Que ce soit sur l’axe Bafoussam-Yaoundé-Douala ou encore l’axe Ngaoundéré-Kousséri… le Cameroun a mal à ses routes tantôt jonchées de nids de poule tantôt envahies par la broussaille. Le boycott désormais au programme
Il serait difficile de déterminer le nombre exact de personnes ayant perdu la vie suite à un accident de la route sur l’axe Bafoussam-Yaoundé-Douala vulgairement appelé «le triangle de la mort» ou encore sur les autres axes routiers du Cameroun. Dans l’ensemble, le pays a mal à ses routes. En cas d’accidents, la responsabilité des chauffeurs est de prime à bord mise en cause. Et pourtant au-delà de ce facteur, le mauvais état des routes est la cause primordiale des drames qui se multiplient sur les routes.
Tel est l’argument évoqué par des usagers interrogés dans les agences de voyages à Douala. Chauffeurs, moto boy, voyageurs et même les camionneurs accordent leurs violons : « la dégradation des routes surtout dans l’arrière-pays se manifeste, entre autres, par des couches de latérite enlevées et le torrent qui creuse des ravines et des crevasses sur la chaussée, cela à cause de l’eau des rigoles et des accotements qui se déversent sur la chaussée ». Et d’ajouter : «cette dernière envahie par la broussaille a pour conséquence la réduction de la visibilité et les risques d’accidents y relatifs. La chaussée est inondée par les eaux ou par des nids de poules, ravines, ornières. Ces dégâts entraînent souvent des coupures de routes».
Tous ceux avec qui La Nouvelle Expression a échangé, indiquent : «6% des routes en terre classées sont en bon état ; 21% sont en état normal ; 70% sont en état médiocre et 3% sont en mauvais état. Quant aux routes rurales, elles sont pour la plupart en état médiocre ou mauvais ». Toutes choses qui font dire à ces compatriotes que : « quatre cinquièmes du réseau de routes en terre nécessitent un entretien urgent, car les interventions faites jusqu’à ce jour ne permettent pas de garantir un niveau de service optimal et le réseau continue de se dégrader progressivement. Le linéaire en mauvais état s’est d’ailleurs accru ces dernières années ».
Pour beaucoup, les investissements sur le secteur routier sont à la traîne depuis quelques décennies. Cela contrairement à la période de croissance des années 80 où le pays s’est doté d’infrastructures routières à la faveur d’une politique d’investissements intensifs consécutifs aux plans quinquennaux. Or, « compte tenu de ce constat lamentable, nous pensions que l’argent que procure les postes de péage devaient servir à l’entretien des routes. Ce n’est point le cas. Et pourtant, tous, nous sommes contraints à verser 500 Fcfa à chaque poste», se plaignent des transporteurs.
La loi sur le péage routier bafouée
Le péage est un droit que l'on doit acquitter pour franchir un passage ou emprunter un ouvrage d'art. Il peut s'appliquer aux personnes, aux véhicules, ou aux marchandises transportées. Le terme désigne aussi dans le langage courant le poste de péage (ou barrière de péage) dans lequel ce droit est perçu. À l'origine, le «péage» ne concerne qu'un « passage à pied» car l'étymon provient du latin pes, pedis, le pied. En particulier, l'ancien français péage attesté en 1190 est issu du latin populaire pedaticum, qui est le droit de mettre le pied. Le terme impliquait originellement le piéton, et non le verbe «payer».
Actuellement mais aussi très tôt, avant le XIIe siècle, il est associé à l'idée de droit de passage payant, quel que soit le moyen de transport. Dans ce sillage, et selon la loi 07 avril 1996 portant protection du patrimoine routier national, le péage constitue l’une des taxes parmi tant d’autres du secteur routier. Il y a, entre autres, le pesage routier, la taxe à l’essieu, la redevance d’usage de la route, les pénalités et amendes administratives issues de la lutte contre les fraudes dans ce secteur. Plusieurs administrations sont ainsi impliquées dans le suivi fiscal et la sécurisation des recettes générées par l’usage de la route (Impôt, Douanes, Cisopr, Cisop, etc.).
Selon ledit texte, le circuit qu’empruntent les ressources du péage est clair : les péagistes collectent sur le terrain et périodiquement le chef de poste reverse l’argent collecté à la perception la plus proche, contre quittance. Ces recettes sont déposées dans le compte du Fonds routier logé à la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) par l’entremise de l’Agence comptable centrale du Trésor (Acct). Elles sont destinées à l’entretien courant et périodique du réseau prioritaire urbain, interurbain et rural, l’entretien des voiries urbaines prioritaires, à la réhabilitation des routes, au renforcement de la chaussée, à l’amélioration ou à la modernisation d’un itinéraire. Ce qui n’est point le cas au Cameroun.
« Chaque jour, on donne 500 francs à chaque poste, ça sert même à quoi ? Où va l’argent ? Seul l’Etat peut répondre à ces questions. Il semble par ailleurs que certains postes de péage ont été privatisés ? Est-ce normal dans un pays ? Malheureusement, les conséquences liées aux mauvaises routes qui entraînent des accidents de la circulation touchent le bas peuple», avancent en colère des usagers de la route.