118(1) en fonction de son objet :

●Le mischief visé : Empêcher qu’un dirigeant ne soit sous influence.

●La réalité factuelle : Un Président dépendant de son entourage pour les actes les plus élémentaires.

Il est évident que le Président actuel a volontairement placé son mandat dans un état de dépendance, violant ainsi l’esprit et la lettre de l’article 118(1).

Le rendant ainsi inéligible, conformément à l’objectif premier du législateur : protéger la République contre les risques d’une présidence fantôme.

La mischief rule commande une interprétation dynamique et téléologique de la loi, une approche dont notre démocratie a cruellement besoin aujourd’hui.

Jurisprudence comparative :

●En droit comparé, les cours constitutionnelles ont invalidé des candidatures pour incapacité physique avérée.

●La dépendance médicale prolongée équivaut à une aliénation de la volonté politique.

Pour raisonner juridiquement et par analogie, l’analyse de la notion d'abus de faiblesse, reconnue tant en droit civil français (article 1143 du Code civil français) qu'en droit pénal français (article 223-15-2 du Code pénal français), il apparaît que la situation actuelle correspond aux critères de ce délit particulier appliqué à la sphère publique.

Éléments constitutifs de l'abus de faiblesse présidentielle :

●État de vulnérabilité avéré : L'âge avancé (92 ans) et les absences médicales répétitives créent une faiblesse physique et psychique objective, scientifiquement établie par les études gériatriques jointes en annexe.

●Exploitation de cette faiblesse : L'entourage immédiat organise des apparitions téléguidées, rédige des discours simplistes, et prend des décisions en lieu et place du président, comme en témoignent les déclarations contradictoires des membres du gouvernement.

Application au cas d'espèce :

●Manifestations concrètes : La récente investiture par procuration au sein du parti présidentiel, où le candidat n'est même pas apparu physiquement, constitue un aveu institutionnel de cette exploitation.

- Conséquences juridiques : Cet abus vicie le consentement électoral de la nation toute entière, comme le démontre l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 6 octobre 2020 (req. n° 50541/14) sur les processus électoraux entachés de captation de volonté.

Portée légale :

L'article 118 doit s'interpréter à la lumière de ce principe fondamental : un candidat placé sous influence permanente, qu'elle soit médicale, politique ou administrative, ne peut valablement prétendre incarner la souveraineté nationale. Le régime des tutelles en droit privé trouve ici son exact pendant public.

Il est du devoir de cet auguste Conseil Constitutionnel de constater cette inéligibilité, conformément à la loi. Le danger exige de protéger la République contre les risques d’une gouvernance par procuration.

La gestion des affaires publiques s'est progressivement transformée en un système de gouvernance par procuration, vidant de sa substance le principe constitutionnel de leadership présidentiel. Les Camerounais ont tragiquement normalisé l'expression « sur hautes instructions du Président de la République », formule derrière laquelle se cache une confiscation du pouvoir par des cercles opaques.

Pendant qu’ELECAM se préoccupe de la dimension des affiches de campagne des candidats dans un pays ou les posters géants et projections vidéos du président actuel se trouvent a quasiment la plupart des carrefours de la cité capitale, la nation assiste médusée à un spectacle surréaliste où un haut fonctionnaire non élu, théoriquement apolitique, reçoit quotidiennement au Palais de l'Unité, transformé en quartier général de campagne, des délégations de chefs traditionnels, religieux, parlementaires, ministres et autres dignitaires. Ces audiences illégitimes car organisées par un haut fonctionnaire sans mandat populaire, violent trois principes fondamentaux :

1) La neutralité de l'administration : Ce fonctionnaire outrepasse ses attributions en menant des activités partisanes depuis le siège de la présidence.

2) La séparation des pouvoirs : Le Premier Ministre, chef constitutionnel du gouvernement, est réduit au silence tandis qu'un bureaucrate usurpe ses prérogatives.

