Bénin : Révélations sur le financement d'une tentative de coup d'État contre Patrice Talon

Talon Mais.jpeg Talon, président du Bénin

Thu, 26 Sep 2024 Source: www.camerounweb.com

Une affaire d'une gravité sans précédent secoue le Bénin depuis le début de la semaine. Les autorités judiciaires ont révélé, le 25 septembre, les détails d'une prétendue tentative de coup d'État visant à renverser le président Patrice Talon. Cette annonce a provoqué une onde de choc dans le pays, considéré jusqu'alors comme un modèle de stabilité en Afrique de l'Ouest.

Au centre de ce scandale se trouvent trois personnalités de premier plan, dont l'arrestation a stupéfié l'opinion publique béninoise :

1. Olivier Boko : Figure emblématique du monde des affaires à Cotonou, Boko était jusqu'à récemment considéré comme un intime du président Talon. Son influence dans les cercles du pouvoir était notoire, ce qui rend son implication présumée d'autant plus spectaculaire.

2. Oswald Homeky: Ancien ministre des Sports, Homeky était connu pour sa proximité avec Olivier Boko. Sa carrière politique semblait prometteuse jusqu'à cette soudaine chute.

3. Colonel Djimon Dieudonné Tévoédjrè : Commandant respecté de la Garde républicaine, le colonel Tévoédjrè occupait un poste stratégique au sein de l'appareil sécuritaire de l'État. Son rôle présumé dans cette affaire soulève des questions sur la loyauté au sein des forces armées.

Boko et Homeky ont été appréhendés de manière spectaculaire en début de semaine, lors d'une opération nocturne menée par les forces de sécurité. Le colonel Tévoédjrè, initialement interpellé avec eux, a par la suite été relâché, laissant planer le doute sur son degré d'implication dans l'affaire.

C'est le procureur spécial de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), Elon'm Mario Metonou, qui a fait ces révélations explosives lors d'une conférence de presse tenue le 25 septembre. Selon ses déclarations, un coup d'État était minutieusement planifié pour le 27 septembre 2024, visant à renverser le président Patrice Talon.

Le plan aurait impliqué l'utilisation de la Garde républicaine, corps d'élite chargé de la protection du président et des institutions. Les accusés auraient tenté de rallier le commandant Tévoédjrè à leur cause, espérant ainsi neutraliser la principale force de défense du régime.

Les détails financiers révélés par le procureur Metonou donnent une idée de l'ampleur de la conspiration présumée :

Le procureur a affirmé qu'un compte avait été ouvert le 6 août à la NSIA Banque Côte d'Ivoire au nom du colonel Tévoédjrè. Ce compte aurait été crédité d'un montant initial de 105 millions de francs CFA, somme considérable destinée apparemment à s'assurer la coopération du commandant de la Garde républicaine.

Cependant, cette affirmation a été rapidement contestée. Contacté par Jeune Afrique, le directeur général de NSIA Banque Côte d'Ivoire, Léonce Yacé, a formellement démenti l'existence d'un tel compte au nom du colonel Tévoédjrè dans les livres de sa banque.

Une enquête plus approfondie a révélé qu'il s'agirait en réalité d'une police d'assurance souscrite le 9 juillet auprès de NSIA Assurances au nom du commandant de la Garde républicaine. Cette divergence entre les déclarations officielles et les faits soulève des questions sur la précision des informations détenues par les autorités judiciaires.

Le deuxième volet du financement présumé est encore plus spectaculaire. Selon le procureur Metonou, une somme colossale de 1,5 milliard de francs CFA aurait été remise au colonel Tévoédjrè le 24 septembre, soit trois jours avant la date prévue du coup d'État. Cette somme aurait été méticuleusement préparée et répartie comme suit :

- 129 lots de dix millions de francs CFA en billets de 10 000

- 42 lots de cinq millions de francs CFA en billets de 5 000

Le mode de transport de cet argent est tout aussi surprenant : les fonds auraient été chargés dans un véhicule 4x4 Toyota, modèle LC Prado, appartenant à Oswald Homeky. Pour brouiller les pistes, le véhicule aurait été muni d'une fausse plaque d'immatriculation, démontrant le degré de préparation et de dissimulation des conspirateurs présumés.

C'est précisément lors de la remise de ce véhicule chargé d'argent que le piège se serait refermé sur les suspects. La brigade criminelle, qui semblait avoir eu vent de l'opération, est intervenue au domicile de l'ancien ministre Homeky, où se trouvait également le colonel Tévoédjrè.

Cette intervention minutieusement orchestrée a permis l'arrestation d'Olivier Boko et d'Oswald Homeky, pris, selon les autorités, en flagrant délit de préparation d'un coup d'État. La présence du colonel Tévoédjrè sur les lieux au moment de la transaction présumée ajoute une dimension particulièrement troublante à l'affaire.

Cette affaire ébranle les fondations mêmes du pouvoir au Bénin. Olivier Boko, autrefois considéré comme un pilier du régime Talon, se retrouve aujourd'hui accusé de comploter contre celui qu'il soutenait hier encore. Ce revirement spectaculaire soulève des questions sur les tensions latentes au sein de l'élite politique et économique du pays.

L'implication présumée d'un ancien ministre comme Oswald Homeky jette également une ombre sur la cohésion du gouvernement et la loyauté de certains hauts responsables. Quant au rôle supposé du commandant de la Garde républicaine, il soulève des inquiétudes sérieuses sur la fiabilité des institutions chargées de la sécurité de l'État.

Cette affaire intervient dans un contexte régional tendu, marqué par une série de coups d'État dans plusieurs pays voisins du Bénin. Elle rappelle la fragilité des institutions démocratiques en Afrique de l'Ouest et les défis permanents auxquels font face les gouvernements de la région pour maintenir la stabilité politique.

Les accusés font désormais face à des charges extrêmement graves, notamment de complot contre la sûreté de l'État. L'enquête en cours promet d'être longue et complexe, avec potentiellement d'autres arrestations à venir si un réseau plus large venait à être découvert.

La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), juridiction spéciale créée sous la présidence Talon, sera vraisemblablement chargée de juger cette affaire. Son indépendance et son impartialité seront scrutées de près, tant par l'opinion publique béninoise que par la communauté internationale.

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