‘Ce sont les héritiers Ekang de Biya qui bagarrent entre eux’ : Dieudonné Essomba livre d'importants détails sur la guerre à Etoudi

L’économiste Dieudonné Essomba a émis des déclarations au sujet du Chef d’Etat Paul Biya

Wed, 15 Mar 2023 Source: www.camerounweb.com

Le 5 mars 2023, dans l’émission « Club d’Elites », l’économiste Dieudonné Essomba a émis des déclarations au sujet du Chef d’Etat Paul Biya. Selon le consultant de la Chaine Vision 4, ce n’est pas la république qui a maintenu Paul Biya au pouvoir mais plutôt ses fervents partisans ainsi que ses proches. Ce jour-là, il avait également cité le nom de Jean-Pierre Amougou Belinga, l’homme d’affaires qui se trouve actuellement à la prison principale de Kondengui.

Quelques jours après cette diffusion médiatique, Dieudonné Essomba livre des nouvelles informations portant sur ces précédentes déclarations dans une tribune publiée.

POURQUOI CERTAINS S’OFFUSQUENT DE LA VERITE POLITIQUE DU CAMEROUN ?

Au cours d’une émission, j’avais bien dit que si Biya est à Etoudi, ce n’est pas parce que le Cameroun est une République. C’est simplement parce que ses partisans sont militairement et politiquement plus forts que ses adversaires.

Ce n’est donc pas le désir de le chasser d’Etoudi qui manque, bien au contraire ! S’il ne tenait qu’à eux et la République, il y a bien longtemps que Biya aurait perdu le pouvoir, sa liberté et même sa vie !

Le pouvoir au Cameroun n’a rien à voir avec la République ! Celle-ci n’est évoquée que, soit pour légitimer un rapport de force favorable à Biya du côté de ses partisans, soit pour se consoler d’un rapport de force défavorable du côté de ses détracteurs.

Quand en 1984, la Garde Présidentielle engage un coup d’Etat pour le chasser du pouvoir par la force, ce n’est pas la République qui le défend. C’est la partie de l’Armée qui lui est restée fidèle qui combat pour lui, sans d’ailleurs savoir a priori qui va gagner, car le résultat n’était pas évident dès le départ. Si la Garde Présidentielle avait gagné, Biya aurait été déposé et peut-être tué et les vainqueurs auraient qualifié cet acte de républicain, exactement comme la résistance victorieuse a été qualifiée de républicaine.

De même, lorsque pendant les années de braise des années 1990, une partie du Cameroun réclame la Conférence Nationale Souveraine, ce n’est pas la République qui sauve Biya. A ce moment, N’Gaoundéré, Garoua, Maroua, Foumban, Bamenda, Bafoussam, Nkongsamba, Buea, Douala, tout flambe ! Le feu est partout, l’activité gelée.

Ce qui sauve le pouvoir de Biya, contrairement aux Sassou Nguesso, Mobutu, Kerekou et autres Moussa Traore, ce n’est pas la République, mais simplement parce que Yaoundé et les villes Ekang ne suivant pas le mouvement. Si le mouvement insurrectionnel avait atteint Yaoundé, la capitale où tout se joue, et siège de toutes les institutions et des ambassades, Biya aurait cédé. Il ne pouvait pas aller plastronner à Douala en disant : « Me voici donc à Douala’ » et il ne serait jamais moqué des opposants en leur disant ; « Quand Yaoundé respire, le Cameroun vit ».

On peut citer un très grand nombre d’occasions dans lesquelles les gens ont voulu chasser Biya, mais il leur a résisté, parce qu’il est plus fort qu’eux, militairement et politiquement. Il n’y a aucune République là-dedans, celle-ci ne servant qu’à légitimer une situation de fait des rapports de force.

Au fil du temps, cette nature du pouvoir en tant que rapport de force s’intensifie et prend un caractère de plus en plus violent, sans la moindre possibilité d’y mettre fin.

Du moins, tant qu’on reste dans un Cameroun unitaire. Celui-ci oppose en effet les Communautés dans le partage des 6.500 Milliards du budget répartis en 4 avantages publics qui sont :

-les emplois publics

-les positions de pouvoir

-les infrastructures collectives

-les rentes publiques comme les subventions ou els marchés publics.

L’Etat unitaire ne disposant pas des mécanismes pour réguler le partage de ces avantages, il s’en suite une folle compétition des Communautés pour leur contrôle monopolistique. D’où un système politique tendu qui alimente intrinsèquement le tribalisme et la violence.

Chaque fois que j’évoque cet aspect de la gouvernance publique, on m’accuse de tribalisme. Mais le tribalisme ne vient pas du fait que j’en parle ! Il vient tout simplement des compétitions réelles que les Communautés se mènent sur le terrain, à partir des avantages de l’Etat !

Ce sont les accusations adressées aux Ekang de confisquer les postes publics et les positions au pouvoir, ou les accusations proférées contre les Bamileke de bénéficier préférentiellement des rentes publiques qui créent le tribalisme !

Ce n’est pas moi qui le crée et je n’en parle pour résoudre le problème ! Certains naïfs s’imaginent que ne pas en parler modifiera le problème de fond posé par la répartition équitable des ressources publiques dans un Etat unitaire ! Pas du tout ! C’est plutôt le contraire ! En fermant la bouche au motif qu’on respecte la citoyenneté, au lieu d’en parler à temps, on va aggraver la situation et aboutir à des impasses meurtrières !

Aujourd’hui, la lutte pour le contrôle du pouvoir unitaire a pris une tournure critique. Ce sont les héritiers Ekang de Biya qui bagarrent entre eux, mais ne croyez pas qu’ils luttent pour un autre groupe ou pour la République! S’ils s’entretuent entre eux, c’est bien pour maintenir la cagnotte unitaire sous leur contrôle exclusif, et non pour ouvrir la voie à un allogène !

Il ne faut pas se leurrer. Le pouvoir au Cameroun, c’est d’abord et avant tout un rapport de force. Et personne n’entrera à Etoudi s’il n’a pas les moyens militaires et politiques pour vaincre les autres camps.

C’est une terrible impasse que j’ai évoquée depuis longtemps. ET je le répète : le seul moyen de sortir le Cameroun de la mélasse, c’est de le fédéraliser et d’asseoir une vie politique apaisée comme au Nigeria. Dans ce pays frère, chaque Etat dispose d’une souveraineté partielle et assume la demande sociale de sa population tout en gérant ses ressources et sa dotation fédérale.

L’Etat fédéral se retrouve libéré de ces compétitions dangereuses qui menacent la stabilité de l’ensemble.

En dehors d’une fédéralisation immédiate, notre pays court devant une implosion généralisée sur le plan politique, économique et sociale.

Source: www.camerounweb.com