Au Cameroun, l'Université contre le peuple

Éric Essono Tsimi, Ecrivain, Prof Éric Essono Tsimi

Sat, 14 Sep 2024 Source: Éric Essono Tsimi

Sur la forme :

1. Intervention du Recteur : La correspondance que j'ai reçue sur WhatsApp révèle une intervention directe du Recteur dans la programmation d'une conférence. Est-il habituel que le Recteur tranche sur des questions académiques qui pourraient être gérées à un niveau inférieur? Cette pratique soulève des questions sur l'autonomie des vice-recteurs et la décentralisation des décisions au sein de l'université de Yaounde 1.

2. Nature de l'avis : L'avis du Recteur, semble-t-il non informé par une commission ou une procédure formelle, apparaît éminemment personnel. Ce mode de fonctionnement peut induire des conflits internes et nuire à la transparence institutionnelle.

3. Ajournement de la decision du Recteur : Dans le contexte universitaire camerounais, où les échelons hiérarchiques sont souvent flous, un vice-recteur devrait techniquement obtenir une autorisation de la Doyenne qui se réfèrerait au Recteur ? Le vice-recteur est meme de maniere informelle un membre du cabinet du Recteur, ce qui rend le message du Recteur d'autant plus surprenant et problématique. Les éléments manquants du dossier auraient pu être rappelés et ajustés avant de communiquer cet ajournement de la decision a la Doyenne.

Sur le fond :

1. Les Publications : Cette exigence est ambiguë, pour les chercheurs en début de carrière ou en transition, les conférences servent à présenter des travaux en cours et à soumettre des idées nouvelles à la critique de la communauté scientifique. Imposer des publications préalables restreint l'innovation et l'échange académique libre. (Le chantalisme n'aurait jamais vu le jour dans ces conditions, aucun publication n'ayant précédé i suivi ce courant.)

2. Objectif de Vulgarisation : Si l'objectif des "panelistes" est de vulgariser des connaissances, la prudence est de mise. Et le Recteur has a point. Comment justifier la vulgarisation de travaux non encore validés par des pairs ? Cela pourrait mettre en péril la crédibilité de l'institution si les résultats présentés s'avèrent spéculatifs, erronés ou prématurés.

3. Usage des moyens de l'université : Si les "panélistes" (les chercheurs) sollicitent les ressources de l'université, il est compréhensible que l'université exige des garanties comme des références ou des publications préalables. Ces éléments assurent que la conférence, qui pourrait devenir une référence et être archivée ou diffusée largement, atteigne le niveau de rigueur nécessaire.

4. Flexibilité : Les travaux peuvent être en différents stades de publication (manuscrits en préparation, soumis, ou acceptés/ ou meme des cours deja donnes sur le sujet, des syllabus, etc). La demande du Recteur pourrait être perçue comme raisonnable si elle est appliquée avec discernement et n'est pas publiée dans les réseaux sociaux, elle respecterait les standards internationaux tout en reconnaissant le dynamisme propre au contexte académique camerounais.

La science n'est pas rendue au nom du peuple.

Auteur: Éric Essono Tsimi