L'ambazonien qui s'est autoproclamé général a été éliminé la semaine dernière par l'armée. Le prof Bokagné donne son point de vue sur sur l'élimination de cet ambazonien dans la tribune ci-dessous.
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C'est le suivant que le nouveau co-légion a dégommé au secteur militaire dont dépend le Nord-Ouest. Une fripouille. Anciennement un moto-taximan qui rêvait de vie facile. Un de ceux-là aussi avec qui, dans les élucubrations qui lui tiennent lieu de projet politique, Kamto préconisait de négocier la partition du pays.
Son corps - et celui de son sotto-capo - qui se faisait appeler Colonel John, ont été jetés sur le bas-côté du principal carrefour du comté de Tubah dont dépend la ville Bambui : désormais, et de manière plus évidente, les charognes qu'ils ont toujours été. Fru Marcello Che - c'est son nom - a pris, comme on dit là-bas, son plat de kumkum chaud sans soupe.
Puis, a embarqué illico-presto vers le Maryland à bord d'un Odeishi Airlines. My Trip to Buea se poursuit sans anicroche. Il n'y a pas grand chose à vous dire de Fru Marcello Che (aka Général Rasta) : un laissé-pour-compte. Même dans leur machin ambazonien où se recrute tout et n'importe quoi, c'était une frappe de très petite envergure, faisant surtout dans le racket des commerçants bamiléké du Nord-Ouest.
Bamenda se meurt. Ceux qui tenaient le gros commerce là-bas étaient surtout les natifs des Bamboutos à 50% et un peu de la Menoua, à 20%. Des cognes comme Général Rasta les ont chassés, de harcèlements incessants, sertis d'enlèvements. Les récents "généraux'' de la mouvance ambazonienne sortiront désormais de ce banditisme local qui ne m'intéresse ici que par son incidence communautaire.
Posez-vous la bonne question sur l'itinéraire de cette sorte de frappe et vous comprendrez son relatif succès. C'est-à-dire pourquoi il a pu durer. Au Nord-Ouest, tout est lié. Le business, là-bas, a toujours été sous contrôle d'un type de féodalités. C'est une société très rurale qui n'est jamais vraiment sortie de son settlement process : le processus d'occupation des terres et de constitution de leurs chefferies.
La faute ? À la colonisation britannique dite d'indirect rule. Elle avait tendance à laisser, (contrairement aux Français), les chefs locaux s'auto-administrer. Or ceux-ci sont restés englués dans d'atroces rivalités. Un aspect de ces rivalités a été d'introduire des alliances avec les étrangers. Ceux qui l'ont fait les premiers ont certes hérité de puissants fondoms, mais déjà infiltrés.
Toute la période britannique, Bamenda a exercé une espèce d'hégémonie sur le Nord-Ouest. Mais le commerce, là-bas, n'était pas entre les mains des natifs Menda-Nkwe, Nkwen ou Mankon, mais entre celles de la colonie nigériane des lbo qui avait su profiter. Et quand s'est posé la question de leur auto-détermination, vous pouvez me croire, ceci a énormément pesé. D'autant plus que, (du moins officiellement), John Ngu Foncha était un Nkwen.
Le référendum pour l'auto-détermination a, de la sorte, tourné à un choix de communautés : celle des lbo du Nigeria ou celle des Bamiléké. C'est à cette dernière que ceux du Nord-Ouest se sont rangés. Ç'a ouvert la voie au négoce et à l'entrée en force du commerce bamiléké qui a commencé progressivement à supplanter celui des Nigérians. La communauté bamiléké du Nord-Ouest, elle-même, a commencé à se nord-ouestiser.
C'est un aspect méconnu de la question anglophone telle qu'elle se pose : un syndrome de citadelle assiégée ouvrant sur un sentiment anti-bamiléké. Les Northwesterners n'arrivent pas à rivaliser avec eux. Plutôt que de les contrer chez-eux, ils ont entrepris de le faire dans le vaste Cameroun, en commençant par les Sud-Ouest et Littoral et en assiégeant d'abord leur sous-secteur de l'éducation.
Les natifs du Nord-Ouest ont ainsi exercé un quasi monopole de l'éducation anglophone en zone francophone, en ouvrant force instituts privés. La crise du NOSO, pour cette économie, est devenue une manne. Elle a jeté sur les chemins, plus d'un million d'exilés à scolariser. C'est une part de marché qu'avec un cynisme certain, personne ne veut laisser passer. Ça nous ramène au Général Rasta.
Pour savoir comment il a pu prospérer, il faut juste interroger ce qui l'a créé. C'était un petit bougre de la communauté qui, quand le trouble s'est installé, faisait les petites commissions. Puis la pression de l'armée s'est organisée en sanctuarisant les centres urbains desquels les plus avisés se sont retirés pour rejoindre les caches en brousse. Lui, est resté.
Quelqu'un comme Fru Marcello Che n'avait pas d'envergure. Ni de cerveau pour penser. Il était un robot dont quelqu'un d'autre tenait la télé-commande. Il n'est pas resté de lui-même à Bambui : on lui a ordonné d'y rester. Sa mission était simple : perturber la scolarisation. Pour le profit de l'un des siens, membre de famille, résidant à Douala ou à Yaoundé et tenant l'un des instituts scolaires dont j'ai parlé.
Il est même à craindre que ces donneurs d'ordre, (devenus de fait des parrains du crime organisé), se soient organisés en réseaux pour sponsoriser la perturbation de la scolarisation de leur région. Des vauriens comme Général Rasta sont de simples pions à sacrifier. Loin d'être la tête de la bête malfaisante du conflit qui déchire notre NOSO, ils sont juste un rouage banal de sa grande complexité.
S'il n'y avait pas un tel lien, Fru Marcello Che - le fameux Général Rasta - ne vaudrait même pas la peine d'en parler..."