Le 31 décembre 2008, Ephraïm Inoni, alors Premier ministre (Pm), rend public un décret fixant les conditions et les modalités d’exploitation à titre onéreux des motocycles appelés moto-taxis. Ledit décret précise que ces engins affectés au transport public des personnes doivent circuler uniquement dans les zones périphériques des grandes villes, ainsi que dans les zones rurales. Neuf ans
après la signature de ce texte qui visait à limiter les dérapages causés par ce mode de transport, rien n’a changé dans la capitale économique. L’opération d’identification des conducteurs de moto lancée depuis lors piétine et les motos circulent toujours dans les centres urbains, bravant impunément toutes les interdictions.
Moto-taxi : Comme la pierre de Sisyphe
La ville de Douala est otage des engins à deux roues, malgré les tentatives d’assainissement du secteur.
Ala salle des fêtes d’Akwa à Douala, le mercredi 27 novembre 2017, plusieurs centaines de conducteurs de moto-taxi assistent à la première édition du séminaire annuel de sensibilisation des moto-taximen. A l’issue de cette rencontre de communication sur la nécessité de se faire identifier, des chasubles de différentes couleurs leur sont remises, en fonction de leurs arrondissements. Après les avoir arborées, ces conducteurs d’engins à deux roues reprennent leur guidon pour servir des usagers.Pourtant, en parcourant les artères de la ville de Douala, il est difficile d’apercevoir un « moto-taximan » dans cette tenue floquée d’un numéro et de l’identité de la commune de résidence du « conducteur de moto », pour obéir au décret du Premier ministre (Pm) du 31 décembre 2008.
Le décret signé d’Ephraïm Inoni « fixe les conditions et les modalités d’exploitation à titre onéreux des motocycles appelés « moto-taxis » affectés au transport des personnes dans les zones périphériques et rurales ». L’article 4 de ce texte prévoit que l’accès à la profession de moto-taximan est subordonnée à « l’obtention d’une licence spéciale de transport de catégorie S2 et d’une carte de transport public routier ; l’inscription au registre des transporteurs par moto; la détention d’un certificat de visite technique en cours de validité ; la détention d’une police d’assurance en cours de validité délivrée par une compagnie d’assurance agréée ; l’acquittement du droit de timbre automobile (vignette) ; l’acquittement de l’impôt libératoire ».
Neuf ans plus tard, rien n’a changé dans le secteur des mototaxis exerçant dans la capitale économique. L’identification des mototaxis exigée par ce décret piétine, comme Sisyphe, ce personnage de la mythologie grecque, roulant sans cesse sa pierre sur une montagne. Depuis lors, on constate que 1049 motos (seulement) ont été identifiées dans les cinq arrondissements que compte le département du Wouri (196 à Douala 1er, 197 à Douala 2ème, 344 à Douala 3ème, 93 à Douala 4ème, 219 à Douala 5ème). A en croire le secrétaire général du Syndicat des exploitants des motaxis, Georges Bédimé, il y a quelques années déjà que Nasséri Paul Béa, alors préfet du département du Wouri, a mis sur pied un bureau exécutif pour faire appliquer les dispositions de ce décret. Une feuille de route a par la suite été transmise aux autorités telles que les maires, les sous-préfets et le délégué du gouvernement. Mais, les propositions faites à ces derniers n’ont pas été prises en compte, tout comme le soutien matériel et financier dont avait besoin ledit bureau exécutif pour son fonctionnement.
Zones périphériques
Autant que l’identification, les autres aspects dudit décret tardent à être mis en œuvre. Il en est ainsi de la délimitation des zones périphériques. Toutes les réunions convoquées et présidées par l’ancien préfet du Wouri, Bernard Okalia Bilaï, et tendant à délimiter les zones périphériques, ont échoué. Les différents acteurs n’ont pas pu s’accorder. Au contraire, certaines réunions s’achevaient en queue de poisson. Le délai de six mois [1er juillet 2009, Ndlr] à compter de la date de signature du décret du 31 décembre 2008 donné aux conducteurs de moto-taxis par l’ex-préfet Bernard Okalia Bilaï pour se mettre en règle et avoir toutes les pièces exigées, ainsi que le permis de catégorie A n’a pas été respecté.
Les contrôles mixtes de police et gendarmerie effectués à partir de cette date pour contraindre les moto-taxis pour se conformer n’ont pas abouti. Au cours d’une réunion en date du 02 février 2010, Bernard Okalia Bilaï indiquait qu’il revenait aux maires de délimiter les zones périphériques. Tandis que pour le délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Douala (Cud), Fritz Ntonè Ntonè, l’application de ce décret qui est un long processus, « Aucun changement n’est possible tant que les problèmes de signalisation de parking, de délimitation des rues ne sont pas résolus. Avant de délimiter leur zone de circulation, il faut s’assurer que les autres zones seront couvertes pas d’autres modes alternatifs de transport», expliquait-il.
Cependant, les quartiers Bonanjo, Bonapriso et Bali ont été interdits d’accès aux mototaxis. Les «bend-skineurs » continuent de circuler sans plaque d’immatriculation, ni casque ou pièce de l’engin, encore moins leur pièce d’identité personnelle. Pourtant, les zones de relais et les têtes de ligne (lieu où les conducteurs de motos doivent attendre les clients, ndlr) avaient déjà été désignées, tout comme les zones interdites d’accès aux conducteurs de moto-taxi. D’après ce décret, chaque moto est confinée dans son arrondissement où des couleurs ont été choisies (bleu pour Douala 1er, marron pour Douala 2ème, jaune à Douala 3ème, rouge à Douala 4ème, vert et violet à Douala 5ème et 6ème). Malgré cela, les « moto-taximen » ont choisi le maquis.