En nette rupture avec la langue de bois fort caractéristique de l’univers diplomatique, le représentant de la Bad au Cameroun n’a pas cherché midi à quatorze heures pour relever les pesanteurs qui minent une mise en œuvre rationnelle et efficiente des projets d’investissement au pays.
S’appuyant dit-il sur le rapport de l’année budgétaire 2014 du Minepat, Racine Kane relève que seule la moitié des projets d’investissement, ont rempli les critères de maturité.
« L’examen des projets d’investissement ministériels 2014-2016 laisse apparaître une forte disparité des taux de maturité par secteur allant de 95, 4% pour le ministère des Travaux publics (Mintp), et 06% pour la Cour suprême. Seulement, au vu des retards d’exécution des projets d’infrastructures, de la qualité observés, on se demande si ce taux de maturité attribué au Mintp, est vraiment sincère », argue le haut fonctionnaire de la Bad. Goulot d’étranglement.
Toujours selon le représentant de la Bad au Cameroun, quatre facteurs constituent l’entrave à la bonne exécution des projets d’investissement au Cameroun : le cadre institutionnel et réglementaire, les capacités humaines, les outils de travail et les capacités financières. Pour ce qui est du premier grief, Racine Kane parle de la division du travail tant au niveau sectoriel que transversal.
« L’on peut observer ça et là, une multiplicité et un chevauchement des rôles dans les structures. Il faudrait, aller vers la définition des fonctions des uns et des autres, savoir qui, est chargé du suivi, de l’évaluation, et de la gestion des fonds des projets », propose le Sénégalais. Toutes choses que, selon lui, on retrouve dans toutes les économies qui ont fait des progrès dans la maturation des projets d’investissement.
Propositions.
Soucieux d’une critique constructiviste, racine Kane suggère que les guides méthodologiques soient plus accessibles aux parties prenantes des projets d’investissement. Cela selon lui, passe par une informatisation fiable des banques des projets. « Banque des projets au niveau des ministères techniques, des communes- projets d’initiative communale. Qu’on ait aussi au niveau du Minepat, un service de synthèse des différentes banques de données », argue le représentant résident de la Bad au Cameroun. Plus loin,
l’exposé de l’économiste qui prétend que bien de projets au pays sont inadaptés aux besoins des populations, ce qui, induit à un faible entrainement des investissements économiques, exhorte le Minepat à faire une évaluation ex-ante des projets – comment se comportent-ils financièrement.
« Parce que poursuit-il, les projets présentés au Minepat, sont des projets qui donnent des travaux, produisent des biens et des services. Mais, ce ne sont là que des éléments non marchands ; l’offre financière elle, n’est pas toujours pertinente. Aussi, le Minepat doit-il toujours faire l’évaluation économique du projet d’investissement.
Toujours dans sa plaidoirie ressortissant à la maturation des projets d’investissement, Racine Kane a conseillé au parterre des 70 personnels du Minepat qui prenaient part aux travaux achevés hier, d’intégrer la notion de développement participatif, laquelle veut que les partenaires technique et financier ne soient pas les seuls à décider.
Dans sa liturgie de propositions, le fonctionnaire de la Bad insiste sur la redéfinition et la clarification des fonctions de chaque maillon de la chaine des projets d’investissement : Minepat, ministère des Marchés publics, ministère des Finances, ainsi que des maitres d’ouvrage.
Quant aux capacités humaines, Racine Kane suggère le renforcement des capacités des personnels du Minepat en calculs économiques, auquel il faut adjoindre une programmation efficiente des ressources financières. « Il faut que seuls les projets ayant été jugés matures, soient budgétisés en mode exécution, et tous les autres, budgétisés en mode maturation.
Avant ce processus, 70 à 80% de projets d’investissement, pourraient être exécutés par exercice budgétaire », dira enfin le représentant résident de la Bad au Cameroun.
Présidant l’atelier de renforcement des capacités des personnels du Minepat qui s’est achevé hier à Yaoundé, Emmanuel Nganou Djoumessi, lui lancera à la presse que « l’urgence s’explique par le fait que le taux d’exécution des projets d’investissement public a certes une amélioration mais une amélioration insuffisante ».
Et de poursuivre : « il faudrait que nous exécutions nos budgets d’investissement public à hauteur de 100%. Mais il se trouve qu’un certain nombre de projets… ne peuvent pas être exécutés à cause de certains manquements, par exemple, quelqu’un qui veut construire une salle de classe, et n’a pas de terrain ».