C’est le constat amer fait par le ministre des Marchés publics, dans un communiqué récemment rendu public. Au Cameroun, s’il y a un domaine qui a fait perdre des ressources financières au budget de l’Etat, empêchant du coup à l’autorité publique de réaliser son plan de développement, c’est bien celui des marchés publics. Un secteur où, depuis des lustres, copains et coquins se taillent la part du lion, dans l’acquisition des marchés publics.
Au final, un constat désastreux, entièrement à l’opposé des attentes des populations. Il y a quelques années, un rapport de la Commission nationale anti corruption (Conac), avait épinglé plusieurs sociétés et autres gestionnaires publics, sur le terrain très juteux et sensible des marchés publics, certains ayant été accordés en violation des procédures en vigueur, s’agissant de leur attribution.
Consommation des délais
Sur le plan pratique, la création en 2011, d’un ministère en charge des Marchés publics, bien que se greffant à l’existence de l’Agence de régulation des marchés publics, a encore donné de l’espoir quant à la possibilité d’assainir ce domaine qui continue à faire couler beaucoup d’encre et de salive. Tellement les convoitises et les enjeux sont énormes.
La dernière sortie du ministre délégué à la Présidence chargé des Marchés publics, Abba Sadou, est encore venu réveiller l’opinion publique et les acteurs du système sur le fait « qu’une évaluation récente de l’exécution des marchés publics a donné de relever un certain nombre de manquements graves ».
On peut citer entres autres, des taux de consommation des délais se situant parfois au-delà de 500%, des projets complètement à l’arrêt, des chantiers carrément abandonnés et plus grave encore, des marchés n’ayant jamais connu un commencement d’exécution.
Défaillance des prestataires
Au terme de la même évaluation, il a été rendu publique, la liste des entreprises titulaires desdits marchés. « Ces manquements et insuffisances, nonobstant leur proportion encore marginale par rapport aux taux d’exécution pour les exercices concernés, ne peuvent manquer d’affecter la performance globale du système », rappelle le communiqué du ministre.
En attenant l’assainissement promis, les entreprises défaillantes sont menacées d’exclusion de la commande publique pendant une période de deux ans. Pour l’heure, il faut retenir qu’au cours des exercices 2013 et 2014, 146 marchés publics ont été abandonnés ou connaissent un retard considérable dans l’exécution.
Pourtant, c’est chaque année que l’on décrie la sous consommation du budget d’investissement public. Ce qui affecte la croissance et se pose comme un frein à l’émergence souhaitée, et dont l’exigence est si bien réitérée à la moindre occasion par les pouvoirs publics.
Comment comprendre que pour la fourniture de sept photocopieuses à la délégation régionale de l’Education de base de l’Est, l’on soit à un délai consommé d’un ratio astronomique de 1385,71%, pour un taux d’exécution bien sûr de 0 %.
D’autres cas de figures se présentent à travers les dix régions du Cameroun : travaux en cours d’exécution dont les crédits sont « tombés dans le clos », projet en arrêt pour défaillance du prestataire, chantier abandonné, etc. Et les domaines d’intervention concernent les secteurs aussi névralgiques que la santé, l’éducation, l’hydraulique villageoise, la construction des édifices publics, la fourniture en matériels didactiques, la construction.
Bref, tout ce qu’il faut pour améliorer les conditions de vie des populations. Une volonté politique pourtant freinée par des prestataires véreux qui du reste bénéficient d’une complicité tacite d’une certaine caste de fonctionnaires. Au-delà des sanctions administratives, il est souhaitable que des sanctions pénales leur soient appliquées avec une certaine rigueur