Après la Libye, d’autres lieux de vente ‘d’Africains’ dévoilés

Migrants Esclavage Témoignage Plus 700 000 migrants sont vendus en Libye selon l'ONU

Tue, 21 Nov 2017 Source: lequatriemepouvoir.com

L'année 2017 nous aura appris deux choses : Primo, les Noirs sont déjà (enfin) capables de se réunir à l'échelle internationale pour compatir à la douleur de leurs semblables martyrisés en un lieu X, et ce, sur des délais très brefs. Cela semblait impensable il y a encore quelques temps, mais après le premier Front Anti CFA du 7 janvier, l'exceptionnelle mobilisation de ce 18 novembre a déjoué tous les pronostics et cloué le bec aux plus grands pessimistes. En ce sens, c'est un accomplissement énorme.

Secundo : les Noirs ne sont plus tout aussi réceptifs aux drames dont sont victimes les autres peuples. L'indifférence relative après les attentats de Londres (3 juin) ou de Barcelone (17 Août 2017) est à des années-lumière de la grosse émotion collective qui avait submergé les Africains du monde entier après les attentats de Charlie Hebdo (7 janvier 2015) et les autres attaques terroristes qui s'en étaient suivies (Bataclan, Nice etc.)

Bien sûr, il ne s'agit pas de se réjouir de voir les autres mourir, mais de considérer leurs drames avec la même froideur, du moins aussi longtemps qu'on est incapable d'apporter autant de compassion à son propre peuple. Sinon, on est en pleine sorcellerie. Et à cette époque, c'était de la sorcellerie de premier ordre.

Mais l'année 2017 nous a appris deux autres choses, plus malheureuses cette fois :

D'un, le Noir refuse toujours autant de croire en lui-même et à la production de ses semblables. Depuis de longues décennies, on attend que le Blanc s'intéresse et parle d'une chose avant d'y accorder du crédit. On est en 2017 et le proverbe :"La vérité sonne blanche" n'a jamais été aussi vrai.

A titre d'exemple, au-delà du Front Anti CFA, cela le fait plusieurs années que le grand frère Kemi Séba est actif sur le terrain du combat contre l'esclavage en Mauritanie. Pourtant, malgré sa large popularité, il est resté largement esseulé dans cette bataille. La quasi-totalité de nos "stars" africaines ne s'étant jamais réellement senties concernées. C'est un fait indéniable et triste.

A présent que CNN, lointaine chaîne américaine basée à Atlanta en Géorgie, a réalisé un reportage dans lequel elle répète ce que démontrent beaucoup de nos activistes depuis des lustres, les Noirs semblent se réveiller d'une longue sieste et découvrir pour leur première fois, ce qui pourtant est une réalité terrifiante depuis une bonne éternité.

Il faut d'ailleurs préciser que le fameux reportage de la célèbre correspondante soudanaise de CNN, Nima El Bagir , s'est en fait servi d'images réalisées il y a trois mois (Août 2017) par un activiste camerounais très engagé, et dont le portail Facebook John Dahl Carter Officiel donne accès à de plus amples détails. Ce jeune acteur de la société civile n'a jamais cessé d'alerter pouvoirs publics et personnalités privées sur l'urgence d'une action en Libye contre l'esclavage, mais sans jamais connaître de suite. Car en Afrique, la médiocrité gère la cité.

De deux, on constate que les Africains sont en principe unanimes sur la nécessité absolue du changement. Là où les avis divergent, c'est sur les méthodes pour y arriver. Et le problème à ce niveau, c'est qu'au lieu de se compléter, on préfère se faire la guerre, parce que chacun est persuadé d'avoir raison, et surtout d'être le seul à avoir raison.

Voilà pourquoi on a pu voir ça et là, des gens très intelligents écrire à tue-tête: "Les manifestations devant les ambassades ne servent à rien.", ou encore : "Ce n'est pas en écrivant sur son mur : '´libérez nos frères ‘´que l'esclavage libyen prendra fin".

Même si ces critiques sont exactes, le fait est qu'elles sont surtout le fruit d'une fausse interprétation. Car personne de sérieux ne pense qu'il stoppera l'esclavage par un hashtag sur Facebook. Mais ces manifestations doivent être considérées sous l'angle symbolique, comme preuve que les Noirs ont enfin compris qu'il faut être solidaire envers les leurs en cas de malheur. Le drame aurait été s'il n'y avait pas eu cette mobilisation. D'ailleurs ce sont ces mêmes personnes qui auraient critiqué la léthargie des Noirs pendant que d'autres Noirs souffrent.

