La situation énergétique au Cameroun connaît une nouvelle détérioration avec l'arrêt complet de la centrale à gaz de Kribi, d'une capacité de 216 MW. Cette installation, contrôlée majoritairement par le producteur indépendant d'électricité Globeleq, joue un rôle crucial dans l'approvisionnement électrique du pays. Son arrêt n'est pas sans conséquences pour les grandes métropoles camerounaises, notamment Yaoundé, Douala et Bafoussam, qui subissent de plein fouet des délestages intensifs.
Lors d'une visite de travail effectuée le 19 septembre 2024 sur le site du projet d'aménagement de la centrale hydroélectrique de Nachtigal, le ministre de l'Eau et de l'Energie, Gaston Eloundou Essomba, a levé le voile sur les raisons de cette crise énergétique. Selon le ministre, un différend financier opposant Eneo (le principal distributeur d'électricité du pays) et ses partenaires serait à l'origine de cette situation qui impacte au moins 20% des capacités de production du pays.
"La centrale à gaz de Kribi est en arrêt à cause des différends qu'il y a entre Eneo et l'entreprise de production du fait des retards dans le paiement des factures d'énergie, et le secteur est délaissé d'au moins 20% de ses capacités de production. Ceci pourrait être à l'origine d'un certain nombre de désagréments", a déclaré le ministre, sans toutefois préciser le montant exact de la facture en question.
Ce n'est pas la première fois que Globeleq prend la décision radicale de débrancher ses centrales pour des raisons de factures impayées. En décembre 2023, l'entreprise avait déjà mis ses machines à l'arrêt, invoquant des arriérés de paiement accumulés par Eneo d'un montant colossal de 107,7 milliards de FCFA. Cette somme se décomposait en 88 milliards dus à Kribi Power Development Corporation (KPDC) et 19,7 milliards à Dibamba Power Development Corporation (DPDC). Un mois plus tôt, en novembre 2023, Globeleq avait également arrêté ses ouvrages de production pour les mêmes raisons.
Cette nouvelle crise met en lumière la fragilité du système électrique camerounais. Le parc de production d'électricité du pays est actuellement constitué de 62% d'hydroélectricité, 14% de thermique au gaz, 22% de thermique au fioul et 2% de solaire. La capacité de production installée est estimée à 1534 MW, dont 1359 MW dans le Réseau Interconnecté Sud (RIS), pour une disponibilité d'environ 1200 MW.
Dans le RIS, en situation normale, l'offre de production provenant de l'hydroélectricité associée au gaz, en tenant compte du rendement des équipements, est de l'ordre de 940 MW. Or, la demande en journée atteint 960 MW et grimpe jusqu'à 1140 MW en soirée, créant un déficit structurel que l'arrêt de la centrale de Kribi ne fait qu'aggraver.
Les délestages qui frappent les grandes villes du pays ont des répercussions importantes sur l'activité économique et la vie quotidienne des Camerounais. Les entreprises voient leur productivité affectée, tandis que les ménages doivent composer avec des coupures d'électricité fréquentes et imprévisibles.
Face à cette situation, les autorités camerounaises sont pressées de trouver une solution rapide pour résoudre le différend financier entre Eneo et Globeleq. La remise en service de la centrale à gaz de Kribi apparaît comme une priorité pour stabiliser le réseau électrique et réduire l'ampleur des délestages.
À plus long terme, cette crise souligne la nécessité pour le Cameroun de diversifier son mix énergétique et d'investir dans la modernisation de ses infrastructures de production et de distribution d'électricité. Le développement de sources d'énergie renouvelables, comme le solaire, pourrait contribuer à renforcer la résilience du système électrique face aux aléas techniques et financiers.