Les artistes réclament une nouvelle société

Patricia Ngo NgouemPatricia Ngo Ngouem

Fri, 18 Sep 2015 Source: Mutations

S’achemine-t-on vers la création d’une nouvelle société de gestion collective du droit d’auteur et des droits voisins de l’art musical au Cameroun ? Le sujet était en tout cas au menu des échanges de l’audience accordée par la ministre des Arts et de la Culture (Minac), Ama Tutu Muna, au président du Syndicat national des professionnels de la musique (Synaprom), Raymond Tchengang, mardi dernier dans son cabinet.

«L’un des sujets que nous avons abordés avec la ministre était la relance d’une société de gestion collective. Nous sollicitons que ça soit une société consensuelle. Tout le monde doit se mettre d’accord pour aller vers une société. Mais, que cela se fasse en respectant la loi et la réglementation actuelle», a déclaré le secrétaire général du Synaprom, Jean Paul Fouda Ottou, joint hier au téléphone.

Il n’existe plus de société de gestion collective du droit des musiciens depuis l’annulation (contestée) de l’agrément octroyé par la Minac à la nouvelle Société camerounaise civile de musique (Socacim), créée le 28 avril dernier à Mbengwi (Nord-Ouest), lors d’une cérémonie de remise de guitares organisée par le Syndicat camerounais de musique (Sycamu), dirigé par Roméo Dika. La Socacim a succédé à la Société camerounaise de l’art musical (Socam), dont l’agrément n’a pas été renouvelé.

L’absence d’une société civile a notamment pour conséquence la non redistribution des dividendes aux artistes, puisqu’aucune répartition ne peut se faire sans le passage par une société de gestion collective. Mardi dernier, la question des répartitions a été remise sur la table de la ministre, au moment où un groupe d’artistes menace d’entrer en grève de la faim si leurs droits ne leur sont pas versés.

«La préoccupation des artistes est d’avoir une répartition pour qu’ils puissent assumer leurs responsabilités de chefs de familles à l’occasion de la rentrée scolaire. Il fallait donc voir comment on peut faire pour donner suite à cette revendication qui est légitime et qui est due à l’absence d’une société de gestion collective qui empêche de faire la partition», confie le Sg du Synaprom.

Cette démarche visait donc à mener un plaidoyer auprès de la Minac, afin que le juge puisse lever «ponctuellement» les scellées sur les comptes bloqués à la suite d’une plainte du Synaprom, pour mauvaise gestion. «Il y a de l’argent dans le compte.

On voudrait donc le prendre pour une répartition spéciale aux artistes. Mais pour cela, il faut une autorisation de l’Etat, du côté du Minac, et l’accompagnement des artistes pour que le juge débloque le compte», a indiqué Ottou Marcellin, qui était également dans la suite de Raymond Tchengang.

Cette démarche a porté ses fruits, puisque la ministre a annoncé hier, par le biais d’un communiqué lu au journal de 20 heures sur le Poste national de la Crtv, une «répartition spéciale», afin de permettre aux artistes de faire face aux dépenses liées à la rentrée scolaire. La dernière répartition dans le secteur de l’art musical remonte à septembre 2014. Il s’agissait d’une «opération spéciale» qui avait été confiée au Comité de répartition spéciale dirigé par Esso Essomba.

«Ce qui a été fait en 2014 n’était pas une répartition, mais une « aide spéciale », par rapport à la situation qui prévalait à ce moment-là. C’était donc un cas exceptionnel qui ne devrait pas se renouveler», déclarait, dans ces mêmes colonnes, Joe Mboule, l’un des coordonnateurs de la Socacim. Visiblement, l’on est reparti pour un scénario identique à celui de l’année dernière, où la Minac avait initié une répartition spéciale en lieu et place de la Socam, mise sur la touche.

Cette nouvelle «répartition spéciale» devrait profiter à tous les artistes, laisse entendre Ottou Marcellin. «Ce n’est pas seulement les artistes membres du Synaprom qui vont bénéficier de cette répartition spéciale. Cette opération sera dirigée par un comité spécial, afin que tous les artistes camerounais puissent bénéficier de cet argent.

C’est la raison pour laquelle nous avons sollicité d’autres syndicats dans le cadre de cette démarche», affirme l’auteur du titre à succès «Enfant soldat», qui fête ses trente-cinq ans de carrière le mois prochain. Pour le Synaprom, l’heure est aujourd’hui à la réconciliation.

C’est la raison pour laquelle, «l’autre souci qu’on a partagé avec la ministre, c’est d’aller vers un forum national de l’art musical qui permettra aux artistes de mettre les choses à plat et de faire taire les animosités», conclut Jean Paul Fouda Ottou

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