REVELATION: dans le clan Tchiroma, la famille et les stratèges qui défient Paul Biya

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Mon, 27 Oct 2025 Source: www.camerounweb.com

De sa fille spin doctor à son frère réconcilié, en passant par ses lieutenants sur le terrain, Jeune Afrique dévoile le cercle rapproché qui pilote la contestation la plus sérieuse que le régime Biya ait connue.

Par la rédaction

Derrière chaque leader politique se cache une équipe, un clan, une famille. Pour Issa Tchiroma Bakary, qui défie aujourd'hui Paul Biya et conteste sa défaite officielle à la présidentielle du 12 octobre, ce cercle rapproché est composé de figures aussi diverses qu'improbables. Jeune Afrique a mené l'enquête et dévoile en exclusivité les noms, les rôles et les secrets de ceux qui portent, dans l'ombre et la lumière, la contestation la plus sérieuse que le régime camerounais ait connue depuis des décennies.

Rouhaya Tchiroma, la fille qui négocie dans l'ombre

Au cœur du dispositif, Jeune Afrique révèle une figure méconnue du grand public mais déterminante : Rouhaya Tchiroma, la fille d'Issa Tchiroma Bakary. Loin de l'image traditionnelle de la fille de candidat cantonnée aux rôles protocolaires, Rouhaya s'est imposée comme la véritable spin doctor de son père.

Selon les informations exclusives de Jeune Afrique, c'est elle qui pilote la plupart des négociations avec les autres figures de l'opposition camerounaise. Une mission délicate, qui exige diplomatie et fermeté. Jeune Afrique a appris que c'est Rouhaya qui a mené les pourparlers avec Akere Muna, ancien bâtonnier et candidat à la présidentielle. Ces discussions, tenues dans le plus grand secret, visaient à rallier Muna au camp de Tchiroma Bakary. Elles se sont finalement soldées par un échec, révèle Jeune Afrique, Muna choisissant de maintenir sa propre candidature.

« Rouhaya est le bras négociateur de son père », confie à Jeune Afrique un proche de la famille. « Issa Tchiroma lui fait une confiance absolue. Dans les situations les plus sensibles, c'est elle qu'il envoie. Elle connaît les dossiers sur le bout des doigts et ne se laisse pas impressionner. »

Jeune Afrique révèle également que Rouhaya accompagne son père lors de tous ses déplacements stratégiques. Plus encore, elle s'est exprimée en son nom dans plusieurs médias, assumant ainsi un rôle public inhabituel pour une membre de la famille d'un candidat. « Elle est bien plus qu'une fille dévouée », analyse pour Jeune Afrique un observateur de la scène politique camerounaise. « Elle est un pilier du dispositif. »

Aminata Müller, l'épouse allemande qui embarrasse le régime

Autre membre crucial du cercle familial : Aminata Müller, l'épouse d'Issa Tchiroma Bakary. Jeune Afrique dresse le portrait de cette femme « très discrète » mais dont le rôle a souvent été « déterminant » dans le parcours politique de son mari.

Le couple a voté côte à côte, « uni et serein », le 12 octobre à Garoua, rapporte Jeune Afrique. Mais c'est surtout la nationalité allemande d'Aminata Müller qui a alimenté les rumeurs. Selon les révélations de Jeune Afrique, des bruits ont circulé pendant la précampagne : certains prétendaient qu'Issa Tchiroma possédait lui aussi la double nationalité et que sa candidature serait disqualifiée pour ce motif.

« C'était une tentative du pouvoir de le déstabiliser », affirme à Jeune Afrique un membre de l'équipe de campagne. « Ils ont essayé de transformer la nationalité d'Aminata en arme contre Issa. Mais ça n'a pas marché. Il n'a jamais eu la nationalité allemande. »

Jeune Afrique souligne que cette affaire de double nationalité n'a finalement pas abouti, et qu'Issa Tchiroma Bakary a pu maintenir sa candidature. Mais elle illustre la volonté du régime de trouver n'importe quel prétexte pour l'écarter de la course.

