Le résultat de l’appel d’offres international ouvert no133 du 07 octobre 2021 relatif à la construction du futur immeuble siège de la direction nationale de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) pour le Cameroun suscite une vive colère de la part des neuf soumissionnaires recalés. Ledit résultat, publié le 09 juin 2022, soit huit mois après la réception des offres, donnait l’entreprise Arabian Construction Company (ACC Co. LLC) adjudicataire du marché, « à la surprise générale », d’après les concurrents évincés. « Plus surprenant, son offre est passée de 50 milliards Fcfa à 40 milliards Fcfa, sans explication du processus de négociation apparemment nocturne qui lui a permis de déposer une nouvelle offre financière », dénonce un participant.
Les soumissionnaires présents à l’ouverture rapportent en effet que les offres soumises étaient toutes comprises entre 30 et 35 milliards Fcfa, à l’exception de celle du vainqueur qui s’élevait à 50 milliards Fcfa. Ce montant en faisait théoriquement le soumissionnaire le moins favorisé, surtout au vu du calibre des autres participants, à l’instar de Sogea Satom, filiale du groupe français Vinci, Arab Contractors, Shanxi Construction, etc. Les candidats malheureux disent n’avoir aucune explication sur la notation technique des dossiers soumis ; juste leur est-il suggéré de demander un débriefing individuel. Dénonçant un manque total de transparence dans ce dossier, ils continuent de demander des explications à la Beac un an après l’attribution du marché. Ils disent en effet détenir la preuve que ACC Co. LLC a décroché le marché, « alors même que son offre était la moins favorable », et que son représentant, le Libanais Omar EL Merhebi, « aurait adressé son offre hors délais et aurait même procédé personnellement au dépouillement des offres ».
Ces soumissionnaires croient également savoir que le patron de la société ACC Co. LLC aurait invité de hauts responsables de la Beac à Dubaï « dans les jours qui ont précédé le dépouillement des offres », en violation du code des marchés en vigueur à la Beac, qui dispose que tout contact avec les responsables du processus d’appel d’offres est prohibé. Au sein de l’institut d’émission de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), des sources autorisées rejettent en bloc ces accusations graves. Procédure valide Elles soutiennent plutôt que les soumissions ont été reçues par la commission générale dédiée, dont celle d’ACC Co. LLC.
« En application de l’article 81 du code des marchés qui dispose que « la mise en concurrence est valable dès réception d’une soumission », la commission générale n°01 a déclaré la procédure valide. L’ouverture des soumissions s’est faite conformément aux procédures de passation des marchés en vigueur à la Beac », apprend-on. Pour en avoir le cœur net relativement aux manœuvres frauduleuses présumées dans le cadre de ce marché, les entreprises évincées assurent avoir d’ores-et-déjà mandaté leurs conseils respectifs « en vue de diligenter des procédures auprès des autorités compétentes pour l’annulation de l’adjudication et engager des poursuites judiciaires au Cameroun suite à ces actes de corruption ».
Ces prestataires malheureux se disent étonnés qu’en dépit des réserves qu’elles n’arrêtent pas d’émettre, notamment sur les circonstances dans lesquelles les modifications d’offres auraient été déposées, « aucune instance d’enquête ou de recours, aucune instance de gouvernance indépendante ne se soit saisie des faits allégués plus d’un an après les faits inquiète et interpelle quant à la déliquescence managériale et au défaut de gouvernance d’une institution aussi importante pour l’équilibre de la sous-région ».