Boko Haram : Quand l'autorité traditionnelle devient la cible

Tue, 24 Nov 2015 Source: carmer.be

Les terroristes de Boko Haram en ont visiblement gros sur le coeur contre les comités de vigilance mis en place depuis le début de la guerre que le Cameroun mène contre cette secte. C’est que face à la terreur que cette horde de barbares leur impose depuis plusieurs mois, les populations riveraines se sont courageusement constituées en comité de vigilance pour combattre les assaillants. Avec des armes dérisoires (gourdins, machettes, flèches, sifflets, etc.) les membres de ces comités de d’autodéfense ont souvent eu des résultats probants. Plusieurs fois, ils ont mis la main sur des kamikazes avant qu’ils n’aient eu le temps d’actionner leurs charges explosives, sans oublier la somme de renseignements qu’ils ont souvent communiquée aux forces de défense. Par ces actes de bravoure, ils se sont posés en véritables adversaires de Boko Haram au même titre que les forces de défense qui les traquent depuis des mois.

Rôle indispensable des populations

Pas étonnant donc que l’attaque terroriste lancée par Boko Haram samedi dernier ait visé le chef traditionnel de Leymarie dans la périphérie de Fotokol dans l’Extrême-Nord du Cameroun. Le monarque a été tué sur le coup, ainsi qu’au moins trois membres de sa famille lorsqu’une fillette a fait irruption dans son domicile et actionné sa charge explosive. Le chef de Leimari était connu pour être le coordonnateur du comité local de vigilance. Il s’agissait visiblement d’une expédition punitive.

Dans une tribune publiée chez nos confrères de Mutations, le lamido de Banyo, le sénateur Mohaman Gabdo Yayha rappelle l’indispensable rôle que les populations ont à jouer dans la lutte contre les terroristes de Boko Haram. « Nous devons dans le même temps, écrivait-il, associer les populations civiles à la défense de notre territoire. (…) La clef de voûte de la lutte contre le terrorisme c’est le renseignement. Le succès de la mission des services compétents en la matière, dépend fortement des populations qui doivent être à la fois leurs yeux et leurs oreilles. »

Mohaman Gabdo Yayha plaide pour l’équipement des comités de vigilance dont le rôle a été déterminant dans la lutte contre les coupeurs de route qui sévissaient dans le Septentrion. En procédant ainsi, ne court-on pas vers la privatisation de la sécurité des populations et de leurs biens alors qu’il s’agit d’une fonction régalienne de l’Etat ? À cette interrogation, le lamido Mohaman Gabdo Yayha semble répondre par la négative : « Il ne s’agit pas de fournir des fusils d’assaut à ces escouades civiles de veille, mais des moyens et équipements fussent-ils rudimentaires pour se défendre avec l’avantage d’une connaissance parfaite du terrain. Ceux qui connaissent les réalités des zones frontalières en question, savent bien qu’il est difficile pour nos forces de sécurité de surveiller les multiples pistes et sentiers qui relient le Cameroun à notre voisin nigérian. »

L’assassinat  du chef de Leimari et des membres de sa famille est sans nul doute un coup dur pour les multiples comités de vigilance qui se sont créés dans l’Extrême- Nord depuis que le Cameroun combat les terroristes de Boko Haram. Il y a nécessairement un besoin de coordonner leurs actions, mieux de les former à cette tâche ô combien périlleuse, mais utile.

Auteur: carmer.be