Hassana Tchiroma, le frère réconcilié pour la bataille finale

Dans cette saga familiale, Jeune Afrique dévoile un autre personnage clé : Hassana Tchiroma, le frère d'Issa. Leur relation illustre les déchirures et les réconciliations que la politique camerounaise impose aux familles.

Selon les informations exclusives de Jeune Afrique, quand Issa Tchiroma était encore un allié fidèle de Paul Biya, Hassana avait pris ses distances avec son frère. Il soutenait alors l'ancien ministre Marafa Hamidou Yaya et Bello Bouba Maïgari, deux figures de l'opposition nordiste. La fratrie était divisée, chacun dans un camp opposé.

Mais à l'occasion de la présidentielle de 2025, Jeune Afrique révèle que les deux frères ont mis leurs différends de côté. « Cette réconciliation n'est pas anodine », explique à Jeune Afrique un analyste politique. « Elle symbolise la réunification du Nord derrière Issa Tchiroma. Quand même les familles déchirées par la politique se rassemblent, c'est que quelque chose de profond est en train de se passer. »

Cette alliance retrouvée renforce la légitimité d'Issa Tchiroma Bakary dans le septentrion, où les liens familiaux et les solidarités claniques jouent un rôle politique majeur, note Jeune Afrique.

Chris Manengs, la voix officielle de la contestation

Au-delà du cercle familial, Jeune Afrique identifie les stratèges qui pilotent au quotidien la contestation post-électorale. En première ligne : Chris Manengs, directeur de campagne et porte-parole officiel d'Issa Tchiroma Bakary.

Selon les révélations de Jeune Afrique, dans un communiqué daté du 19 octobre, Issa Tchiroma a révoqué tous ses mandats de communication et a confié à Chris Manengs « la responsabilité exclusive de s'exprimer en son nom ». Une décision qui témoigne de la confiance absolue accordée à cet homme.

Depuis cette date, Jeune Afrique rapporte que Manengs dénonce inlassablement les irrégularités relevées dans certains procès-verbaux du scrutin du 12 octobre. C'est également lui qui explique publiquement la raison pour laquelle Issa Tchiroma n'a pas saisi le Conseil constitutionnel, jugé « inféodé au pouvoir » par son camp.

« Chris Manengs est un professionnel de la communication », précise Jeune Afrique. Entrepreneur et consultant en communication, il est titulaire de diplômes en relations publiques, en marketing et en résolution de conflits. « Ce n'est pas un militant improvisé », souligne à Jeune Afrique un observateur des médias camerounais. « Il maîtrise les codes de la communication moderne et sait comment faire passer les messages dans un environnement médiatique hostile. »

Les coordinateurs régionaux : Souleymane Karamoko et Ibrahim Bouba

Mais la bataille ne se gagne pas seulement dans les médias. Elle se joue aussi sur le terrain, dans les régions stratégiques du Nord. Jeune Afrique dévoile les noms de deux hommes clés dans ce dispositif territorial.

Souleymane Karamoko, ancien dirigeant du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN) de Cabral Libii dans la région de l'Adamaoua, a démissionné quelques mois avant la présidentielle pour rejoindre Issa Tchiroma Bakary, révèle Jeune Afrique. Après avoir un temps envisagé de soutenir Bello Bouba Maïgari, il a finalement fait le choix de Tchiroma. Nommé conseiller spécial, il a coordonné la campagne dans sa région, l'Adamaoua, un territoire stratégique du septentrion.

« Le ralliement de Karamoko était un signal fort », explique à Jeune Afrique un cadre du FSNC. « Il a amené avec lui une partie de la base militante de Cabral Libii dans l'Adamaoua. C'était un gain politique majeur. »

Dans l'Extrême-Nord, autre bastion électoral à l'importance stratégique, Jeune Afrique identifie Ibrahim Bouba comme coordinateur régional par intérim du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC). Âgé de moins de 40 ans, il siège à la communauté urbaine de Maroua, dont il est conseiller municipal.

