Charles Moukoko Njoh a été nommé vendredi dernier directeur général par intérim de l’entreprise en remplacement d’Emmanuel Etoundi Oyono, absent de son poste depuis le 21 septembre.
Le conseil d’administration du Port autonome de Douala (Pad) a finalement trouvé une solution à ce qui s’apparentait déjà à une vacance à la direction générale de cette entreprise parapublique qui assure 95% des échanges commerciaux du Cameroun. Réunis en session extraordinaire le 11 décembre à Yaoundé, les membres de cette instance ont désigné Charles Michaux Moukoko Njoh, jusque-là directeur général adjoint du Pad, pour diriger l’entreprise pour une période intérimaire de six mois. Le conseil d’administration a cependant « verrouillé » la marge de manoeuvre du nouveau dirigeant.
Sur le plan financier, notamment. Toute décision prise en ce sens devra être cosignée par le directeur général et le directeur des ressources humaines. Par ailleurs, au cours de son intérim, les licenciements du personnel lui sont proscrits, tout comme les recrutements. Le Port autonome de Douala emploie aujourd’hui près de 1000 employés, majoritairement des cadres. Toutefois, indiquent les sources du Jour au Pad, le directeur général par intérim peut, en cas d’urgence, solliciter l’accord du conseil de l’administration. Charles Moukoko Njoh succède à Emmanuel Etoundi Oyono. Ce dernier avait quitté le Cameroun depuis le 21 septembre à la tête d’une délégation du Pad, à destination d’Amsterdam, officiellement pour réceptionner un navire de servitude multifonctionnel appelé pilotine, que le Pad avait commandé. Sauf qu’au terme de la mission à laquelle il n’aurait d’ailleurs pas pris part selon d’autres sources, il avait rallongé son séjour à l’étranger, pour des raisons sanitaires à en croire ses proches, tandis que d’autres membres de la délégation, à l’instar du directeur des ressources humaines, ou de Louis Paul Motaze, alors secrétaire général des services du Premier ministre, regagnaient le bercail. C’est alors que des langues se sont déliées.
Pour spéculer sur les intentions de fuite d’un dirigeant rattrapé par des procédures judiciaires pendantes devant les tribunaux. Contacté hier après-midi, un haut responsable du Pad a confié au Jour que la décision du conseil d’administration a été accueillie sans aucune surprise. Il se réfère notamment aux qualités managériales du nouveau promu. « Charles Moukoko Njoh connait personnellement 40 à 50% du personnel de la société, y compris leurs noms. Chaque fois qu’il doit présider une réunion, il demande à chaque directeur d’y inviter ses proches collaborateurs camer.be, et de laisser ceux-ci s’exprimer afin qu’il sache de quoi chacun est capable », explique un syndicaliste. Son confinement au « placard », au temps où il était Dga, les « humiliations qu’il a subies de la part de certains collaborateurs réputés très proches du directeur général sortant », ne lui ont pas permis, hélas, de donner la plein mesure de ses compétences, d’après nos sources.
Sapeur-pompier
En sept ans, Charles Moukoko Njoh est le troisième directeur général du Pad. Sauf que le contexte de sa nomination n’est pas le même que celui de ses prédécesseurs. En 2012, Emmanuel Etoundi Oyono, qui avait déjà dirigé l’entreprise jusqu’en 2008, avait été rappelé en « sapeurpompier » pour sauver une société au bord de l’implosion. Le personnel, par la voix du Syndicat national des employés des ports du Cameroun (Snep), avait paralysé le fonctionnement de l’entreprise pendant près de quatre jours, faisant perdre à celle-ci des dizaines de milliards de F cfa. Ils reprochaient à la direction de l’entreprise et aux membres du conseil d’administration de s’être arrogé de gros avantages, tout en supprimant des primes accordées au personnel lors du premier passage d’Etoundi Oyono à la tête de cette entreprise, entre autres.
Le 28 mars 2012, au cours de l’installation d’Etoundi Oyono, le ministre des Transports d’alors, Robert Nkili, avait décrié les « égarements managériaux » de son prédécesseur Dayas Mounoume, en fuite depuis quelques mois, selon certains confrères. Il notait qu’« un climat flou s’est installé sur ce fleuron de l’économie nationale qu’est le Port de Douala ». Et comme pour exorciser le mal, Robert Nkili avait inscrit dans la feuille de route d’Etoundi Oyono la lutte contre la passation de marchés de gré à gré, le gain illicite, la corruption et les détournements de deniers publics. Il prescrivait en outre d’assainir la gestion du patrimoine immobilier du port et la suppression de certains avantages financiers officiels dus aux hauts cadres. Ces chantiers et bien d’autres sont désormais sur la table du nouveau directeur général par intérim.