Dans un communiqué rendu public jeudi dernier, le Secrétaire général de la Fédération camerounaise prend le contre-pied du ministre des Sports.
Vers un retour d’André Onana dans la tanière des Lions indomptables ? C’est du moins le vœu du ministre des Sports et de l’Education physique (MINSEP). Dans une correspondance signée le 19 avril dernier, Narcisse Mouelle Kombi demande au président de l’Inter Milan, club employeur de l’international footballeur camerounais, de le mettre à la disposition de la sélection nationale. « Nous vous prions de bien vouloir permettre à ce talentueux gardien, qui a été jusqu’ici l’un des maillons forts de cette équipe d’assouvir son désir de continuer à représenter son pays d’origine et à faire rêver des millions de compatriotes, en le mettant à la disposition des Lions indomptables dès que besoin sera », a écrit le MINSEP. Une sortie qui, non seulement a créé un tollé quasi général et suscité de moult interrogations, mais aussi a provoqué la réaction de la Fédération camerounaise de football (FECAFOOT).
En effet, le caractère curieux de la lettre du patron des Sports camerounais permet de questionner de prime abord pourquoi c’est lui qui écrit au responsable du club italien alors que les usages en la matière confèrent cette prérogative à la Fédération-mère. Une interrogation qui trouve une réponse auprès des spécialistes du droit du sport. «Sur le plan juridique, la sortie du ministre est problématique. Il aurait dû convoquer les parties et procéder à une conciliation. Aucun texte ne lui donne le pouvoir d’écrire au club, puisqu’il n’existe pas de relation directe entre le ministère et le club. Les clubs traitement avec les Fédérations», explique Bernard Bassong, expert en droit du sport.
Toujours à la lecture de la correspondance du ministre des Sports, l’on se demande s’il y avait un véto du club d’André Onana qui puisse justifier cette sortie ? Là aussi, les spécialistes et autres acteurs du sport sont presqu’unanimes qu’il est impossible de l’affirmer. Non sans préciser que la sortie du ministre cache un malaise persistant depuis des mois déjà entre MINSEP et l’exécutif actuel de la Fédération camerounaise de football.
« C’est une guerre de leadership entre le MINSEP et la FECAFOOT où le ministre veut sauter sur l’occasion pour être au-dessus du président de la FECAFOOT. Le ministère aurait dû interpeller la FECAFOOT pour avoir un rapport bilan de la Coupe du monde dans lequel on retrouverait la situation d’André Onana. Ça confirme la dissonance entre la Fédération et le ministère», soutient Casimir Mangue, entraîneur de football.
« Le ministre est agacé par le management de la FECAFOOT », pense plutôt un analyste sportif qui a requis l’anonymat. La 3e et dernière question que l’on peut se poser en parcourant cette correspondance de Narcisse Mouelle Kombi est si la FECAFOOT a été mise au courant de la démarche de sa tutelle ? Visiblement non ! Puisqu’au bas de la lettre, il est clairement mentionné que seuls le Ministre d’Etat Secrétaire général (Sg) de la présidence de la République et le Sg des services du Premier ministre sont en copie du document.
Pourtant, « généralement lorsqu’une institution est en ampliation d’un document, cela dénote deux choses : soit la structure en question est déjà au courant de l’information qui y est véhiculée, soit l’expéditeur est en train de l’informer », explique un autre expert. Alors que la pression commençait à retomber après la sortie du ministre, le Secrétaire général de la FECAFOOT a pris le MINSEP à contre-pied, en rendant public un communiqué de presse au nom de l’institution. Dans cette note, Blaise Djounang renseigne que « le joueur André Onana a été suspendu temporairement groupe pour des raisons disciplinaires » sur décision du manager sélectionneur Rigobert Song et que « la FECAFOOT réitère son engagement à instaurer une atmosphère apaisée et, aussi, à mettre à la disposition du groupe un environnement favorable à la performance ».
Une contrattaque qui laisse croire que les prochains jours entre la FECAFOOT et sa tutelle seront encore plus agités. Car, « les gens refusent de faire les choses comme cela se doit », estime Casimir Mangue. Il faut rappeler sur le cas André Onana que tout commence en pleine Coupe du monde 2022 au Qatar. Après la défaite inaugurale du Cameroun face à la Suisse, des tensions naissent dans la tanière des Lions indomptables précisément entre le manager sélectionneur Rigobert Song et le gardien camerounais. Lesquelles tensions vont aboutir quelques temps après à la mise à l’écart du sociétaire de l’Inter Milan du groupe.
André Onana fait ses valises et retourne en club où il ira, par l’entremise d’un communiqué annoncé son retrait de l’équipe nationale de football du Cameroun. La FECAFOOT va prendre acte, non sans avoir préalablement saisi le club italien pour l’informer de la situation. Dans leur réponse à la FECAFOOT, les dirigeants de l’Inter Milan vont préciser qu’ils ouvriront une enquête pour comprendre ce qu’il s’était passé au Qatar. Une enquête dont les résultats restent jusqu’à ce jour méconnus du grand public.