Lui c’est « l’éternel intérimaire ». Son second et apparemment ultime intérim vient de se terminer à la tête des Lions indomptables du Cameroun. Alexandre Belinga a comme à l’accoutumée bien rempli son contrat. Il a conduit son équipe, opposée au Koweit en match amical, à la victoire le 25 mars 2018. Il avait aussi qualifié les Lions pour le dernier tour des éliminatoires de la Coupe du Monde 2018. Le technicien chevronné, adjoint d’entraîneurs étranger depuis 2015, ne se montre plus attiré par la sélection A. Sans doute gêné que l’on ne lui fasse pas confiance sur le long terme. Il a renoncé à postuler pour le recrutement d’un nouveau sélectionneur. Portrait de ce quinquagénaire au caractère bien trempé.
Mission terminée pour Alexandre Belinga. Comme pour son premier intérim à la tête des Lions indomptables du Cameroun, le sélectionneur repart sur une note positive. Ses poulains engagés dans un match amical contre le Koweit le 25 mars 2018 à Koweit City l’ont emporté 3-1. De quoi faire regretter le départ de l’ancien adjoint qui de toute façon n’avait qu’un match à diriger. Et qui n’avait même plus envie de rester sur le banc de la sélection A. Belinga a annoncé au début du mois qu’il ne postulerait pas pour un place de sélectionneur des « vert-rouge-jaune ».
« Je ne vais pas le faire parce que je viens de passer trois années très difficiles dans cette sélection. Les gens ne peuvent pas l’imaginer simplement parce que lorsque vous n’avez jamais vécu quelque chose, c’est difficile de comprendre ce qui se passe à l’intérieur. Moi qui suis quelqu’un issu d’un quartier populaire, les trois années que j’ai passées en équipe nationale, ont un peu changé ma vie. Il y a également le stress pendant les périodes de compétition », a-t-il expliqué lors de la conférence de presse qu’il a animée le 12 mars 2018 à Yaoundé.
Alexandre Belinga n’en était pas à sa première expérience en tant que numéro un chez les Lions indomptables du Cameroun. L’adjoint avait déjà dû prendre les rênes de l’équipe nationale de football fanion après le limogeage de l’Allemand Volker Finke le 31 octobre 2015. En novembre, il qualifie le Cameroun pour le dernier tour des éliminatoires de la Coupe du Monde 2018. Ses joueurs l’emportent à Niamey (3-0) avant de réaliser un nul vierge dans la capitale du Cameroun Yaoundé. C’est sous le mandat de Finke qu’Alexandre Belinga est devenu entraîneur adjoint des A pour la première fois. Celui qui fut désigné à ce poste en compagnie de l’autre technicien camerounais Bonaventure Djonkep avait pourtant eu quelques temps auparavant une altercation avec Volker Finke.
Forte personnalité
Courant juillet 2015 le site Internet camerounais www.mboafootball.com raconte une scène qui avait failli mal tourner au Centre technique de la Fédération camerounaise de football en marge d’une séance d’entraînement de l’équipe nationale junior : «Volker Finke informé de l’heure d’entrainement est arrivé à Odza aux environs de 9 h. Très souriant il a entrepris de serrer la main aux encadreurs de cette équipe nationale. Mal lui en a pris car lorsqu’il a voulu saluer Alexandre Belinga, le coach adjoint de cette sélection nationale junior, il s’est pris un vent monumental accompagné d’une remontée de bretelles qu’il n’est pas prêt d’oublier. « Monsieur Finke je ne vous salue pas. Vous ne respectez pas les entraîneurs camerounais. Vous avez oublié ce que vous nous avez fait au Brésil ? Vraiment, je ne veux même pas vous voir devant moi. Allez continuer à nous mépriser », a balancé Alexandre Belinga dans une colère indescriptible qui a d’ailleurs surpris les autres techniciens. Alexandre Belinga ne s’est pas arrêté à l’invective, il a même menacé de porter main sur le vieux coach allemand. Volker Finke a pris peur et s’est mis à paniquer. Rigobert Song Bahanag a dû s’interposer énergiquement pour maitriser Alexandre Belinga totalement déchainé et prêt à rectifier le portrait de Volker Finke. Il a fallu plus de 45 minutes pour que l’ancien coach des Astres de Douala retrouve son calme, malgré les excuses que Volker Finke, tétanisé, a présentées à plusieurs reprises ».
En fait le mépris de Finke pour les entraîneurs camerounais lors de la Coupe du Monde de 2014 était resté en travers de la gorge d’Alexandre Belinga. Lui, Jean Manga Onguéné, Etienne Sockeng et Bonaventure Donkep avaient été nommés avant le mondial brésilien par le président du comité de normalisation d’alors pour superviser les adversaires du Cameroun et dresser un rapport circonstanciel à l’Allemand. L’on lui reprochera de n’avoir pas voulu lire ces rapports, d’avoir fait montre de mépris et de zèle envers leurs auteurs. L’on l’accusera, d’avoir dit qu’il n’avait pas besoin des superviseurs camerounais, parce qu’ayant ses propres superviseurs allemands, d’avoir prétendu que les coaches camerounais ne savent pas utiliser l’outil informatique et que dans ces conditions, il n’avait rien à attendre d’eux. Même indifférence apprendra-t-on, sur place au Brésil où le sélectionneur du Cameroun va refuser de voir et toucher le rapport dressé par les quatre techniciens camerounais.
Une grosse expérience
L’ancien entraîneur adjoint des espoirs camerounais est réputé pour ses coups de colère. Un état d’esprit qui l’a amené à souvent claquer la porte. Ce qu’avait constaté son dernier employeur (Dieudonné Kamdem, PCA d’Astres de Douala) qui après l’avoir engagé lui donnera ce conseil : « Monsieur Alexandre Belinga, vous devez vous stabiliser ». Rien à faire ! Là-bas aussi la collaboration s’achève dans la tension et en queue de poisson. Avant Astres de Douala, Belinga Belinga avait renoncé à entraîner Unisport du Hau-Nkam parce qu’il n’appréciait pas qu’un directeur technique lui soit imposé et un peu plus tôt de Fovu de Baham parce que des supporters avaient injurié sa mère. Mais tout n’a pas qu’été sombre dans la carrière de cet homme né le 25 aout 1962.
Elle commence de la plus belle des manières en 1981. Belinga dispute la Coupe du monde junior de cette année-là en Australie. Il a déjà pour coéquipier Bonaventure Djonkep. C’est encore ensemble que les deux inséparables vont prendre la direction de l’Institut national de la jeunesse et des sports (Injs) d’où ils sortiront chacun avec un diplôme d’entraîneur de football. Le petit homme (il mesure 1 mètre 65) entame sa carrière en ligue départementale (l’équivalent de la 4ème division au Cameroun). L’ancien pensionnaire du Centre technique de Clairefontaine manage avec succès Impôts de Yaoundé qu’il hisse en première division et conduit à la finale de la Coupe du Cameroun en 2005. On le verra aussi aux commandes du staff technique de Sable de Batié. S’il a renoncé à la sélection, ce n’est pas le cas pour le football des clubs, ses premières amours. « Je suis un entraîneur de football, et si je décide d’arrêter, je crois que je vais retrouver les équipes locales, ou alors au niveau de l’Afrique et ces équipes me permettront aussi d’avoir un peu de temps pour m’occuper de mes plantations », annonçait-il le 12 mars 2018.