Retenez-le, ce n'est pas non plus parce que les gens vont manifester devant les ambassades que l'esclavage va augmenter. La mobilisation n'est certes pas la solution miracle, mais elle demeure une étape vers la solution, dont elle est partie intégrante. Car elle permet une prise de conscience collective sans laquelle aucun projet sérieux n'est réalisable. Vous ne pouvez pas dire à un maçon de construire une maison dont il n'a pas vu le plan. Le combat contre le CFA résulte de la connaissance des ravages du CFA. De même, le combat contre l'esclavage commence quand la masse a pris conscience de ladite pratique.

Le vrai nœud de la critique doit concerner ce qui se passe après la mobilisation. Et force est de constater que la plupart du temps, on en reste là, et on attend le drame suivant pour recommencer les marches. On est alors là en face d'un simple effet de buzz, au final improductif.

LA FIN DU RACISME

Pour résoudre le problème concret de l'esclavage du Noir, il faut une solution concrète . Et celle-ci se trouve dans la réponse à une question tout aussi concrète :

"Pourquoi le monde ne nous aime-t-il pas?"

C'est en y répondant qu'on se rend compte qu'entre le Moyen Age et aujourd'hui, il y a eu un léger changement dans les motivations de ceux qui réduisent le peuple Noir en servitude depuis la nuit des temps.

Au Moyen-Age, le Noir était mis en esclavage et vendu en conséquence parce qu'on le considérait comme un bien meuble, un objet sans volonté propre. C'était une calamité de la nature, non voulue par Dieu.

C'est en ce sens que le pape Tomasso Parantuccelli alias Nicolas V publiera le 8 janvier 1454, un document autorisant les Européens à soumettre les peuples africains. Il aura la bonne idée de mourir l'année suivante (24 mars 1455), mais plus tard en juin 1494, sera signé entre l'Espagne et le Portugal, le fameux 'Traité de Tordesillas', qui partagera le monde en deux zones d'abomination coloniale entre les deux hyperpuissances de l'époque. Puis en 1551, la discussion connue sous le nom de "Controverse de Valladolid' (Espagne) aboutira à la conclusion que le Noir n'a pas d'âme et mérite bien les traitements subis.

L'humiliation atteindra son paroxysme en 1685 avec le "Code Noir", rédigé par Jean-Baptiste Colbert, ministre des finances de Louis XIV, roi de France (Et très apprécié en Afrique aujourd'hui). Les grands axes de ce texte de la mort légitimeront définitivement la pratique de la servitude du peuple Noir, tant et si bien que Napoléon 1er (Celui dont Macron a fièrement fait visiter la tombe à Donald Trump, lors de sa visite du 14 juillet dernier à Paris) restaurera l'esclavage, censé avoir été aboli en 1789 avec la pseudo déclaration des Droits de l'Homme. C'est de ce mécontentement que viendra la guerre d'indépendance d’Haïti (1791-1804), victorieusement menée par Toussaint Louverture, puis Jean-Jacques Dessalines.

Aujourd'hui, les cas de la Mauritanie et de la Libye (Des cas parmi d'autres) nous montrent qu'au XXIe siècle, le Noir est toujours vendu comme le cheptel qu'il était il y a 500 ans. Mais les raisons se sont décalées. Si le monde. Nous déteste toujours autant, c'est parce que nous sommes pauvres, et donc faibles.

Et quand on est faible, on n'a pas les moyens de se défendre, et quand on n'a pas les moyens de se défendre, l'Autre peut faire de nous ce qu'il veut, puisqu'il ne craint aucune représaille.

Nous n'avons rien à lui opposé.

En d'autres termes, le racisme ne cessera jamais. Il n'y a pas un bouton vert quelque part, où le fait d'appuyer dessus couvrira le monde d'amour envers l'Africain. Car dans l'absolu, personne n'aime personne dans cette jungle, Aka, village planétaire. Tout ce qu'on peut faire, c'est se faire respecter, et cela n'est possible qu'en devenant une puissance économique.

