L'arbitrage féminin est un "message positif" pour les femmes au Qatar à la Coupe du monde

Le fait d'avoir des femmes arbitres à la Coupe du monde permet d'envoyer un message positif sur les droits des femmes au Qatar, déclare Stéphanie Frappart, la première femme à arbitrer un match de Coupe du monde masculine en supervisant la victoire 4-2 de l'Allemagne sur le Costa Rica, jeudi.

La Française de 38 ans est devenue la première femme à arbitrer la Coupe du monde masculine, lors du match de phase de groupes de jeudi entre le Costa Rica et l'Allemagne.

Frappart a été rejoint par les arbitres assistantes brésiliennes Noiza Pak et la Mexicaine Karen Diaz Medina au stade Al Bayt, pour former la première équipe d'arbitres féminines de l'histoire du tournoi.

Les arbitres rwandaise Salima Mukansanga et japonaise Yoshimi Yamashita ont également été sélectionnées.

"Nous savons qu'il y a des difficultés auxquelles les femmes sont confrontées", a déclaré Frappart.

L'État du Golfe a été largement critiqué pour son interdiction des relations homosexuelles et son traitement des travailleurs migrants.

Le groupe de défense des droits humains Amnesty International a déclaré que les femmes et les personnes LGBT "continuent d'être victimes de discrimination dans la loi et dans la pratique".

Préparées à gérer la pression

La capitaine de l'équipe féminine d’Angleterre Leah Williamson a affirmé qu'elle n'était pas "intéressée" à regarder le tournoi, tandis que sa coéquipière Beth Mead a signalé qu'il était "décevant" que la Coupe du monde se déroule au Qatar.

Le Qatar exige le respect de ses valeurs et traditions en tant que pays musulman, et affirme avoir introduit des réformes remarquables dans le domaine des droits des travailleurs.

Malgré cela, Frappart a indiqué qu'elle ne pouvait pas refuser l'opportunité d'arbitrer un match de la Coupe du monde masculine.

"Quand tu es sélectionnée pour la Coupe du monde, comment peut-on dire qu'on n'y va pas ?"

"La Coupe du monde masculine est la compétition la plus importante au monde, pas seulement en football."

"Il y a toujours de la pression dans les matchs. Et quand une femme est là, il y a plus de pression parce que c'est quelque chose de nouveau", a-t-elle affirmé pour marquer son aspiration pour le tournoi.

"Nous connaissons la pression. Mais je pense que nous ne changerons pas, soyons calmes, concentrés. Ne pensez pas aux médias et à tout et concentrez-vous sur le terrain", conseille la française à ses collègues.

Au total, il y a 36 arbitres sélectionnés pour la Coupe du monde 2022.

Mais Frappart sait par expérience qu'elle et ses autres collègues sont bien équipées pour gérer la pression.

"J'ai joué beaucoup de matchs de grande valeur, donc avec toute cette expérience, nous serons prêts pour les matchs", dit-elle.

Frappart a été la première femme à arbitrer un match de Ligue 1 en 2019 puis, en 2020, un match de Ligue des champions masculine.

Elle a également été la première femme à arbitrer la finale de la Coupe de France cet été et a innové en arbitrant le Championnat d'Europe masculin 2020.

Aujourd'hui d'ailleurs, il y a une grande campagne pour voir une femme arbitre officier en Premier League.

A quand une femme arbitre en Premier League ?

La Premier League attend toujours de franchir une étape similaire. Quand une femme pourra-t-elle prendre en charge un match de première division masculine en Angleterre ?

La réponse est bientôt, selon Bibiana Steinhaus-Webb, qui a franchi le pas en Bundesliga et qui est désormais en charge de l'élite des arbitres féminins en Angleterre.

"Je suis absolument certaine que nous verrons une femme arbitre dans la Premier League à un moment donné, dans un avenir proche", a-t-elle confiè à BBC Sport.

"La qualité qui émane des femmes arbitres est absolument époustouflante".

"Maintenant, nous avons Rebecca Welch, Natalie Aspinall, Sian Massey-Ellis, Lisa Rashid qui brisent ces plafonds de verre et repoussent vraiment les limites", a-t-elle ajouté.

"Elles sont reconnues pour leurs excellentes performances sur le terrain de jeu.

"Je n'ai jamais vu un groupe d'officiels aussi professionnels, aussi organisés, aussi détaillés dans leur préparation, leurs objectifs de forme physique, leur nutrition.

"Le comportement professionnel que nous pouvons voir maintenant dans tout l'environnement, c'est absolument bouleversant."

"Je ne veux pas de discrimination positive"

Janie Frampton a été l'une des premières femmes arbitres dans le football professionnel masculin en Angleterre et a ensuite formé des arbitres pour la FIFA pendant une décennie.

Elle a indiqué que la sélection de Frappart en tant qu'arbitre, plutôt que sur la touche, est essentielle.

"Je pense que c'est extrêmement important", a-t-elle confié à BBC Sport.

"Ma seule inquiétude était de savoir s'ils allaient prendre les filles et ne les utiliser que comme quatrième arbitre ? C'est donc un moment absolument fantastique."

À la question de savoir combien de temps il faudrait avant qu'une femme ne prenne en charge un match de Premier League, elle a répondu "peut-être cinq ans".

Mais comme Steinhaus-Webb, elle tient à s'assurer que toute promotion se fait pour les bonnes raisons.

"Je ne veux pas de discrimination positive", a-t-elle ajouté.

"Je ne veux pas que les femmes soient promues au milieu de la Premier League juste pour pouvoir cocher une case. Elles doivent être assez bonnes, mais nous avons des filles qui arrivent maintenant et qui sont peut-être assez bonnes."

Il y a plus de 50 femmes officielles dans la Premier League, le championnat, la Women's Super League et le Women's Championship.

Welch était l'un des 12 arbitres de l'Euro 2022 féminin, avec Massey-Ellis et Rashid parmi les assistants.

Mais Mme Frampton estime que trop de femmes arbitres ne parviennent pas à atteindre le sommet du football en raison de problèmes au niveau local.

"Nous avons fait beaucoup mieux, bien sûr, mais il y a toujours un grand écart entre les femmes et les hommes, et ce pour de nombreuses raisons différentes", a-t-elle ajouté.

"Nous devons nous assurer que les femmes considèrent cet environnement comme accueillant pour elles", a-t-elle souligné.

"Nous devons essayer d'éliminer certains des préjugés inconscients qui existent encore", a conclu Frampton.