Affaire Bicec: qui sont les véritables auteurs?

Bicec BANQUE Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit

Fri, 26 Aug 2016 Source: Muna Mboa

Depuis le 08 août dernier, Sa Majesté Innocent Ondoa Nkou, Samuel Ngando Mbongue, Martin Nyamsi et Benoît Ekoka sont écroués à la Prison Centrale de New-Bell à douala pour détournement des deniers publics.

Et depuis leur arrestation, des questions taraudent les esprits. Sont-ils les véritables auteurs du scandale financier de cette institution financière ? Qui en sont les vrais auteurs ? Ces questions et bien d’autres ne trouveront de réponses que lorsque l’enquête aura livré ses résultats.

Mais pour l’instant, beaucoup de curiosités entourent cette sombre affaire financière au point où certains hommes de médias n’ont pas hésité à évoquer un règlement de comptes. Quand bien-même cela serait, nous ne penchons pas encore pour cette hypothèse car l’affaire révèle de nombreuses curiosités tout comme les personnalités impliquées.

Les personnalités

Sa Majesté Innocent Ondoa Nkou, a été Directeur Général Adjoint de la Banque Internationale du Cameroun pour l’Epargne et le Crédit (Bicec), filiale du Groupe Banque Populaire de France (Bpce). Il y a quelques mois, il avait démissionné de son poste pour aller s’occuper de l’arrondissement de la Lokoundje.

dans le département de l’Océan dont il est le Maire et par ailleurs, Chef supérieur du groupement Evouzok. Samuel Ngando Mbongue était, jusqu’à son arrestation, Directeur de la Comptabilité et de la Trésorerie de la Bicec. Benoît Ekoka Essoua, cet expert-comptable très respecté par ses confrères du pays, était commissaire aux comptes de la Bicec.

Il en était donc un prestataire de services. Martin Nyamsi, Président Directeur Général d’Interface, était également prestataire exclusif de services de maintenance de l’outil informatique. Voilà le quatuor placé en détention préventive ce qui fait remonter les nombreuses curiosités de cette affaire.

Les curiosités

La première de la série, vient du fait que cette affaire est révélée à la presse après le passage au Cameroun d’une mission de contrôle des enquêteurs financiers français. Une enquête qui sera tenue secrète dans le pays mais qui finira par fuiter. La seconde vient du fait que l’on se demande qui a porté plainte ? La semaine dernière, la Bicec s’est fendue en un communiqué dans lequel elle faisait savoir qu’une enquête interne était encore en cours et qu’en l’état, elle n’avait encore traduit personne en justice. La troisième se trouve au niveau du montant incriminé.

D’aucuns parlent de 50 et d’autres 70 milliards de FCFA. Qui dit vrai dans ces conditions-là ? Et si cela était, pourquoi la Bicec annonce une enquête interne en cours alors que les tribunaux sont déjà saisis ? Et c’est justement au niveau de la saisine des tribunaux que réside la quatrième curiosité. Pourquoi avoir saisi le Tribunal de Grande Instance du Wouri en lieu et place du Tribunal criminel spécial qui est compétent, depuis la publication du Décret N° 2013/131 du 03 mai 2013, de connaitre des affaires de détournement dont le montant est égal ou supérieur à 50 millions de FCFA ? Ce qui en clair voudrait dire que ce n’est pas le Ministre de la Justice qui a instruit cette affaire. Il se murmure d’ailleurs que ce serait le conseiller juridique du Chef de l’Etat Jean Foumane Akame qui l’aurait fait.

Si cela est vrai, ne s’est-on pas trompé de juridiction et dans ce cas, cela n’annule-t-il pas la procédure ? Si l’on s’en tient au fait que les fonds détournés se sont retrouvés en France et dans des institutions identifiées, ne s’agit-il pas d’une évasion de devises et non de détournement ? Si oui dans ce cas, les auteurs sont-ils Camerounais ou expatriés ? Qui sont donc ces auteurs ? Voilà la cinquième curiosité de cette affaire.

L’autre curiosité se trouve dans la période indexée. 2003 à 2013, cela signifie que plusieurs directeurs généraux de la Bicec ont participé à cette évasion. L’on pourrait ainsi citer quelques –uns dont Jean Pierre Schiano ou Pierre Mahé. Tous ces directeurs généraux sont aujourd’hui hors du Cameroun. Le dernier cité venait d’être muté à Madagascar avant d’être remplacé par Alain Ripert. En cas de procès, ces derniers viendront-ils témoigner pour que toute la vérité éclate dans cette affaire ? Difficile de le penser quand on sait que la France ne laissera jamais ses citoyens venir se jeter dans la gueule du loup.

Et c’est dans cette curiosité que la thèse de règlement de comptes prospère le plus. On prend le menu fretin et on laisse fuir les baleines. Quelle justice ! La septième curiosité se trouve dans l’identité de l’ordonnateur des dépenses. Au Cameroun, le seul et l’unique ordonnateur des dépenses est le Directeur Général. D’où vient-il donc que le Directeur Général Adjoint soit incriminé ? Nous préférons nous contenter de ces curiosités car l’affaire étant en justice, l’on ne peut qu’attendre le verdict.

Nous n’osons pas nous aventurer plus au fond de cette affaire de peur que l’on ne dise que nous tentons d’influencer la justice. Dommage cependant qu’il faille reconnaitre que les étrangers sont mieux défendus par notre justice que nos propres compatriotes qui sont livrés à la guillotine, et c’est l’occasion de le dire à juste titre, sans autre forme de procès !

Auteur: Muna Mboa