Élection présidentielle : comprendre pourquoi les procès-verbaux sont si importants

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Wed, 15 Oct 2025 Source: www.camerounweb.com

Les procès-verbaux et le contentieux électoral, le Pr Édouard Bokagné les explique mieux. Afin que nul n'en ignore, l'avenir du pays en dépend très fortement. Voyage dans cette séance d'enseignement très riche.

Au lieu de hanter les pages consacrées aux élections pour chercher des gens à insulter, de grâce, instruisez-vous ! Je vous suggère un sujet de réflexion : le PV et son utilité dans le contentieux électoral. D'abord, c'est quoi, le PV ?

Les PV (abréviations de « Procès-verbal ») sont des documents qui servent de compte-rendu du déroulement de l'ensemble d'opérations au sein d'une élection. Ce sont donc des pièces juridiques essentielles pour tout mécanisme de contestation. On le réalise sur un formulaire produit par l'organisme chargé des élections qu'on remplit manuellement. Par définition, un PV dactylographié est un faux. C'est toujours un imprimé qu'on remplit à la main.

Il y a plusieurs types de PV selon les niveaux juridictionnels qui gouvernent l'élection. Le tout premier niveau, (le cadre basique), est le bureau de vote. C'est le démembrement de base d'une population : entre 75 et 300 personnes qu'on regroupe dans un lieu public facile d'accès, qui fait consensus. Ces gens figurent sur une liste affichée à l'entrée du bureau.

Ils viendront voter toute la journée du vote. On appelle ce processus : les opérations. L'électeur arrive au bureau, consulte la liste ; trouve son nom, (auquel est adossé un numéro qui facilite son repérage sur le registre électoral) ; se voit identifié. On lui permet alors de prendre les bulletins des candidats qui doivent être bien en vue et en nombre suffisant. On lui remet une enveloppe identique à toutes les autres, sans marque distinctive.

Il va à un isoloir et, dans le secret, sélectionne celui pour qui il veut voter. Il scelle l'enveloppe et la glisse dans la fente d'une urne. Il signe le registre contre son nom ; y appose son empreinte digitale et se fait mettre une marque indélébile qui lui interdira d'aller voter ailleurs. (La mienne n'a pas encore disparu).

Dans le bureau, il y a plusieurs opérateurs. Les officiels désignés par l'organisme chargé des élections et les scrutateurs commissionnés par les partis ayant investi ou qui soutiennent les candidats. Quand tout le monde a voté (ou bien à l'heure marquée) le vote s'arrête. On commence le dépouillement et le décompte. Ça se fait en public sur un tableau. Quand et si on tombe d'accord, on reporte l'information sur un document. C'est ça le PV.

Tous les acteurs signent le document qui est assez exhaustif. Il dit à peu près tout : qui a fait quoi. Qu'est-ce qui s'est passé. Chacun des acteurs du processus électoral présent reçoit sa copie signée de tous. Quand tout est terminé, les agents de l'organe d'élection le prennent et l'emportent vers la seconde juridiction qui est communale. Ce stade prend en compte tous les bureaux d'arrondissement.

Là encore, les acteurs - et les curieux - sont présents. Ça se fait en public. On ne chasse personne. Les acteurs communaux vérifient la documentation : bien, mal remplie ? Constatent les mentions qu'ils reportent sur un autre PV. Il n'est plus nécessaire, à ce stade, de reprendre ce qui a déjà été fait. On abrège. Juste des chiffres et des mentions. Ce sera la même chose qui sera faite au niveau départemental sous la supervision d'un magistrat.

Supposons qu'à un stade intermédiaire : soit à la commune ou au département, l'équipe de surveillance des votes d'un candidat décèle une irrégularité. Elle doit le mentionner. Ce ne sont pas des lanceurs d'alerte - souvent qui résident en Europe - qui, par vidéo, doivent vous informer d'irrégularités. À la commune où au département, on ne traite plus d'urnes. C'est du ressort du bureau de vote qui porte sur entre 75 et 300 voix.

