Mongo Beti né Alexandre Biyidi Awala, il y a 16 ans jour pour jour, in ‘’Mutations’’ numéro 548 du 10 octobre 2001, s’exprimait dans un texte dont le flamboyant troupeau de mots constitutifs s’ordonnait autour du titre : « Où va la littérature camerounaise ? ».
Ce jour-là, le mythe vivant, l’illustrissime auteur dont l’œuvre prestigieuse, prodigieuse et incommensurable l’avait déjà hissé à une glorieuse éternité mémorielle bien avant son départ d’ici-bas, et davantage depuis lors, amorçait sa conclusion en ces termes : « Ma thèse reste inchangée : la constitution d’une littérature nationale ou même continentale doit être précédée d’une mutation politique incontournable, que nous n’avons pas encore connue : nous sommes toujours une colonie. La preuve : notre dispersion à l’étranger, notre inorganisation, notre dénuement en équipements culturels, notre vassalisation financière sont incompatibles avec l’affirmation d’une classe littéraire (comme on dit classe politique) véritablement nationale».
Le secteur de l’édition camerounaise continue de hoqueter, faute pour lui de pouvoir ingurgiter les brassées de talents littéraires et artistiques qui, à tour bras, s’y échouent dans un marasme calamiteux où seules les multinationales exaltent leur omnipotence. Les sociétés civiles de droit d’auteur sont devenues de facto l’objet, le prétexte et le motif de véritables guerres civiles larvées entre sociétaires. Des salves sauvages et haineuses tirées par des bouches aux charges vocales parfaitement apurées de musicalité et d’harmonie vrillent les tympans à longueur de journée. Et le droit, en l’occurrence d’auteur, au lieu de courber sous sa férule, les plus retors parmi ses faux zélateurs et véritables croque-mitaines se retrouvent plutôt à courber l’échine et montrer des signes d’essoufflement. Autant d’illustrations possibles de « notre dispersion à l’étranger » et de « notre inorganisation ».
L’extraversion et l’incapacité organisationnelle triomphent encore aujourd’hui. Dans la foulée, les industries culturelles, que devraient secréter ces secteurs, demeurent évanescentes, faute de politique culturelle globale efficiente et souveraine. Quant à notre ‘’vassalisation financière’’, elle resplendit par le brutal retour du Fmi. Mais à bien y regarder, la politique peut apparaître de facto comme la cause fondamentale de l’inertie dont la puissance suinte ici. Cette politique, la politicienne, toute entière tournée vers les égos personnels et des calculs plus intimes et singuliers encore, puisque les protagonistes du marasme des secteurs cités supra ont quasi toujours en commun, autant qu’ils s’engueulent détestablement, l’adhésion au parti politique archi dominateur de la scène politique nationale dont le symbole est une flamme juchée sur un flambeau. N’y dérogent qu’une poignée d’opérateurs culturels ne tirant néanmoins leur épingle du jeu qu’après avoir montré patte blanche auprès de quelques huiles du parti au « flambeau ardent ».
En considérant la polysémie fonctionnelle du flambeau, on constate que le flambeau-incendiaire l’a emporté volontiers sur le flambeau-éclaireur dans l’esprit de ces « militants ». Cette perception du flambeau semble d’ailleurs être l’approche dominante de cette entité politique. Pour s’en convaincre, il suffit de porter son attention sur notre économie enflammée, au point où un rapport du Fmi annonce d’ores et déjà que trois ans du programme en cours, dit « Facilité élargie de crédit », seront insuffisants pour restaurer l’équilibre financier national.
Une rallonge est donc à redouter ! Notre santé publique est tellement en flammes que bateaux et avions hôpitaux humanitaires venus d’outre-mer viennent nous ‘’secourir’’. Comme c’est triste, effrayant et angoissant, un tel spectacle de secteurs clés dont ce parti au flambeau, tous, les fait flamber et voler en fumée, comme faussement le cacao de Banda…