L’Opération Épervier, vaste campagne anti-corruption au Cameroun, a emporté dans son sillage de nombreux hauts fonctionnaires, parmi lesquels Urbain Olanguena Awono, ancien ministre de la Santé. Depuis 2008, cet homme autrefois puissant, reconnu pour son dévouement au service public, est emprisonné pour des accusations de détournement de fonds publics, en lien avec des programmes de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose.
En août 2012, Urbain Olanguena Awono a été condamné à 20 ans de prison. Pourtant, au fil des procès, les chefs d’accusation contre lui se sont affaiblis, tout comme les sommes présumées détournées. Initialement accusé d'avoir soustrait 8,5 milliards de F CFA, il fait aujourd'hui face à deux accusations restantes : un détournement de 11,2 millions de F CFA concernant le financement de son livre *Le Sida en terre d'Afrique*, dont les droits d'auteur avaient pourtant été reversés au Comité national de lutte contre le sida, et un autre de 80,9 millions de F CFA lié à la fourniture de moustiquaires imprégnées.
Malgré l'érosion des accusations, Olanguena continue de purger sa peine dans l’indifférence générale. Le 31 mars 2024 marquera son 17ème anniversaire d’incarcération. Dans une déclaration poignante, il qualifie son emprisonnement d'« assassinat judiciaire ». Selon lui, il est victime d'un système judiciaire corrompu et manipulé, où des accusations mensongères ont été orchestrées pour briser sa carrière et son avenir.
« Mon cher pays, que j’ai servi avec un dévouement et une intégrité incontestables, m’a trahi. Aucune preuve n’a été établie contre moi selon les exigences de la loi. Je n’ai détourné aucun centime de l’État du Cameroun », clame l'ex-ministre. Il dénonce une justice qui a inventé la notion de « détournement par assimilation » pour justifier sa condamnation, et un acharnement judiciaire qui persiste avec un troisième procès, qu’il juge surréaliste.
Olanguena n'est pas le seul à se considérer comme une victime d’un système injuste. De nombreux hauts responsables camerounais, eux aussi emprisonnés dans le cadre de l'Opération Épervier, dénoncent ce qu'ils perçoivent comme une purge politique déguisée en lutte contre la corruption. Certains estiment que ces arrestations sont dirigées contre ceux qui seraient soupçonnés de viser des postes plus élevés au sein de l'appareil d'État.
Face à ce qu'il décrit comme un « immense gâchis », Olanguena plaide pour un retour à la raison, une réconciliation nationale et un apaisement des tensions pour préserver l'avenir du Cameroun. Il appelle à un processus de décrispation guidé par le pardon, afin d'éviter que la nation ne se fragmente davantage.
Pour Urbain Olanguena Awono, la justice finira par triompher. « La vérité triomphe toujours », conclut-il, convaincu que son combat n’est pas vain et que l’espoir d’une société camerounaise plus juste n’est pas une utopie.