Face au phénomène d’annulations répétées des titres fonciers et des atteintes du domaine privé de l’Etat, le président de la République a énergiquement décidé de siffler la fin de la récréation. Voici pourquoi.
Depuis la défunte ministre Jacqueline Koung à Bessike, le scandale couvait au ministère du Domaine, du cadastre et des affaires foncières (Mindcaf). Ce département ministériel discutait le peloton de tête de la corruption dans l’Etat. L’incertitude entourait la valeur du titre foncier réputé intangible, inattaquable et définitif. L’arrivée d’un haut commis de l’Etat réputé fine fleur de l’administration camerounaise, séminariste intègre parmi les plus intègres a redonné espoir aux particuliers et aux investisseurs qui pensaient sortir de l’insécurité juridique et judiciaire des actes posés par leur ministère de tutelle. Malheureusement, depuis près de 4 ans, plus personne en tant qu’individu, ni même l’Etat, ne peut dire avec certitude quelles sont les limites de la propriété privée réputée sacrée selon les principes constitutionnels. Dans presque toutes les régions du Cameroun, s’élèvent comme la flamme d’un volcan, des plaintes à n’en point finir sur la violation répétée du droit de propriété par le Mindcaf. Les collectivités coutumières sont dépossédées de leurs terres, le domaine privé de l’Etat est spolié, les particuliers sont abusés. Tous victimes des arrêtés d’un même département ministériel, arrêtés sans cohérence et dépourvus d’assise juridique. Un même titre foncier par exemple peut ainsi être annulé 8 fois et réhabilité 8 fois par le même ministre. On se croirait dans une véritable vente aux enchères où les arrêtés sont signés au gré du plus offrant. Face à tout ce désordre foncier, occasionné par le mépris systématique de la loi du fait de certains fonctionnaires véreux du Mindcaf, l’Etat a fini par perdre sa crédibilité. Le titre foncier qui est par essence un outil de développement a perdu de sa valeur. Les banques refusent désormais d’accompagner les investisseurs sur la base d’un titre foncier qui reste quand même une garantie universelle. Ce phénomène, susceptible d’engendrer des remous sociaux a amené le chef de l’Etat à créer une commission d’enquête mixte police/gendarmerie. C’est ce qui ressort dans une correspondance du ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence de la République datée du 23 juillet 2024, et adressée au secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Défense, chargé de la gendarmerie nationale. « J’ai l’honneur de vous répercuter les très hautes instructions de Monsieur le président de la République prescrivant de mettre sur pied, de toute urgence, une commission mixte Sed/Gn-Dgsn, à l’effet d’enquêter en profondeur et d’établir les responsabilités des différents acteurs impliqués dans la spoliation du domaine privé de l’Etat et les atteintes à la propriété foncière des particuliers, au cours de la période 2020-2024.
VISA PREALABLE
En ce qui concerne par exemple les biens des citoyens, notamment la British american tobacco (Bat), le chef de l’Etat a d’emblée tranché en ordonnant au Mindcaf de rapporter ses arrêtés de préemption sur un bien privé. S’agissant des particuliers nationaux, qui ont acquis des terrains auprès de la Mission d’aménagement et d’équipement des terrains urbains et ruraux (Maetur) par acte notarié, depuis plus de 20 ans, le problème reste entier. Selon certains observateurs, il y a bon espoir que les conclusions des travaux de la commission mixte et impartiale aboutiront au rétablissement des titres fonciers indument annulés. Cette reconnaissance du bon droit des particuliers permettra de redorer le blason de la Maetur, organe de l’Etat réputé pour la sécurité foncière. C’est l’occasion d’affirmer, contrairement aux idées répandues que les hautes instructions du chef de l’Etat émaneraient du Sgpr. En guise de rappel, depuis bientôt 3 ans, à travers le ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence de la République, le chef de l’Etat avait intimé l’ordre au Mindcaf de ne plus poser des actes sur le domaine privé de l’Etat, sans le visa préalable de la présidence de la République. Ceci, à la suite de la spoliation des domaines de l’Irad. Le 12 février 2021 en effet, Ferdinand Ngoh Ngoh avait déjà saisi, à travers une correspondance dans laquelle il indique ceci : « D’ordre de monsieur le président de la République, j’ai l’honneur de vous répercuter ses hautes instructions demandant que toutes les ventes ou attributions relevant du domaine privé de l’Etat, quelle que soit la superficie concernée, soient revêtues de son très haut accord formel, sous peine de nullité ». Selon des sources dignes de foi, quelques jours seulement après la mise sur pied de la commission Sed-Dgsn par le chef de l’Etat, le Mindcaf redoute des actes de vandalisme de certains de ses proches collaborateurs. Dans une correspondance adressée le 14 août dernier aux délégués régionaux du ministère des Domaines, du cadastre et des affaires foncières de son département ministériel, Henri Eyebe Ayissi écrit : « J’ai l’honneur de vous prescrire de prendre, sans délai, des mesures spéciales de sécurité, notamment à travers des vigiles, pour protéger tous les bâtiments abritant vos services respectifs, principalement ceux concernés par cette enquête, et ceci pendant toute la période des travaux de ladite commission ». Allez donc savoir ce qui se passe dans le fond.