Refoulé à l'aéroport de Yaoundé-Nsimalen alors qu'il s'apprêtait à embarquer pour Dakar, le ministre se voit notifier une interdiction de quitter le pays. Cette mesure intervient quelques jours après une importante mobilisation financière pour le RDPC.
Coup de théâtre à l'aéroport international de Yaoundé-Nsimalen. Selon le lanceur d'alerte Boris Bertolt, Jean Ernest Massena Ngalle Bibehe, ministre des Transports et délégué départemental permanent du RDPC dans la Sanaga-Maritime, a été refoulé par la police alors qu'il tentait d'embarquer pour Dakar, au Sénégal.
Les forces de l'ordre lui auraient notifié une interdiction formelle de sortie du territoire camerounais, sans qu'aucune explication officielle n'ait été fournie à ce stade. Cette révélation soulève de nombreuses interrogations sur les raisons de cette mesure restrictive visant un membre du gouvernement en exercice.
L'interdiction de voyager intervient quelques jours seulement après une importante démonstration de force politique du ministre Ngalle Bibehe. Dans le cadre des élections régionales, ce dernier avait orchestré une vaste collecte de fonds dans son fief de la Sanaga-Maritime, réunissant militants, élites et sympathisants du parti au pouvoir.
Résultat de cette mobilisation : 55 millions de francs CFA collectés pour soutenir les candidats RDPC. Un montant présenté comme le témoignage de "la solidarité et de la détermination" de la famille politique au pouvoir, illustrant selon ses proches "la capacité du RDPC à fédérer lorsque l'enjeu est stratégique".
Quelques jours avant cet incident à l'aéroport, le ministre avait également reçu en audience plusieurs journalistes réputés proches du régime, dont Bruno Bidjang, Raoul Bia et Ernes Obama. Lors de cette rencontre qualifiée de "courtoise et républicaine", Ngalle Bibehe les avait félicités pour leur travail durant la période électorale.
Le ministre les avait encouragés à "maintenir leur posture patriotique", à poursuivre "la lutte contre la désinformation et la manipulation", et à continuer de défendre "en toute circonstance" le président Paul Biya, qu'il qualifiait de "véritable chance pour le Cameroun".
L'interdiction de sortie du territoire constitue généralement une mesure administrative ou judiciaire visant à empêcher une personne de quitter le pays dans le cadre d'une enquête ou d'une procédure en cours. Son application à l'encontre d'un ministre en fonction demeure toutefois exceptionnelle et soulève des questions sur les motivations réelles de cette décision.
Plusieurs hypothèses circulent dans les milieux politiques camerounais : enquête administrative, tensions internes au sein du RDPC dans le contexte post-électoral tendu, ou mesures liées aux récentes mobilisations financières. Aucune source officielle n'a pour l'heure confirmé ou infirmé ces spéculations.
Ni le ministère des Transports, ni la Présidence de la République, ni les services de sécurité n'ont communiqué officiellement sur cet incident. Le ministre Ngalle Bibehe lui-même n'a fait aucune déclaration publique depuis son refoulement à l'aéroport.
Cette situation intervient dans un climat politique particulièrement tendu au Cameroun, marqué par la contestation des résultats de la présidentielle d'octobre 2025 et l'exil de plusieurs opposants, dont Issa Tchiroma Bakary qui continue de revendiquer sa victoire depuis le Nigeria voisin.