Accident mortel de Ntsama Manuella, voici pourquoi il faut faire preuve de retenue

Affaire Ngannou Meurtre Francis N'gannou est accusé d'avoir tué la jeune dame

Tue, 29 Apr 2025 Source: Bruno Bidjang

L’émotion est légitime, la douleur compréhensible. Mais l’acharnement et la condamnation populaire sans preuve ni procédure sont une dérive dangereuse. Le Cameroun ne s’effondre pas parce qu’un peuple soutient un de ses fils dans un moment tragique. Le pays vacille lorsque la colère remplace la raison, et lorsque l’opinion publique se transforme en tribunal.

L’affaire Francis Ngannou et la mort tragique de la jeune Ntsama Manuella ont bouleversé le pays. À juste titre. Une vie a été perdue, et c’est toujours une douleur inacceptable. Mais la réaction déchaînée d’une frange de la population, exigeant immédiatement la mise en cause de Ngannou, illustre une profonde confusion entre quête de justice et soif de revanche.

Le Cameroun n’est pas perdu parce qu’il défend Ngannou. Ce n’est pas une star intouchable ; c’est un citoyen, certes connu, mais aussi un homme marqué par la même humanité que nous. L’exiger à la barre de la justice sans enquête préalable, sans même attendre les résultats d’un rapport ou d’une audition formelle, c’est oublier l’un des piliers de tout État de droit : la présomption d’innocence.

Ceux qui s’insurgent contre « l’impunité des puissants » oublient qu’il est tout aussi injuste de condamner un homme sur la base de rumeurs, d’indignation populaire ou de suppositions. Demander la vérité, oui. Imposer un coupable sans preuves, non.Francis Ngannou n’a pas fui. Il a conduit la victime à l’hôpital. Ce simple geste n’efface pas les faits, mais il démontre un minimum de responsabilité humaine. Il ne s’agit pas de dire que cela le disculpe, mais de souligner qu’il n’a pas agi comme un criminel en fuite. Et si une enquête doit être menée ce qui est normal elle doit l’être avec calme, méthode, et respect du droit.

Ceux qui appellent à une justice immédiate se comportent comme des brutaux, expéditifs, mus par l’émotion plutôt que par les faits. Le Cameroun a besoin d’institutions solides, pas d’émotions incontrôlées. Le pays ne s’écroule pas parce que des voix s’élèvent pour demander qu’on respecte la procédure, même lorsqu’il s’agit d’une star. Il s’écroulerait plutôt si l’on commençait à faire de chaque fait divers une guerre civile morale, où chacun brandit son opinion comme une arme.

Ntsama Manuella mérite justice. Et cette justice se doit d’être équitable, structurée, sérieuse. Elle ne doit pas devenir un lynchage. Le droit n’est pas un spectacle, et la justice n’est pas une vengeance. Si nous voulons bâtir un Cameroun juste, alors commençons par respecter la justice elle-même, dans sa forme comme dans son fond.

Auteur: Bruno Bidjang