Business rentables : les bonnes affaires des Nordistes à Soa

Soa est une ville du département de la Méfou-Afamba

Mon, 24 Jul 2023 Source: L'Oeil du Sahel

Soa est une ville du département de la Méfou-Afamba, qui accueille Camerounais et étrangers venus de divers horizons. Située à une quinzaine de kilomètres de la ville de Yaoundé, cette localité abrite aussi le siège de l’université de Yaoundé II. Une multitude de personnes originaires du Septentrion s’y sont installées depuis des années : Toupouri, Massa, Mousgoum, Moundang, Kapsiki, Moufou, Mafa, Laka, … Ils y pratiquent diverses activités génératrices de revenus dans plusieurs secteurs, notamment le commerce et l’agriculture. Ils vendent un peu de tout : céréales, soya, kilichi, du thé, du « bili-bili », des chaussures, vêtements, sacs, friandises etc. Plusieurs ethnies sont également représentées dans cette agglomération.

Originaire de Ngong dans la région du Nord, Amina Angéline est une mère de six enfants. En 2009, elle débarque dans la ville de Soa, une bourgade située à quelques kilomètres de Yaoundé à la recherche des meilleures conditions de vie. Pour arrondir ses fins de mois, la jeune fille va faire le pari de se lancer dans le commerce. C’est grâce à l’aide de l’exécutif communal de l’époque qu’elle parvient à acquérir un espace au marché de la ville éponyme où elle commercialise les vivres secs comme les arachides, le maïs, le mil, le haricot, le soja, le fonio, les oignons, etc. « C’était la pou‐ belle quand j’ai acheté cet espace auprès de la mairie à un prix symbolique de 200 000 Fcfa. Je l’ai aménagé, ce qui m’a permis de me lancer dans mon commerce », affirme Amina.

Soucieuse d'accroître ses revenus, la jeune dame a entrepris, il y a quelques années, d’étendre son activité dans sa terre d’accueil. « Depuis bientôt cinq ans, je suis aussi connue dans ce marché sous le nom de ‘’Dada couscous’’. A travers mon commerce, je valorise les sauces typiquement sahéliennes comme le Lalo, le Tasba, le Baobab, le Foléré, le Gombo frais et sec. Le seul complément, c’est le couscous du maïs », confie-telle. Une initiative qui fait l’unanimité au sein de la communauté et surtout chez les consommateurs constitués pour la plupart des autochtones qui « en raffolent énormément puisqu’ils ne savent pas préparer à la façon des nordistes », indique Angéline. Preuve que les relations entre étrangers et locaux dans cette localité sont au beau fixe « Je vends chaque jour et ma marchandise finit toujours. Malgré les petits différends qu’on a souvent avec certains, j’avoue que la ville de Soa est une terre d’accueil », témoigne la « Nordiste ».

A un jet de pierre du comptoir d’Amina, Mayang Rose, commerçante, vit à Soa depuis 20 ans. Cette mère de sept enfants parvient elle aussi à nourrir sa famille grâce au commerce. « J’ai fait 20 ans dans cette localité avec sept enfants tous nés ici. C’est grâce aux activités génératrices de revenus dans les‐ quelles je me suis lancée en 2008, que je parviens à joindre les deux bouts. Je mène mes activités avec beaucoup d’aisance et quand je traverse des situations difficiles, les Eton, Ewondo, Bamiléké et Bassa qui sont nos voisins, sont prompts à nous secourir, et présents pour nous venir en aide quand on en a besoin », raconte-t-elle.