3) La transparence démocratique : Des « instructions présidentielles » sont invoquées sans que le Président n'apparaisse jamais pour les authentifier.

Cette mascarade institutionnelle prouve que le pouvoir réel est exercé par procuration, confirmant ainsi la dépendance physique et cognitive du candidat Biya vis-à-vis de son entourage, situation expressément prohibée par l'article 118 dont il est question. Le Palais de l'Unité, maison du peuple, est devenu le théâtre d'une imposture démocratique où un autorité invisible règne par l'intermédiaire d'oligarques non élus.

Hautes Instructions et Gouvernance par Procuration

Un article du Garde des Sceaux, publiée dans le Journal du ministère de la Justice (JUSTICIA n°034 de janvier 2024), constitue un aveu édifiant de la gouvernance par procuration qui mine l'État camerounais. Le Garde des Sceaux y reconnaît lui-même que :

« Les personnels judiciaires sont assaillis de manière récurrente voire permanente par des injonctions, des impostures et des intimidations de toutes sortes [...] visant à les obliger à enfreindre les lois »

Ce témoignage ministériel accablant, établit trois éléments cruciaux pour la présente requête en inéligibilité fondée sur l'article 118 :

1. L'existence d'un système de gouvernance parallèle

- Les « injonctions répétitives » évoquées par le Ministre correspondent exactement aux prétendues « hautes instructions présidentielles » invoquées par des fonctionnaires non élus.

- La mention des « impostures » confirme la falsification de la volonté présidentielle.

2. La violation caractérisée de la séparation des pouvoirs

- Le ministre concède que les magistrats sont « tiraillés » entre leur serment et des pressions externes.

- Son affirmation selon laquelle « le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature ne saurait leur demander de violer la loi » révèle à contrario que de telles demandes illicites existent.

3. La preuve d'une dépendance présidentielle

L'avertissement solennel que « Son Excellence Paul Biya ne peut leur donner des instructions » démontre :

- Que le Président n'a pas la capacité physique/cognitive d'exercer directement son autorité

- Que des tiers usurpent régulièrement son autorité

Cette publication du Garde des Sceaux constitue donc une preuve irréfutable que:

- Le Président règne mais ne gouverne plus

- Le pouvoir réel est exercé par procuration violant l'article 118

- L'État fonctionne par « impostures » institutionnalisées.

Santé et dépendance

Si la santé des dirigeants relève normalement de la vie privée, elle devient une question d’intérêt public lorsque l’exercice effectif du pouvoir en dépend. Le Cameroun ne peut se permettre de rester stationnaire, à l’image de l’état de santé incertain de son chef.

L’histoire récente prouve les dangers d’une présidence dépendante des cliniques

médecins étrangers :

- L’exemple tragique du premier Président du Cameroun, Ahmadou Ahidjo illustre ce risque :

- Démission forcée en 1982 sur la base d’un diagnostic erroné d’une supposé maladie en phase terminale par ses médecins étrangers.

- Tentative avortée de retour au pouvoir après la découverte de l’erreur médicale.

- Mort en exil, loin de sa patrie,symbole d’une rupture définitive avec le Cameroun.

Aujourd’hui, le risque se répète

1) Dépendance médicale étrangère :

- Hospitalisations répétées et prolongées en Europe (notamment en Suisse), sans transparence sur l’état de santé réel.

- Risque de diagnostics ou traitements influençant les décisions politiques (comme dans le cas Ahidjo).

2) Vide constitutionnel latent :

Un président sous traitement lourd ou en convalescence prolongée à l’étranger ne peut exercer ses fonctions en pleine autonomie.

3) Menace sur la souveraineté nationale :

- Des soins dispensés à l’étranger exposent le chef de l’État à des pressions géopolitiques ou économiques liées à son dossier médical.

- Absence de contrôle démocratique : Contrairement au Bénin (où Patrice Talon a communiqué sur ses opérations) ou au Maroc (Mohammed VI est transparent sur ses soins), le Cameroun subit un black-out médical incompatible avec l’État de

droit.