« Sa nomination témoigne de l'importance de l'Extrême-Nord dans la campagne de Tchiroma Bakary », souligne Jeune Afrique. Cette région, la plus septentrionale du pays, concentre une part importante de l'électorat nordiste et constitue un verrou stratégique pour tout candidat souhaitant s'imposer dans le Grand Nord.

Selon les informations de Jeune Afrique, Ibrahim Bouba a orchestré plusieurs des plus grandes mobilisations en faveur de Tchiroma Bakary dans la région. « Il connaît le terrain comme sa poche », confie à Jeune Afrique un militant local. « C'est un jeune loup, énergique, qui sait mobiliser les foules. »

Jean-Calvin Aba'a Oyono et Emmanuel Simh : les transfuges du MRC

Mais la machine Tchiroma ne fonctionne pas uniquement grâce à ses propres troupes. Jeune Afrique révèle que deux figures importantes du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto ont choisi de soutenir Issa Tchiroma Bakary, et ce avant même que leur parti ne prenne position.

Jean-Calvin Aba'a Oyono, conseiller spécial au sein du MRC et universitaire agrégé en droit public, occupe auprès de Tchiroma Bakary un rôle « officieux de conseiller stratégique », dévoile Jeune Afrique. Il a accompagné le candidat à de nombreux meetings à travers le pays : Bafoussam, Bamenda, Buea, Douala, Maroua, et Garoua, participant activement à la coordination de sa communication.

« Aba'a Oyono apporte une double valeur ajoutée », analyse pour Jeune Afrique un observateur politique. « D'abord, son expertise juridique, précieuse pour contester les résultats. Ensuite, et surtout, son origine : il vient du Sud. Cela permet à Tchiroma d'atténuer son image "de nordiste" et de montrer qu'il rassemble au-delà de son fief. »

Emmanuel Simh, membre du directoire et troisième vice-président du MRC, a également fait le même choix, révèle Jeune Afrique. Ce ralliement lui a valu de nombreuses critiques au sein de son propre parti, certains partisans de Maurice Kamto étant favorables à Bello Bouba Maïgari ou bien à une abstention le 12 octobre.

« Simh a pris un risque politique considérable », note Jeune Afrique. Selon nos informations, convaincu de soutenir « le candidat légitime », il intervient régulièrement dans les médias pour expliquer les décisions clés de Tchiroma Bakary, notamment l'absence de recours devant le Conseil constitutionnel.

« Ces transfuges du MRC sont essentiels », explique à Jeune Afrique un analyste politique. « Ils apportent la légitimité de Kamto sans que Kamto lui-même ait eu besoin de se prononcer. C'est un coup politique malin. »

Les militants de la rue : Anicet Ekane et Djeukam Tchameni

Sur le terrain de la mobilisation populaire, Jeune Afrique identifie deux autres figures clés. Anicet Ekane, président contesté du Manidem, s'est rallié à Issa Tchiroma Bakary après que la candidature de Maurice Kamto a été écartée, révèle Jeune Afrique. Sans attendre une prise de position officielle du postulant évincé, Ekane a choisi d'anticiper.

Selon les informations de Jeune Afrique, par le biais de la plateforme de l'Union pour le changement (UPC), il s'est engagé pleinement dans la coordination d'éventuelles « actions de rue » aux côtés de Djeukam Tchameni. Ce dernier, longtemps critiqué pour ses prises de position jugées favorables au pouvoir, joue désormais un rôle essentiel dans la mobilisation, rapporte Jeune Afrique.

« Djeukam Tchameni connaît Douala comme personne », confie à Jeune Afrique un militant de l'opposition. « C'est lui qui peut faire descendre les gens dans la rue. Il a les réseaux, les contacts dans les quartiers populaires. Aussi bien sur les réseaux sociaux qu'au sein des cercles politiques, il est incontournable à Douala. »

Jeune Afrique note que le choix de ces deux hommes est stratégique : si la situation dégénère après la proclamation des résultats par le Conseil constitutionnel, ce sont eux qui seront en première ligne pour organiser la contestation populaire.