LE « BILL-BILL » ATTIRE

Autre lieu d’attraction au marché de Soa, la vente d’une boisson traditionnelle appelée « bill‐bill ». Un breuvage qui a le vent en poupe dans la communauté. Assise devant sa marchandise, Marie sert cette boisson fabriquée à base du mil rouge à ses nombreux clients. Nordiste ou non, chacun passe sa commande. Adapté à toutes les bourses, le prix de la calebasse du bill-bill varie entre 100 Fcfa et 1000 Fcfa. Goursallah, fondateur du secteur de vente de bill-bill par ailleurs, président de l’association des Toupouri à Soa, explique le contexte de création de cet espace devenu aujourd’hui un fief d’attraction ou s’entremêle nordistes, sudistes, et étrangers. « C’est en la mémoire de ma femme que j’ai décidé de donner plus de visibilité à ce secteur de vente de bill‐bill dans la ville de Soa. Elle était la seule qui, depuis notre arrivée en l’an 2000 s’est lancée dans la fabrication et la commercialisation de cette boisson traditionnelle appréciée par plusieurs. Lorsqu’elle est décédée, plusieurs autres femmes se sont égale‐ ment mises dans cette activité. Quand je me suis rendu compte qu’elles devenaient de plus en plus nombreuses à s’intéresser à ce secteur, j’ai résolu de faire un toit pouvant contenir toutes celles qui ont eu le désir de vendre du bili‐bili pour honorer ma femme ». Goursallah dit être le tout premier Toupouri ressortissant de l’Extrême-Nord à s’être installé à Soa en l’an 2000. Depuis son arrivée, il a travaillé comme gardien tour à tour chez l’ex directeur de la Cameroon radio television Florent Etoga Eily, ensuite à la mairie de Soa et aujourd’hui l’homme officie toujours en tant que gardien à la sous-préfecture de Soa. LA TERRE FERTILE Le secteur agricole a également le vent en poupe dans la localité de Soa. Certains ressortissants du Grand-Nord présents dans cette zone ont pu acquérir des espaces pour cultiver des produits tels que le maïs, le manioc, la patate, les pastèques, les légumes, la tomate etc. D'autres ont plutôt opté pour la location de ces espaces pour pratiquer leur activité. Hormis cette catégorie de personne, ceux n’ayant pas de moyens pour acquérir une parcelle de terre, ont opté pour se faire employer dans les plantations des autochtones afin de gagner le pain quotidien. Hamidou est l’un des premiers nordistes à s’être fait un nom à travers son travail acharné pour la culture de la terre dans la localité de Soa. Parti très tôt de son village natal à Tibati dans la région de l’Adamaoua, il a pu obtenir un terrain derrière le lycée de Soa dont il est propriétaire. « C’était un espace propice à la culture du manioc, et je me suis adonné à cette culture pendant dix ans environ. Cela m’a rapporté énormément d’argent et c’était le début de mon aventure », s’est réjoui Hamidou. Quelques années plus tard, cet homme s’est lancé dans les cultures maraîchères. Au fil des ans, il a planté quelques arbres fruitiers dans sa parcelle. On y retrouve des orangers, mandariniers, safoutiers, papayers, goyaviers etc. Aujourd’hui, il récolte et commercialise les fruits issus de ce verger.

MOTO-TAXIMEN EN ACTION

Le moyen de transport le plus populaire dans la localité de Soa, c’est la moto. Les jeunes ressortissants du Septentrion sont également très présents dans ce secteur d’activité. Silas Nopelba est l’un deux. Lui qui a quitté son village à Djaloumi dans le Nord en 2020 pour s’installer dans cette périphérie de Yaoundé avec pour objectif d’engranger suffisamment de bénéfices pour rentrer épouser une femme dans son village. Silas est à son poste de travail ce 10 juillet 2023. C’est grâce à sa moto que le jeune homme peut subvenir à ses besoins. « C’est de cette manière que je vais à la chasse des clients. En seulement trois ans d’activités, je suis aujourd’hui propriétaire de deux motos dont l'une est en location, et l’autre me permet de continuer mon activité avec aisance. Mon gain journalier oscille entre 5 000 Fcfa et 10 000 Fcfa », explique Silas. Le jeune homme se réjouit d’ailleurs du fait qu’en cette fin d’année, il pourra repartir au village afin de ramener son épouse à Soa pour qu’ensemble ils y vivent. « Avec le temps, je pourrais m’acheter un terrain pour construire une maison. Ne dit‐on pas que l’espoir fait vivre », lance avec un sourire en coin Silas Nopelba.

Source: L'Oeil du Sahel