L’article 118(1) du Code électoral vise précisément à éviter ces dérives en interdisant les candidatures de personnes placées « dans une situation de dépendance […] vis-à-vis d’une personne, d’une organisation ou d’une puissance étrangère ». Or :

- Un Président dépendant de médecins étrangers pour des soins vitaux est de facto sous influence extérieure.

- Un Chef d’État absent pour raisons médicales ne peut garantir la continuité indépendante de l’État.

A. Violation caractérisée de l’article 118

- En maintenant sa candidature alors qu’il est physiquement et cognitivement dépendant, M. BIYA a violé la Constitution.

- Son incapacité à exercer la magistrature suprême met en péril la souveraineté nationale, car il reste dépendant des cercles opaques (nationaux et étrangers).

En conclusion soumet à l’examen du conseil :

Une demande de comparution ou de production d'un dossier médical pour permettre au Conseil Constitutionnel de statuer en pleine connaissance de cause sur l'application de l'article 118 du Code électoral, nous demandons respectueusement au Conseil :

Soit d'ordonner la comparution personnelle du candidat Paul BIYA devant le Conseil, afin de constater directement son état physique et cognitif seul moyen de vérifier sa capacité à exercer la magistrature suprême de manière autonome ;

Soit d'exiger la production d'un dossier médical complet et actualisé, établi par une commission d'experts indépendants et pluridisciplinaires, permettant d'écarter tout doute sur une éventuelle situation de dépendance au sens de l'article 118.

Cette mesure est d'autant plus nécessaire que le candidat n'est pas apparu en public depuis le début du processus électoral. Le principe de transparence, essentiel en matière électorale, justifie pleinement cette demande.

B. Application de l'article 128 du Code électoral

Dans l'hypothèse où le Conseil Constitutionnel déclarerait le candidat Paul Biya inéligible sur le fondement de l'article 118, nous rappelons que l'article 128 du Code électoral prévoit expressément :

(1) La possibilité pour le parti politique concerné (en l'occurrence le RDPC) de proposer un autre candidat remplissant toutes les conditions d'éligibilité, dans un délai maximum de trois (3) jours suivant la décision d'inéligibilité ;

(2) Que ce mécanisme de remplacement permet d'assurer la continuité démocratique tout en respectant strictement les exigences constitutionnelles.

Le Conseil Constitutionnel voudra bien, le cas échéant, préciser dans sa décision les modalités pratiques de mise en œuvre de cet article 128, afin de garantir la régularité de la suite du processus électoral.

C’est pourquoi, l’exposant prie respectueusement le Conseil constitutionnel de bien vouloir

1. Constater que le candidat Paul Biya est inéligible à l’élection présidentielle, conformément à l’article 118 du Code électoral, au motif qu’il se trouve dans un état de dépendance avéré, tant physique que cognitive, l’empêchant d’exercer les fonctions présidentielles de manière autonome et souveraine ;

2. Ordonner, à titre subsidiaire et à défaut de constatation immédiate de son inéligibilité :

- Soit sa comparution personnelle devant le Conseil, afin de vérifier son aptitude à assumer les charges de la présidence ;

- Soit la production d’un bilan médical complet, établi par une commission d’experts indépendants, permettant d’écarter tout doute sur son état de dépendance ;

3. Appliquer, le cas échéant, l’article 128 du Code électoral, en permettant au parti concerné de proposer, dans un délai de trois (3) jours, un autre candidat remplissant toutes les conditions d’éligibilité ;

4. Statuer en urgence, afin de préserver la régularité et la crédibilité du processus électoral, ainsi que la stabilité institutionnelle du Cameroun.

EN FOI DE QUOI, la présente requête est très respectueusement soumise à l’appréciation du Conseil Constitutionnel, avec l’espoir qu’elle sera accueillie dans l’intérêt supérieur de la nation et du respect strict de la Constitution et la loi électorale.

Source: www.camerounweb.com