J'ai lu un Fake de Boris Bertolt faisant état d'un démissionnaire du Rdpc, outré par la fraude à Njinikom (au Nord-ouest). Selon BB, il n'y avait que 125 votants ; nombre qui a été augmenté à plus de 2700 votants. Voici pourquoi cette affabulation est impossible. 2700 votants n'est plus un, mais plusieurs bureaux de vote différents. (Au moins 9 ; au plus 36). Personne ne peut parcourir 9 ou 36 bureaux de vote et surtout au Nord-ouest où le mouvement est ce qu'il est. Ce nombre reflète le résultat d'un arrondissement qui est logique pour Njinikom.

D'ailleurs, BB ne peut fournir aucun PV. Ni celui d'un bureau de vote dans la commune de Njinikom ; ni celui général de la commune elle- même. 125 et 2700 ne correspondent à rien à partir de là puisque personne ne saura de quel bureau de vote ce nombre est parti. On n'a pas le nombre de bureau de vote ayant ouvert dans cette sous-circonscription. Pour dire ce que BB dit, il faut les PV. Il n'en a aucun.

Au niveau départemental - on y est déjà et ça court jusqu'au 17 octobre - on consolide tous les résultats. Les PV sont remis à tous les candidats. Ils ont donc déjà à ce stade, les PV des bureaux de vote où ils sont censés avoir eu des scrutateurs. Rien d'ailleurs ne les empêcherait d'échanger des informations avec les autres états-majors d'autres candidats. S'il y a irrégularité, ils le sauraient. Ils sauraient encore plus facilement les résultats des communes (qui ne sont que 360, contre 31 000 bureaux de vote) et beaucoup mieux pour les départements qui sont 58 et qu'on leur remet en main propre.

Donc, s'ils contestent quoi que ce soit, ça doit être reporté en amont : soit sur un PV de bureau de vote, soit sur le PV communal, soit sur le départemental. Tous les candidats, Elecam et l'AT ont les mêmes. En cas de litige, n'importe quelle cour leur demanderait à tous de les produire. Ça nous amène à ce cas de figure : quel PV ferait foi (ou autorité, si vous voulez) ?

Une pareille confrontation n'a jamais eu lieu. Il ne s'est jamais présenté de cas où les PV du Mrc, du Pcrn, du Sdf, etc. disaient une chose et ceux d'Élecam, une autre. En théorie, il n'y a objectivement aucune raison qu'un candidat conteste le PV d'Elecam. Sauf mauvaise foi. Pourquoi ? Elecam a toujours ses PV. Ils correspondent toujours à ceux en possession de tous les candidats. Si un les conteste, il doit au moins avoir celui d'un autre candidat qui dise la même chose que lui. Et, puisqu'il conteste celui d'Elecam, il devra au moins produire son propre PV !

Il y a eu un contentieux post-électoral en 2018 avec un candidat qui prétendait avoir gagné.

Qui se souvient avoir vu ses PV ? Où les a-t-il présentés ? PV de bureaux de vote ? Ses PV communaux ? Départementaux ? Quel autre candidat a-t-il attesté que ses PV - qui n'ont été montrés à personne - étaient les mêmes que les siens ? Or Elecam a présenté les siens qui ont été lus. Le texte de loi dit qu'ils font foi. Mais ils ont d'autant plus fait foi qu'en face, il n'y avait rien.

D'ailleurs, c'est plutôt ce candidat qui exigeait d'Elecam 36 PV. Vous rappelez-vous le tee-shirt d'Alain Fogue : « où sont les 36 PV » ? Les PV en question n'ont pas été produits. Pourquoi ? Parce que c'est à Elecam qu'il les demandait. Mais c'était au conseil constitutionnel à qui il s'adressait. Pourquoi le CC qui siégeait sur la foi de ces PV ; qui savait fort bien que le candidat en question, (comme d'ailleurs tous les autres candidats), possédait ces PV ; qui voyait bien que la question ne s'adressait pas à lui ; pourquoi se serait-il attardé à trouver recevable, une question qui était en fait une provocation ?

Les PV seront les pièces essentielles de toute la procédure de validation. Ce n'est pas le moment de beaucoup bavarder. Il faut avoir les PV !

Source: www.camerounweb.com