Les tensions inflationnistes vont s’accélérer au Cameroun au cours de l’année 2023, à cause de plusieurs facteurs aussi bien endogènes qu’exogènes.
Selon l’Institut national de la statistique (INS), ces « perspectives d’inflation sont influencées par le durcissement des conditions financières dans la plupart des régions, le conflit opposant l’Ukraine à la Russie, les effets persistants de la pandémie de la Covid-19, la dépréciation du FCfa vis-à-vis du dollar, le réajustement des prix du carburant à la pompe et les nouvelles dispositions fiscales de la Loi des finances 2023. En définitive, en considérant le réajustement de 15,9% du prix du litre du super et de 25,2% du prix du litre du gasoil, et sous l’hypothèse du maintien du rythme mensuel actuel d’évolution des prix, le taux d’inflation de 2023 pourrait se situer au-delà de 6% ».
Cette projection de l’INS est plus pessimiste que celle faite par le Fonds monétaire international (FMI), au terme de la récente revue de son programme économique et financier triennal avec le Cameroun, qui s’est déroulée du 5 au 18 janvier 2023 à Yaoundé. Selon cette institution de Bretton Woods, qui a publié un communiqué officiel le 30 janvier 2023, le taux d’inflation au Cameroun devrait se situer à 6% en 2023.
Cette prévision du FMI double elle-même les 3% projetés sur la même période par le gouvernement, dans la loi de Finances 2023 de l’Etat. En tout état de cause, alors que l’Etat annonce que les poussées inflationnistes au Cameroun devraient se stabiliser à 3%, soit le seuil admis dans les critères de surveillance multilatérale de la Cemac, l’INS et le FMI, de leurs côtés, soutiennent que le niveau d’augmentation des prix dans les marchés du pays en 2023 représentera deux fois les 3% tolérés dans la Cemac.
Une prévision plus alarmiste qui tend à être accréditée par la réalité sur le terrain. En effet, après l’augmentation des prix des carburants, suivie d’une modique hausse des salaires dans la Fonction publique de 5,2%, dont l’impact sur le pouvoir d’achat des ménages devrait être très limité, le gouvernement vient de concéder aux transporteurs des augmentations allant de 15% à 25% sur les tarifs du transport urbain et interurbain.
Cette revalorisation des coûts devrait impacter les prix des produits agricoles et manufacturiers sur le marché local. Ceci dans la mesure où le transport est une composante essentielle de la structure des prix finaux aux consommateurs, au même titre que l’énergie, dont les tarifs ont également été revus à la hausse depuis janvier 2023.
Il s’agit concrètement de l’électricité, dont l’Agence de régulation du secteur de l’électricité a décidé d’augmenter les tarifs des entreprises depuis le début de l’année, et du gaz naturel généralement utilisé par les entreprises en remplacement de l’électricité, qui, depuis le 1er janvier 2023, est assujetti à la taxe spéciale sur les produits pétroliers, à raison de 70 FCFA le mètre cube consommé.
A tous ces éléments qui contribuent à amenuiser le pouvoir d’achat des populations, si l’on ajoute la décision prise par le gouvernement d’augmenter de 50% le prix du timbre fiscal dans la loi de finances 2023, il est très peu probable que le taux d’inflation au Cameroun en 2023 soit en dessous des 4,6% enregistrés en 2022, comme tend à le faire croire le gouvernement. Même dans la Cemac, communauté à laquelle appartient le Cameroun, et qui paye les frais de la conjoncture internationale marquée par la persistance du conflit entre la Russie et l’Ukraine, le taux d’inflation en 2023 est projeté à 4,8%.