DE L'URGENCE D'UNE REVOLUTION ÉCONOMIQUE

Pour ma part, je suis heureux de pouvoir dire que je n'ai pas attendu CNN et France 2 pour m'intéresser à la problématique du mépris universel envers les Noirs, et encore moins aux solutions. Dans un article publié en 2015 sur ce mur sous le titre : "La paradigme de la femme amoureuse", je comparais déjà le racisme à une femme rejetée par son prince charmant, et qui se retrouve face à deux choix : soit supplier vainement l'amour de ce dernier, soit s'en aller s'accomplir par elle-même, devenir une femme indépendante et puissante afin qu'à leur prochaine rencontre, il regrette amèrement de l'avoir laissée partir.

En prenant l'exemple de la Chine, j'illustrais que la grande famine de 1958-1961 qui avait causé plus de 35 millions de morts, avait attiré au pays de Mao Zedong les pires railleries de la galaxie. On s'en moquait en appelant la Chine : "Le grand malade d'Asie". Pourtant, lorsque Deng Xiaoping prendra le pouvoir en 1978, le pays misera tout sur son concept des "Quatre Modernisations" : l'agriculture, l'industrie, les sciences/techniques et l'armement, et amorcera un bond économique sans précédent.

Aujourd'hui, vous n'entendrez nulle part qu'on a vendu un Chinois comme une chèvre. La Chine est la première réserve de devises au monde, et le deuxième créateur de richesses après les USA (12 000 milliards de dollars de Produit Intérieur Brut annuel). En d'autres termes, si des Chinois se retrouvent torturés quelque part dans le monde, leur patrie (Qui de surcroît possède l'arme nucléaire et un droit de veto à l'ONU) saura répondre comme il le faut.

De même, on pouvait lire dans un article du journal allemand publié le 16 novembre 2017, que dans les échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne, l'Allemagne a enregistré l'année dernière un excédent génial de 50 milliards USD, dont 9,3 milliards pour le seul État de Bavière. Tout comme la Chine réalise un bénéfice de 25 milliards USD contre la France. Une voiture sur cinq fabriquée en Allemagne est vendue en Grande-Bretagne, de même qu'un tiers de la production du numéro un mondial Volkswagen est acheté par la Chine.

Ainsi va la puissance. Quand votre pays réalise de tels scores, vos citoyens peuvent être tranquilles où qu'ils aillent. D'ailleurs, le visa leur est grandement facilité. Pendant ce temps, la vie même du Noir est considérée comme un prix trop faible pour le droit d'entrée en Europe.

LES PRINCIPAUX RESPONSABLES DE L'ESCLAVAGE MODERNE

Si les Africains quittent donc en si grand nombre leurs pays au péril de leur vie, c'est parce que les besoins fondamentaux du citoyen n'y sont pas garantis par les autorités. Cette absence d'infrastructure socio-économique les pousse vers des lieux où l'espoir semble permis. Or, c'est précisément parce qu'ils savent cela que les citoyens de ces "Paradis" les traitent de façon aussi déshonorante une fois sur place. "Tu viens d'un pays pauvre, alors forcément, tu ne vaux rien."

Toutefois, ce qui peut nous rendre hors-sujet dans nos mobilisations à Paris, Berlin et autres, c'est de penser que les Libyens sont les seuls auteurs de l'esclavage moderne, et que nous avons besoins des Occidentaux (Qui eux sont très bons), pour nous aider à trouver des solutions. Il n'en est rien. Absolument rien. Les pays Européens ne sont pas la solution, ils sont une partie du problème.

Car même si sous Kadhafi, les mêmes obscénités avaient cours dans une moindre mesure, c'est la destruction du pays en 2011 par lesdites "grandes puissances" qui a semé les graines du chaos actuel.

Comme le démontre le portail de statistiques , la dette publique de la Libye frôlait à peine les 3% du PIB sous le règne du Colonel, atteignant même un score de 1,01% en 2008 alors que la crise financière de 2008 ravageait les pays du monde entier.

Après un pic de 10,87% en 2011, année de l'assassinat du Guide, la dette va se stabiliser jusqu'en 2013 où elle éclatera totalement jusqu'à atteindre plus de 50% dès 2015. Voilà donc un pays ultra prospère que des pays à genoux comme la France (Dette publique actuelle à 99% du PIB) sont prétendument venus aider. L'etat actuel du pays dévoile les véritables enjeux de cette mascarade ourdie par le trident Cameron-Sarkozy-Obama.