Alice Nkom, la doyenne des droits humains

Mais la contestation ne se limite pas aux stratèges et aux militants. Elle s'appuie aussi sur des figures morales, révèle Jeune Afrique. Parmi elles, Alice Nkom occupe une place à part.

Première femme inscrite au barreau du Cameroun et militante historique des droits humains, l'avocate Alice Nkom s'est « lancée à corps perdu » dans la campagne de Tchiroma Bakary, rapporte Jeune Afrique, en particulier après la disqualification de Maurice Kamto.

Selon les informations de Jeune Afrique, à Douala, lors du meeting géant du candidat, celle qui milite de longue date pour une alternance politique a été honorée en tant qu'invitée spéciale. Issa Tchiroma Bakary l'a personnellement remerciée pour son engagement, dans un geste symbolique fort.

« Alice Nkom, c'est la conscience morale de l'opposition camerounaise », souligne à Jeune Afrique un militant des droits de l'homme. « Quand elle vous soutient, vous gagnez en crédibilité. Son engagement dit : ce combat est juste, il mérite d'être mené. »

Un clan hétéroclite mais soudé

Ce qui frappe dans ce portrait collectif dressé par Jeune Afrique, c'est l'hétérogénéité du clan Tchiroma. On y trouve des membres de la famille, des professionnels de la communication, des transfuges d'autres partis, des militants de rue, des juristes, des figures morales.

« Cette diversité est à la fois une force et une fragilité », analyse pour Jeune Afrique un sociologue politique. « Une force, parce qu'elle permet de toucher différents segments de l'électorat et de l'opinion. Une fragilité, parce que ces gens n'ont pas tous les mêmes intérêts ni les mêmes objectifs à long terme. »

Selon les informations de Jeune Afrique, des tensions ont déjà émergé au sein de ce cercle rapproché, notamment sur la stratégie à adopter après le 12 octobre. Certains prônent la mobilisation de rue immédiate, d'autres privilégient les recours juridiques internationaux, d'autres encore misent sur la pression diplomatique.

« Issa Tchiroma doit arbitrer en permanence », confie à Jeune Afrique un proche. « Ce n'est pas facile de tenir ensemble des personnalités aussi fortes et des sensibilités aussi différentes. Mais pour l'instant, ça tient. »

Le test de la proclamation des résultats

Alors que le Conseil constitutionnel s'apprête à proclamer ce lundi les résultats définitifs de la présidentielle, ce clan hétéroclite dévoilé par Jeune Afrique se tient prêt. Chacun connaît son rôle : Rouhaya et Aminata dans le cercle familial, Chris Manengs dans la communication, Aba'a Oyono et Simh dans le conseil stratégique, Karamoko et Bouba sur le terrain nordiste, Ekane et Tchameni dans la mobilisation de rue.

« Nous avons préparé tous les scénarios », affirme à Jeune Afrique un membre de l'état-major de campagne. « Quelle que soit la décision du Conseil constitutionnel, nous ne serons pas pris au dépourvu. Chaque membre de l'équipe sait ce qu'il a à faire. »

Le pari d'Issa Tchiroma Bakary est audacieux : transformer une contestation électorale en mouvement populaire capable de faire plier Paul Biya. Pour réussir, il s'appuie sur ce clan révélé en exclusivité par Jeune Afrique : une famille soudée, des stratèges aguerris, des militants déterminés.

« Cette fois, c'est différent », prédit à Jeune Afrique un opposant historique. « Tchiroma a construit une machine qui ne ressemble à rien de ce qu'on a vu avant. Il a les hommes, les réseaux, la stratégie. Reste à savoir si cela suffira face à un régime qui a quarante-trois ans d'expérience dans la répression de l'opposition. »

Source: www.camerounweb.com