Depuis 22 éditions, la Dakar Fashion Week (DFW) s'affirme comme une vitrine incontournable pour les créateurs africains. Cette année, sept jeunes stylistes ont foulé le podium avec leurs collections, avec tous des ambitions: de se faire connaître.
Si le défilé final est à coup sûr le point d'orgue et certainement le moment le plus prisé de la DFW, les défilés des jeunes créateurs demeurent une activité majeure de cet événement devenu incontournable dans l'univers de la mode africaine.
Pour preuve, elle est la seule activité qui se tient sur deux jours. Pour l'édition 2024, elle s'étendait du 05 au 06 décembre. Deux jours durant lesquels, journalistes, acheteurs et influenceurs ou tout simplement mordus de mode ont pu apprécier la créativité de sept designers venus du Mali, d'Afrique du Sud, du Congo et du Sénégal.
Vendre est justement l'une des raisons qui a poussé Boubabcar AG Midaye à faire le déplacement du Mali pour la DFW.
La trentaine sonnée, le promoteur de la marque Mida Style n'est vraiment pas inconnu des runway. Lauréat du Festival International de la Mode en 2021, il est par ailleurs promoteur de l'événement « Labo Kayesien » de la mode. Il s'inspire de sa culture Touareg, crée un brassage dans son travail entre le nord et le sud du Mali.
Pour la Dakar Fashion Week, il a présenté sa collection « Toumah », une collection unisexe à base des tissus maliens notamment le bogolan et le pagne tissé.
L'objectif, «valoriser les artisans maliens. A travers moi, leur tissu voyage au-delà des frontières » nous confie-t-il fièrement.
A la question de savoir sa raison d'être à la Dakar Fashion Week, « c'est toujours un plus de montrer ses créations au-delà des frontières pour découvrir d'autres publics, d'autres clients » déclare-t-il avant d'ajouter « j'espère vraiment vendre. Je suis venu booster ce que je vis pour pouvoir faire de nouvelles créations et pouvoir payer ses artisans avec qui je travaille. »
C'est le cas de Dior Ndiaye, styliste et mannequin sénégalaise qui a connu son baptême de feu des grands podiums en tant que styliste. D'ailleurs la jeune dame n'a pas pu retenir ses émotions au moment de son show final. Sa marque, Three-Di, est un pont entre tradition et modernité, un mix entre tenues de grandes occasions et syles urbains, où les tissus sénégalais prennent vie sur des coupes contemporaines.
Être présente à la DFW était pour elle l'occasion idéale pour présenter sa marque. « J'ai eu la chance d'évoluer dans le domaine en tant que mannequin depuis plus de cinq ans. La Dakar Fashion Week était à mes yeux le seul chemin pour faire connaître marque » nous dit-elle juste après son premier défilé en tant que designer.
Mais la DFW n'est pas qu'une scène. Elle joue un rôle d'incubateur pour les jeunes stylistes, comme le rappelle Roméo Moukagni, promoteur de la marque Romzy.
Jeune créateur lors de l'édition 2018, il est aujourd'hui une figure incontournable de la mode en Afrique francophone. Selon lui, avoir participé à la DFW a contribué à son renommée. « J'ai eu un client avec qui on a travaillé pendant longtemps ; et après fouille, il s'est avéré que mon passage à la Dakar Fashion Week était le pont qui l'avait conduit à moi» se remémore-t-il.
Six ans après son défilé dans la section jeunes créateurs de la DFW, il estime qu'aujourd'hui plus qu'hier, présenter sa collection à cet événement pour un jeune créateur, en vaut vraiment la chandelle. Il explique : « le dispositif, le public, n'étaient pas le même il y'a six ans. L'événement a gagné en maturité ».
Toutefois, le promoteur de l'événement Skin Print pense qu'une communication poussée sur le travail des jeunes stylistes « où on verrait le process de créations, ses difficultés pourrait aider à avoir un accompagnement ».
Et les Fashion Weeks dynamisent l'emploi dans des secteurs connexes. Adama Paris estime d'ailleurs que l'économie de la mode est sous-estimée car « la mode fait vivre tellement de gens en Afrique : des tailleurs, des mannequins, des maquilleurs, … »