La même "Communauté Internationale" auteur de cette situation, n'a pourtant pas hésité à engager des fonds pour bloquer le transit de ceux qu'elle appelle "migrants" afin qu'ils ne franchissent pas cette Europe qui est pourtant l'un des grands acteurs à l'origine de cet enfer.

Dans le même temps, les Européens contraignent les États Africains à la signature des APE, maintiennent l'ignoble franc CFA en dépit des grandes mobilisations de la jeunesse contre la servitude monétaire, et continuent de piller les ressources naturelles de la RDC, du Soudan, du Niger et du Mali.

En ce moment même, un kilo de cacao coûte 1,67 € , (Soit 700 Franc CFA) en Côte d'Ivoire, alors qu'une seule tasse de chocolat peut coûter jusqu'à 4 € (1800 Francs CFA) à la gare centrale de Frankfurt. Plus de 60% du chocolat allemand provient de l'importation depuis la Côte d'Ivoire, mais c'est l'Allemagne qui se développe et vite un budget de 316,9 milliards € en 2026. Allez comprendre.

Ainsi, les mêmes qui disent lutter contre l'immigration s'activent jour et nuit à créer les conditions de ces migrations, et donc la voie royale vers le trafic humain et l'esclavage 2.0 qui va avec. Qui plus est, les Chefs d'Etats chargés de mener nos pays vers l'émergence à l'exemple de la Chine, s'avèrent n'être en réalité que des statues de porcelaine, dont le seul véritable talent réside dans l'art de conserver leur poste sur plusieurs décennies.

On ne le dira jamais assez, l''Afrique est de loin, de très loin le continent le plus riche du globe, et le simple fait que nous soyons en même temps de loin, de très loin les plus pauvres du globe, sert de preuve à l'incompétence de nos dirigeants, qui dans les faits d'ailleurs, ne dirigent rien du tout. Notre continent appartient aux autres, aux Occidentaux et aux Orientaux, ou plus exactement, aux Blancs et aux Jaunes.

ÉPILOGUE

Toutefois, si nous pensons qu'accuser les Libyens, l'Occident et nos dirigeants est suffisant, alors nous commettons une énième erreur. C'est très facile de rejeter la faute sur autrui, et encore plus facile de ne pas la voir sur soi-même. Étant donné que nos dirigeants ne sont que des citoyens devenus Présidents, nos attitudes quotidiennes démontrent que nous ne sommes en rien différents d'eux, et que nous ferions pareil si nous avions leur pouvoir. Du moins pour la grande majorité d'entre nous.

Oui, la solution est le pouvoir économique. Oui, c'est quand on sera autosuffisants sur l'alimentaire et forts sur la technologie qu'on va nous respecter. Mais où êtes-vous donc quand vos frères ont des projets d'avenir prometteurs et concrets?

Le jeune et brillant Ekambi Alain travaille actuellement d'arrache-pied sur l'élaboration du réseau africain " DIKALO" dans le but de supplanter l'américain WhatsApp, filiale du réseau Facebook. Dans notre communauté, beaucoup possèdent les moyens matériels nécessaires à la réalisation de cette innovation, mais ne se manifestent pas.

De même, le projet d'éducation "Club Afrique Vision" de Nzodjou Fotsing a été présenté dans un Live de 2 heures qui a réuni 14 000 vues à ce jour pour une participation aux dons de moins de... 10 personnes (!!!) Comment souhaitez-vous que le monde vous respecte si vous ne contribuez pas à la production de ce qui vous apportera ce respect à l'international?

En un mot, la médiocrité des Africains se caractérise par le fait qu'ils se gavent d'articles et de vidéos et laissent en commentaire :"Bravo, Courage", alors qu'ils sont aux abonnés absents quand il faut soutenir concrètement. Ce n'est pourtant pas toujours faute de moyens, mais les uns et les autres rivaliseront d'arguments pour justifier pourquoi ils ne peuvent pas contribuer.

Et voilà que notre communauté stagne comme l'eau d'un étang. Et voilà le sort qui lui est réservé : le même qu'il y a cinq siècles

Ce peuple continuera donc d'être pauvre et méprisé de tous. Nous sommes tous des esclaves et à ce rythme, nous risquons fort de le rester.

Auteur: lequatriemepouvoir.com