Après près de 14 ans de bons et loyaux services, l’emblématique capitaine a décidé, au lendemain de la Coupe du Monde «Brésil 2014», de prendre sa retraite internationale. C’était le 27 août 2014, sur ses comptes Instagram et Facebook. A l’annonce, certains fans de l’ancien «pichichi» du FC Barcelone sont restés dubitatifs, jugeant son absence comme un possible handicap pour un groupe qui doit se reconstruire après la débâcle au Brésil.
Son départ a pourtant laissé éclore quelques génies comme Clinton Njié et laissé transparaitre le talent de plusieurs autres comme Aboubacar Vincent. Malgré cela, les performances de l’équipe fanion du Cameroun restent en demi-teinte, si l’on en juge par la récente participation à la CAN 2015, et aux éliminatoires poussives de l’édition 2017 en cours. Entretemps, le «9» fait rêver le public d’Antalyaspor qui le célèbre à chaque sortie.
Au Cameroun, il n’y a pas que le public sportif qui se sent lésé de Samuel Eto’o. En effet, la presse sportive locale signalait qu’une mission a été dépêchée auprès du quadruple ballon d’or africain en vue de le convaincre de revenir en sélection. Selon le quotidien Mutations en kiosque le jeudi 17 septembre 2015, la composition et la moisson de cette mission restent un mystère. Le capitaine d’Antalyaspor ne souhaite pas s’exprimer, pour le moment, sur cette affaire.
Le journal indique que du côté du ministère des Sports et de l’Education physique (Minsep), on subodore une «immense rumeur», tout en indiquant que c’est possible qu’une telle démarche ait été entreprise par la Présidence de la République ou les services du Premier Ministre, en ignorant le ministre Adoum Garoua.
Du côté de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot), il n’y a pas de supputations à ce sujet. Joseph Owona, président du Comité de normalisation de la Fecafoot se veut encore plus cinglant sur la question: «J’entends ça ici et là. Le sujet n’est pas à l’ordre du jour à la Fecafoot. Il vous souvient quand même que c’est une commission [commission Motazé mise sur pied le 25 juin 2014, ndlr] qui a mis ces gens-là [dont Eto’o, ndlr] dehors».
Mutations rapporte que c’est là une position tranchée qui rappelle une précédente, exprimée par le patron de la normalisation dans une correspondance adressée au Premier ministre à la veille de la coupe du monde Brésil 2014: «Pour ce qui est de l’indiscipline caractérisée teintée de défiance de certains joueurs et particulièrement du capitaine Samuel Eto’o Fils, vis-à-vis de l’autorité publique et des autorités fédérales, nous suggérons que le capitanat lui soit retiré, suivi d’une radiation pure et simple de l’équipe nationale avec d’autres meneurs patents… ».
Ceci démontre à suffisance que l’hypothèse du retour d’Eto’o en sélection nationale n’est pas du goût de tout le monde. Un technicien du football, cité par le journal, rappelle qu’«il ne suffit pas d’afficher une forme certaine. Encore faut-il que le retour d’Eto’o ne dégrade pas le climat un peu serein qui prévaut au sein de l’équipe nationale. Qu’est ce qui est recherché à travers ce retour ? Avant son départ forcé de l’équipe nationale, il me semble que les Lions indomptables gagnaient déjà péniblement les matches, lorsqu’ils venaient à les gagner, face à des équipes moyennes ».
Une autre opinion pense que le retour ou non de Samuel Eto’o en sélection est plus un problème politique que sportif. Il s’agit même d’un «dossier de souveraineté». Car, dans la perspective des échéances électorales de 2018, une non qualification des Lions à la CAN 2017 pourrait s’avérer fâcheuse au plan politique pour Paul Biya, candidat pressenti à la présidentielle. Mutations indique que les stratèges du Président de la République seraient même d’avis (ils auraient déjà plaidé dans ce sens auprès de qui de droit) qu’il faille ramener Eto’o, quels que soient les dégâts collatéraux que cela pourrait engendrer au sein du groupe, l’essentiel étant d’assouvir des desseins politiques.
Le journal se souvient qu’en 1990, l’épopée des Lions indomptables en Italie a grandement contribué à désamorcer la bombe sociale alimentée par les revendications d’une opposition alors mordante. Avant la belle aventure italienne, il y a eu une décision politique forte, millimétrée. Mal accueillie par des cadres de l’équipe nationale (y compris par feu le ministre Joseph Fofé, si l’on s’en tient au témoignage de Jules Dénis Onana dans Cameroon Tribune hors-série paru en juin 2014), l’instruction présidentielle de sélectionner Roger Milla est certainement, avec des années de recul, ce qui pouvait arriver de mieux au groupe de Valérie Nepomniachi.