Prestation de serment de Paul Biya : Cabral Libii et Serge Espoir Matomba, les opposants "de service" au premier rang

Comme l'avait anticipé une partie de l'opinion camerounaise, Cabral Libii et Serge Espoir Matomba ont fait le déplacement au Palais des Verres pour assister à la neuvième prestation de serment de Paul Biya, ce jeudi 6 novembre. Fait révélateur : les deux hommes politiques sont arrivés avant même les membres du gouvernement, témoignant d'un empressement qui n'a pas manqué de susciter des réactions sur les réseaux sociaux.

Cette présence précoce tranche radicalement avec l'attitude d'autres figures de l'opposition qui, comme l'avait révélé Jeune Afrique, ont choisi le boycott. Samuel Hiram Iyodi, le benjamin du scrutin présidentiel, avait notamment confirmé au média panafricain qu'il ne participerait pas à la cérémonie.

Des "jeunes opposants" controversés

Cabral Libii et Serge Espoir Matomba sont régulièrement qualifiés par leurs détracteurs d'"opposants de service" ou d'"opposants contre les opposants". Cette expression, devenue virale sur les réseaux sociaux camerounais, vise à dénoncer ce que certains observateurs perçoivent comme une opposition molle, voire complaisante envers le régime en place.

Leur présence au Palais des Verres, alors qu'Issa Tchiroma Bakary appelle depuis le Nigeria à la contestation du scrutin et que des journées "ville morte" paralysent plusieurs grandes villes du pays, alimente ces critiques. Pour leurs détracteurs, cette participation à la cérémonie d'investiture légitime un processus électoral largement contesté.

Interrogés par différents médias ces derniers jours, certains opposants ayant confirmé leur présence, comme Jacques Bouhga Hagbe selon Jeune Afrique, justifient ce choix par le respect des institutions républicaines et la nécessité de maintenir les canaux de dialogue avec le pouvoir.

Reste que l'arrivée anticipée de Cabral Libii et Serge Espoir Matomba, photographiés et filmés avant même l'arrivée du gouvernement, offre une image qui conforte l'analyse de ceux qui voient en eux des figures d'une "opposition de façade", plus utiles au régime pour donner l'illusion du pluralisme que véritablement menaçantes pour le système Biya.

Cette présence contraste fortement avec la posture adoptée par Issa Tchiroma Bakary qui, selon les révélations de Jeune Afrique, se trouve actuellement "non loin de la frontière camerounaise, côté nigérian". Dans une vidéo récente, ce dernier affirme qu'il existe "deux présidents au Cameroun, le président élu que je suis et le président nommé par le Conseil constitutionnel".

Le clivage est désormais clair au sein de l'opposition camerounaise : d'un côté, ceux qui choisissent la rupture et la contestation frontale ; de l'autre, ceux qui optent pour le maintien dans le jeu institutionnel, quitte à légitimer par leur présence un scrutin dont la régularité est contestée.

L'empressement de Cabral Libii et Serge Espoir Matomba à rejoindre le Palais des Verres ce 6 novembre résonne comme un choix symbolique fort, qui alimentera sans doute longtemps les débats sur la nature et la crédibilité de l'opposition au Cameroun.