Les hommes de Biya l'ont torturé à sang et à mort: le témoignage de ce prisonnier politique qui fait verser les larmes

Crime, Torturé Image illustrative

Fri, 19 Dec 2025 Source: www.camerounweb.com

Un récit glaçant a été déposé devant le juge d’instruction du tribunal militaire de Douala. M. TCHUIDO Prisco, père de famille et simple soudeur, a décrit avec précision les tortures subies après son arrestation en octobre 2025, pour avoir été inscrit sans son consentement dans un groupe WhatsApp. Une déposition qui met en lumière des pratiques brutales au sein d’une unité de gendarmerie et pose une question troublante : jusqu’où peut aller la répression au nom de la sécurité ? Son avocat, Me Fabien Kengne, dénonce une « situation inhumaine » et des « crimes contre l’humanité ».



Témoignage émouvant d'un prisonnier politique ayant subi des tortures inhumaines dans une gendarmerie

《Je ne me sens vraiment pas bien. Le sommeil d'hier ne fût pas du tout reposant.

Après le Tribunal de Grande Instance du Wouri, je suis allé aussitôt assister les détenus politiques qui m'y attendaient.

Suivont l'audition de Monsieur TCHUIDO Prisco,

devant le juge d’instruction au Tribunal Militaire de Douala, le 17 décembre 2025.

"Le 21 octobre 2025, j’ai été arrêté à mon domicile, situé à Bonaberi, au lieu-dit Bonjogo, entre 10h et 11h du matin, en présence de mon épouse et de mes enfants. J’ai été conduit directement au groupement de compagnies de gendarmerie de Douala, puis présenté devant le colonel. Il s'agit du Colonel Commandant de ce groupement.

Ce dernier m’a informé que j’étais membre d’un groupe WhatsApp du FSNC, accusé de vouloir revendiquer la victoire de TCHIROMA. Je lui ai expliqué que, certes, je me retrouvais dans ce groupe, mais que je n’y avais pas adhéré volontairement. J’ai simplement constaté qu’on m’y avait ajouté. Lorsqu’il m’a demandé qui m’avait intégré, j’ai répondu que je ne le savais pas. Comme il détenait mon téléphone, il m’a cité les noms des administrateurs, mais je ne reconnaissais personne. Il m’a également donné le nom de la personne qui m’aurait ajouté, mais je ne la connais pas. Je précise que dans ce groupe, les échanges se font principalement en langue foulfouldé, que je ne maîtrise pas.

Je suis inscrit dans plusieurs groupes WhatsApp sans en connaître les membres, par exemple des groupes sur l’élevage de poulets. Pourtant, je suis soudeur et technicien en bâtiment. Comme je ne maîtrise pas bien les téléphones Android, je ne sais pas comment quitter ces groupes.

Le colonel m’a ensuite demandé d’où je suis originaire. J’ai répondu que je suis de Bangou. Il m’a alors interrogé sur mes revendications, en ajoutant : « La mère de la Première Dame était maire chez vous, toutes vos routes sont goudronnées. Connaissez-vous la route qui mène chez moi ? » Je lui ai répondu : « Mon colonel, je ne revendique rien. » Il m’a alors menacé en disant : « Tu iras derrière, on va te tirer une balle. Tu n’es pas sûr de sortir vivant de là où tu pars. Et même si le Cameroun change, tu ne pourras jamais t’asseoir à ma place. »

Ensuite, il a demandé qu'on m'amène dans la case isolé et a ordonné qu’on me torture. On m’a jeté au sol, puis une chaise à quatre pieds a été posée sur moi. Un gendarme s’est assis dessus pour m’immobiliser. Un autre s’est assis sur mon ventre, mes mains et mes pieds étant attachés. Un troisième s’est placé au niveau de mes pieds, dos tourné, une machette levée. Pendant ce temps, les autres versaient de l’eau sur moi et celui avec la machette me frappait la plante de mes pieds. ils m'ont donné des coups de machettes à n'en pointfinir. Après cette torture, on m’a forcé à me lever et à sauter.

Ils ont ensuite rédigé un message sur un papier et m’ont obligé à le lire à plusieurs reprises. Puis ils ont ouvert le groupe WhatsApp en question et m’ont contraint à envoyer ce message vocal :

« Les gars, ne sortez pas. Si quelqu’un sort, on l’arrête et c’est sa famille qui doit souffrir. » sous la douleur et sous les coups de machette, c'est avec beaucoup de difficultés et beaucoup de reprises que j'ai pu finalement réciter et retenir le message.

Après l’envoi du message, ils ont retiré mon numéro du groupe.

Je suis un homme marié et père de trois enfants :

- Le premier a 11 ans et est en classe de CM2.

- La deuxième a 5 ans et est en SIL.

- Le dernier a 6 mois.

J’ai passé plus d’un mois à la Prison de New-Bell et cela fait deux semaines que je suis à la Prison de Ngoma. Je ne comprends pas pourquoi je suis en prison, car je n’ai jamais participé à une marche pacifique dans mon pays. Je suis du MRC, mais je ne cherche pas les problèmes.

À cause de ma situation, mes enfants ont été renvoyés de l’école, car je n’ai pas pu terminer le paiement de leurs frais de scolarité. Je me débrouille chaque jour pour subvenir aux besoins de ma famille. J’ai demandé à mon épouse d’écrire une lettre de doléance à la directrice de l’école afin qu’elle permette aux enfants de continuer leur scolarité, en attendant que je puisse régler le reste des frais des ma sortie. La directrice a reçu la lettre mais a répondu qu’elle ne pouvait pas accéder à cette demande, parce qu'elle à la gestion de gestion de son personnel".

À la fin de ce récit, Mme la juge d'instruction est sortie, peut-être pour se détendre. J'avais tenu à ce que ce camerounais vide son sac.

J'ai regardé "mon client", il a baissé la tête, entre ses deux mains. Je n'en revenais. Moi-même je me suis abstenu de pleurer. Il fallait ne pas le faire craquer. Il a relevé sa tête et m'a dit: Maître je ne sais pas ce que j'ai fait. On m'a torturé plus qu'un grand bandit. On m'a torturé plus que Longue Longue, et après on m'a envoyé en prison. Ma femme et mes enfants sont abandonnés. Je travaillait chaque jour pour qu'ils mangent. Et mes enfants ne sont plus à l'école.

Maître aidez-moi à sortir d'ici"

Je lui ai tout simplement dit: "gardez surtout courage. Je ferai tout ce que je peux pour vous libérer".

Voilà ce qu'est devenu le Cameroun. Comment des êtres humains peuvent faire ça à leurs compatriotes? Le Cameroun s'identifie aujourd'hui au Cambodge de Polpot. On ne peut pas continuer ainsi avec de telles atrocités sous fond de confiscation et de conservation d'un pouvoir supposément tribal, qui ne sert qu'une petite MAFIA!

À toutes fins utiles, il s'agit des crimes contre l'humanité, crimes imprescriptibles.

JSK À VIE!.》

Par Me Fabien Kengne

Source: www.camerounweb.com