Le milliardaire nigérian a indiqué mardi à Yaoundé que le meilleur moyen d’attirer des investisseurs, c’est d’avoir un secteur privé local fort.
Même dans les fora, Tony Elumelu ne transige pas sur sa philosophie: l’Afrique doit d’abord compter sur elle pour son développement. Le milliardaire nigérian, président de United Bank for Africa (UBA), l’a rappelé mardi matin à Yaoundé, en présence du chef d’Etat camerounais, à l’ouverture de la conférence internationale “Investir au Cameroun”; conférence pour laquelle le pays espère intéresser quelques grands investisseurs à s’engager dans ses projets de développement.
Invité à prendre la parole, après José Manuel Barroso, ancien président de la Commission de l’Union Européenne (2004-2014), et Chung Un-Chan, ancien Premier ministre sud-coréen (2009-2010), Tony Elumelu a suggéré au gouvernement de s’intéresser à l’environnement des affaires au Cameroun.
“Les investisseurs aiment aller dans des pays où il y a des entrepreneurs locaux prospères”, a expliqué le banquier nigérian. “Si vous voulez attirer les investisseurs, faites d’abord la charité chez vous”, a redit l’homme d’affaires, tout en insistant aussi sur une bonne régulation des affaires.
Les propos de Tony Elumelu ont été accueillis par des salves d’applaudissement dans une salle solennelle du palais des Congrès de Yaoundé réunissant des personnalités politiques de renom et une belle brochette d’hommes d’affaires.
Le Cameroun figure à la 172e place (sur 189 économies) dans le classement Doing Business 2016 de la Banque mondiale qui donne des indications sur la facilité à faire des affaires dans le monde.
"Investisseur sur le long terme"
M. Elumelu, qui fait partie des plus grandes fortunes du Nigéria et du continent, a toutefois souligné que le Cameroun est un bon risque, à prendre. “Je le dis d’expérience”, a-t-il tenu à rassurer. Pour illustration, d’après son président, UBA, installé au Cameroun depuis huit ans et disposant aujourd’hui d’une quarantaine d’agences, a trouvé sur le terrain un important “capital humain”. Trois Camerounais auraient ainsi été nommés à des postes décisionnels dans les autres filiales de UBA.
“Soyez assurés que je suis un investisseur sur le long terme”, a-t-il déclaré, en s’adressant au président Paul Biya.
Tony Elumelu (53 ans) dirige simultanément l’une des grandes banques du continent, United Bank for Africa (UBA), présente dans une vingtaine de pays, aux Etats-Unis et à Londres; Transcorp, le plus important conglomérat coté en Bourse au Nigeria; et Heirs Holdings, société d’investissements qui détient des parts dans divers secteurs tels que les hydrocarbures, les services financiers, la pétrochimie, l’agriculture, les infrastructures, l’énergie et l’hôtellerie.
Pour illustrer ce dernier point, le fringant homme d’affaires a rappelé à des journalistes lundi en soirée, lors d’une conférence de presse organisée au Hilton Hotel de Yaoundé, que le chef de l’Etat camerounais avait par exemple pris ses quartiers au Transcorp Hilton Hotel d’Abuja - hôtel appartenant à la société Heirs Holdings - lors de sa récente visite au Nigéria, les 03 et 04 mai 2016.
Un prochain Aliko Dangote ou Tony Elumelu
Philanthrope et promoteur de l’“Africapitalism” - une vision centrée sur un développement endogène du continent avec les initiatives des Africains - Tony Elumelu a engagé avec sa fondation un programme pour promouvoir l’entreprenariat dans plusieurs pays africains: le Tony Elumelu Entrepreneurship Programme (TEEP). Objectif de ce programme: financer 1000 entrepreneurs chaque année, pour atteindre 10 000 sur 10 ans. Coût global: 100 millions de dollars.
En 2016, 25 start-up camerounaises ont été retenues dans ce programme, contre 19 en 2015. Son initiateur souhaite que plus d’entrepreneurs camerounais prennent part aux prochaines éditions du TEEP, le nombre de nationaux n’atteignant étant encore largement inférieur pour le moment à 1/10e d’entrepreneurs nigérians choisis dans le programme en 2015 ou en 2016.
Foi dans le potentiel de la jeunesse. Selon une étude sur la population mondiale publiée fin juillet 2015 par l’ONU, les moins de quinze ans représentent actuellement 41 % de la population africaine, les moins de 24 ans 60 %. En 2050, l'Afrique devrait être la seule région du monde à avoir moins d'un quart de sa population âgée de plus de 60 ans.
Pour résoudre le dividende démographique en Afrique, la solution réside dans l’entrepreneuriat, croit le PCA de UBA, qui l’a réaffirmé mardi au Palais des congrès.
Dans les cuvées du TEEP, on espère qu’on aura “le prochain Steve Jobs, le prochain Aliko Dangote, ou le prochain Tony Elumelu”, rêve le magnat de la finance africaine.