A Douala, capitale économique du Cameroun, les festivités marquant la 132ème édition de la fête internationale du travail ont été lancées depuis le 16 avril 2018. Ces festivités étaient placées sous l’égide de la Semaine régionale du travailleur du littoral, (Sertral). Comme par le passé, les entreprises ont mené des activités diverses, des conférences à la table ronde en passant bien aussi par le sport. Cette année, la célébration coïncide avec celle de la 16ème journée mondiale de la santé et de la sécurité du travailleur, mais également avec la 22ème journée africaine des préventions de risques professionnels.
Au Cameroun, le gouvernement a choisi pour fil conducteur pour cette édition 2018 : « Dialogue social, un facteur de promotion du travail décent et de progrès socioéconomique au Cameroun ». Un thème qui devrait dans l’ensemble susciter de la part des patrons et des travailleurs, une prise de conscience plus collective pour une contribution plus efficace à la construction de notre pays. Mais chez nous, travailleurs et patrons se regardent toujours en chiens de faïence.
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Si les travailleurs sont une grande force de production, ils ne sont pas toujours reconnus à leur juste valeur par certains patrons qui n’en veulent que davantage pour fructifier leurs investissements. Dans un tel environnement, il est très difficile de parler de travail décent et encore moins de dialogue social, chaque partie tirant toujours la couverture de son côté. Une situation qui engendre plusieurs conflits dont les procès pullulent les tribunaux et très peu sont résolus par les négociations.
Le travail décent n’est pas une invention du gouvernement de Biya. Il a été institué par le Bureau international du travail (Bit) par opposition au travail indécent, inhumain que pratiquaient certains patrons. Et pour le Bit, le travail décent repose sur quatre importants piliers à savoir, l’emploi, la promotion des droits au travail, la protection sociale et enfin le dialogue social.
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Le dialogue social quant à lui met en œuvre les négociations sous toutes les formes, les consultations entre employeurs et travailleurs et des échanges d’informations. Mais le vrai dialogue social ne peut-être possible que si il y a des organisations des employeurs puissantes capables de mobiliser un grand nombre et s’il existe entre les deux parties une véritable politique de dialogue, le respect de la liberté syndicale, la négociation et l’application de la convention collective et le rôle clé de l’Etat qui doit jouer les arbitres entre le travailleur et le patron.
Dans notre environnement, il existe tout sauf un travail décent. La majorité des patrons ont très peu de considération pour leurs travailleurs qui représentent pourtant la première force de production de l’entreprise. Ce manque de considération est dû à plusieurs raisons, notamment le manque de puissance de certaines organisations syndicales. La quasi-totalité des syndicats sont fragilisés du fait que dans le même domaine d’activité, il existe plusieurs syndicats pour peu d’adhérents. En clair, la multiplication des syndicats entraine la pluralisation des intérêts et ce qui rend la mobilisation faible, toute chose qui fait l’affaire du gouvernement qui ne trouve pas en face une force syndicale unie autour d’un intérêt commun, mais plusieurs syndicats qui s’accrochent souvent sur les détails et non plus sur l’essentiel à cause des intérêts égoïstes de leurs dirigeants. Dans un tel environnement peut-on parler de dialogue social alors ?
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L’on a vu des conventions collectives signées par les patrons sous la tutelle de l’Etat mais qui n’ont jamais été appliquées. Tel est le cas avec la convention collective des professionnels des médias, qui bloque depuis des années. Conclusion : les journalistes crèvent de misère et le secteur des médias privé en l’occurrence ne peut pas jouer avec dextérité son rôle de chien de garde. Si les patrons ne peuvent même pas payer rien que les salaires, peuvent-ils se lancer dans le chantier de la sécurité sociale ?
Beaucoup de travailleurs camerounais, n’ont pas une couverture santé. Un travailleur malade ne peut pas donner le meilleur de lui-même, tout comme l’époux, l’épouse ou l’enfant d’un travailleur malade empêche ce dernier de donner le meilleur de lui-même à son lieu de service. D’où l’absence et les retards au sein des entreprises. Pourtant, le Bit, a prescrit la souscription des polices d’assurances maladies pour toutes les entreprises, mais au Cameroun rares sont les structures qui respectent cette recommandation.
Pour changer la donne, le gouvernement Biya doit appliquer la charte de l’Oit. L’action de l’Oit se fonde sur la nécessité d’une coopération entre les gouvernements, les organisations d’employeurs et les organisations de travailleurs, en vue de favoriser le progrès économique et social. Le dialogue entre les gouvernements et les deux «partenaires sociaux» vise à établir un consensus et à faire participer de façon démocratique ceux qui ont des intérêts vitaux dans le monde du travail.