Le procès tant attendu de l'affaire Glencore, accusée d'avoir versé environ 7 milliards de FCFA de pots-de-vin à des dirigeants du secteur pétrolier camerounais, s’est ouvert le 10 septembre 2024 à Londres, sans toutefois révéler l’identité des responsables locaux impliqués. Malgré l'attente, le tribunal de Westminster s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'affaire devant le Southwark Crown Court, reportant la révélation des noms des Camerounais concernés à la prochaine audience, prévue pour le 8 octobre 2024.
La Société nationale des hydrocarbures (SNH), directement touchée par cette affaire, s’était pourtant tournée vers Glencore en mai 2022 et à nouveau en juin 2023 pour exiger les noms des responsables camerounais impliqués. Toutefois, la multinationale a invoqué une clause d’anonymat conclue avec le Serious Fraud Office (SFO), l'agence britannique en charge de l'enquête, pour refuser de divulguer ces informations.
La SNH, bras armé de l’État camerounais dans l’exploration pétrolière, a assuré dans son communiqué du 10 septembre 2024 qu’elle mettrait tout en œuvre pour que justice soit faite et que les personnes impliquées soient punies. Depuis mai 2022, elle a suspendu toutes ses activités avec Glencore, en attendant l'issue de l'affaire.
Cette attitude contrastée de la SNH intervient après une prise de position initiale défensive. Lorsque l’affaire a éclaté, l’administrateur-directeur général de la SNH, Adolphe Moudiki, avait nié toute implication de son entreprise dans de tels agissements, affirmant que la corruption était "strictement interdite" par ses règlements internes. Cependant, après l’ouverture d’une enquête sur demande du président camerounais entre 2023 et 2024, Moudiki a reconnu que des dirigeants et employés de Glencore seraient traduits devant la justice anglaise, laissant la porte ouverte à la possibilité que des responsables camerounais soient aussi identifiés.
L’avocat Akéré Muna avait été le premier à révéler l’implication de la SNH dans cette affaire. Il a critiqué le manque de transparence de l'entreprise, pointant du doigt la lenteur de ses actions et exigeant la suspension des transactions avec Glencore tant que l'identité des complices camerounais n'aurait pas été dévoilée.
Cette affaire remonte à fin 2022, lorsque Glencore a été condamnée à une amende de 276 millions de livres sterling par la justice britannique pour corruption dans cinq pays africains, dont le Cameroun. La multinationale avait admis avoir versé 79,6 millions de dollars à des intermédiaires pour obtenir des avantages indus en Afrique. Au Cameroun, environ 7 milliards de FCFA auraient été versés à des responsables de la SNH et de la Société nationale de raffinage (Sonara), afin de faciliter les opérations de Glencore dans le pays.