Les révélations de Jeune Afrique éclairent d'un jour nouveau la stratégie électorale controversée de l'opposant
La campagne présidentielle d'Issa Tchiroma Bakary aura été marquée par une alliance aussi audacieuse que sulfureuse. Selon des informations exclusives publiées par Jeune Afrique ce 27 novembre, l'ancien ministre de la Communication a noué des liens étroits avec Chris Anu, figure majeure de la rébellion séparatiste anglophone, transformant radicalement la géographie politique camerounaise.
L'enquête de Jeune Afrique révèle que ce rapprochement avec les séparatistes n'était pas le plan initial de Tchiroma Bakary. Après avoir échoué à convaincre le Premier ministre Joseph Dion Ngute de se présenter à ses côtés fin 2024, l'opposant s'est retrouvé dans une impasse stratégique : comment incarner une alternative crédible sans ancrage dans les régions anglophones ?
C'est cette nécessité politique qui l'aurait poussé à franchir la ligne rouge en contactant Chris Anu, l'un des principaux leaders de la contestation armée dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. Une "vieille connaissance", précise Jeune Afrique, suggérant des liens antérieurs jamais officiellement reconnus.
Mais c'est une autre révélation de Jeune Afrique qui glace le sang : lors de certains déplacements de Tchiroma Bakary dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest pour mener campagne, son convoi aurait été escorté par des groupes armés séparatistes. Une protection rapprochée assurée par ceux-là mêmes qui combattent l'État camerounais depuis 2017.
Cette information, si elle se confirme, pose des questions juridiques et politiques explosives. Comment un candidat à la présidentielle peut-il bénéficier de la protection de groupes considérés comme terroristes par Yaoundé ? Cette alliance constitue-t-elle une forme de reconnaissance de facto des séparatistes ? Et surtout, quels engagements Tchiroma Bakary a-t-il pris en échange de ce soutien armé ?
Jeune Afrique rapporte que Tchiroma Bakary a fini par revendiquer publiquement sa proximité avec Chris Anu lors d'un meeting. Un aveu qui confirme l'existence d'un pacte politique entre l'opposant et les séparatistes, ces derniers lui témoignant désormais "une forme d'allégeance".
Cette stratégie, aussi risquée soit-elle, témoigne d'un calcul politique précis : conquérir les régions anglophones en s'appuyant sur les forces qui y exercent un contrôle de fait, plutôt que de négocier avec les élites traditionnelles ralliées au pouvoir.
Pour les analystes politiques, ces révélations de Jeune Afrique ouvrent une boîte de Pandore. Si un candidat à la présidentielle peut négocier ouvertement avec des groupes armés séparatistes et bénéficier de leur protection militaire, qu'est-ce qui empêchera d'autres acteurs politiques de faire de même à l'avenir ?
"Ce que dévoile Jeune Afrique dépasse largement la campagne de Tchiroma", analyse un observateur sous couvert d'anonymat. "C'est toute la question de la légitimité de l'État dans les zones anglophones qui est posée. Si les séparatistes peuvent choisir qui protéger et qui soutenir politiquement, cela signifie qu'ils sont devenus des acteurs incontournables du jeu politique national."
Plusieurs questions demeurent sans réponse : quand exactement les premiers contacts entre Tchiroma et Chris Anu ont-ils été établis ? Quels sont les termes précis de leur accord ? Tchiroma s'est-il engagé sur des mesures spécifiques concernant les revendications anglophones ? Et comment les autres forces politiques camerounaises réagissent-elles à cette alliance ?
Ce que révèle Jeune Afrique, c'est qu'au-delà des discours officiels sur l'unité nationale, la crise anglophone a profondément reconfiguré les alliances politiques camerounaises, créant des coalitions impensables il y a encore quelques années.
Une chose est certaine : l'alliance Tchiroma-séparatistes, dévoilée par Jeune Afrique, marque un tournant dans l'histoire politique du Cameroun post-indépendance.