Un "comptoir commercial" sera ouvert en 2016 à Douala, la métropole économique camerounaise, et une ligne aérienne d'Air Algérie établie par la même occasion pour permettre un accroissement des échanges commerciaux pour le moment faibles avec le Cameroun, a annoncé mercredi l'ambassadeur d'Algérie nouvellement accrédité à Yaoundé, Merzak Bedjaoui.
C'est une décision importante qui démontre la volonté aujourd'hui affichée par les pouvoirs publics et les milieux d'affaires algériens de donner du tonus à leurs relations économiques connues pour être, à quelques exceptions près, marginales avec les pays d'Afrique subsaharienne, en dépit du discours officiel par lequel Alger proclame tout le temps une grande sensibilité envers cette partie du continent.
Avec le Cameroun effectivement, "le niveau de ces relations économiques est faible ; il n'est pas à la hauteur de nos relations politiques [qualifiées d'excellentes par les deux pays]. Nous allons les relancer", a souligné le diplomate algérien dans un entretien avec Xinhua à l'occasion de la fête du 61e anniversaire du déclenchement de la révolution du 1er novembre 2954, mercredi soir à Yaoundé.
Première économie de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC), composée en outre de la Centrafrique, du Congo-Brazzaville, du Gabon, de la Guinée équatoriale et du Tchad, le Cameroun représente pourtant une terre d'opportunités, en raison de son sol et de son sous-sol riches en ressources naturelles.
Ce potentiel n'échappe d'ailleurs pas à Merzak Bedjaoui qui, depuis son arrivée en mars, fait montre d'une diplomatique économique offensive, destinée à permettre aux entreprises algériennes de prendre position dans ce pays "ami" où émerge un marché concurrentiel marqué, en dehors des grandes puissances mondiales, par une présence croissante de la Tunisie, autre pays d'Afrique du Nord.
Comme pour rattraper le retard, "le Cameroun a été a été retenu par l'Algérie comme un pays pivot dans la région CEMAC et donc ce que nous avons comme "feuille de route" économique, c'est l'organisation de Journées de partenariat économique. La date n'a pas été fixée définitivement, mais ça va se passer autour du mois d'avril", révèle le diplomate.
Fin octobre déjà, la capitale camerounaise a accueilli plus d'une douzaine d'entreprises algériennes dans le cadre d'une foire commerciale comportant à l'affiche des marques de grands groupes industriels dans les domaines pharmaceutique, de l'électroménager, de l'agroalimentaire ou encore de l'énergie solaire.
"Il y aura un "show room" autour du mois de janvier. Donc, il y aura d'autres entreprises algériennes qui vont venir exposer ici leurs produits", promet l'ambassadeur Merzak Bedjaoui.
"Nous avons également, poursuit-il, le pavillon national maritime, parce que nous sommes en train d'acquérir de nouveaux cargos pour pouvoir transporter nos propres marchandises. Parce qu'un pays qui ne transporte pas au moins 50% des marchandises qu'il importe ou qu'il exporte, un problème d'ordre stratégique forcément se posera pour lui".
L'ouverture d'un "comptoir commercial" en 2016 à Douala accompagnée de l'établissement de liaisons aériennes par le biais d'Air Algérie, la compagnie nationale, entre Alger, Douala et Yaoundé viendra couronner cette nouvelle option de la politique étrangère algérienne relative à l'Afrique subsaharienne.
Pour le cas du Cameroun, cette politique prévoit l'activation d'une commission mixte de coopération et la révision d'anciens accords conclus dans les années 1980.
"Nous avons déjà, explique M. Bedjaoui, un comptoir commercial au Sénégal et ça marche très bien. Nous venons de mettre en place un comptoir commercial à Abidjan et nous avons recensé 500 entreprises ivoiriennes. Ce que nous souhaitons, c'est de faire également la même chose à Douala". Cette opération est matérialisée par la mise en place d'un conseil d'affaires. "Du côté algérien, les entreprises sont là. Celui qui est à la tête de ce conseil d'affaires du côté algérien, c'est un très grand entrepreneur, qui fabrique de la colle. Malheureusement du côté camerounais, il nous est un peu difficile de trouver des vis-à-vis", déplore cependant le diplomate.
"Toute la difficulté que j'ai rencontrée, précise-t-il, c'est d'avoir une liste aussi large que possible, exhaustive des opérateurs économiques, quel que soit le domaine où ils travaillent et je leur trouverai des vis-à-vis algériens."
Pourtant, la partie algérienne annonce quant à elle avoir dressé une liste de seize filières pour sa coopération économique avec le Cameroun, pays pour lequel elle ne fait pas mystère de son intérêt pour des matières premières de grande importance comme le café, le coton, la banane, le poivre blanc labellisé de Penja ou encore le cuir.
Pour Merzak Bedjoaui, "par exemple, au lieu d'aller acheter la banane par l'intermédiaire d'entreprises qui sont situées en Europe, on préfère traiter directement avec le producteur camerounais. Ce sera pareil pour le café et le coton". Dans le sens inverse, le savoir-faire algérien en matière de fabrication de médicaments, de produits cosmétiques et des panneaux solaires est mis en avant. A titre d'exemple, "l'Algérie produit aujourd'hui plus de 300 gammes de médicaments. D'ici à l'année prochaine on va dépasser aisément les 600. Il y a une usine qui vient d'être terminée et qui produit à elle seule 600 millions d'unités".
"L'insuline par exemple qui est fabriquée en Algérie, moi j'ai vu les prix affichés dans les pharmacies ; c'est cinq fois plus cher par rapport à l'Algérie. Tout ce qui est vendu dans les grandes surfaces, dans les supermarchés, je peux vous assurer qu'il peut être aisément remplacé par les produits algériens, à des prix qui défient toute concurrence et d'excellente qualité", vante le diplomate algérien.