Braquage et trafic d’armes: les dessous de l’assassinat de 'Alain Joker' à Bamenda

Éric Nji Wara alias Alain Joker

Tue, 9 Nov 2021 Source: Michel Biem Tong

Dans une tribune publiée il y a quelques heures, le journaliste politique Michel Biem Tong fait de très graves révélations sur un réseau de braquage et de trafic d’arme impliquant plusieurs personnalités camerounaises notamment des hauts gradés qui traiteraient avec Éric Nji Wara, un homme d’affaire connu sous le nom de "Alain Joker" à Bamenda. Ce dernier a été tué par balles jeudi 4 novembre dernier.

Ci-dessous, les révélations de Michel Biem Tong



"Une foule immense médusée par l’horreur. Ce jeudi 4 novembre 2021, les populations du quartier Mbimfibi à Bamenda, ont convergé vers une scène horrible donnant à voir 2 corps criblés de balles dans une voiture et un autre étalé à même le sol. La foule qui n’en revient pas est partagée entre pleurs et clameurs. Surtout que parmi les victimes se trouve Éric Nji Wara, un homme d’affaire bien connu dans la ville de Bamenda et qui se faisait appeler «Alain Joker». Que s’est-il exactement passé et qui sont les auteurs de ce crime de trop dans cette zone en proie à une lutte d’indépendance depuis novembre 2017?

Comme à leur habitude, des suppôts du pouvoir de Yaoundé et les cyber-activistes à leur solde ont immédiatement porté le blâme sur les combattants indépendantistes anglophones. Selon ces cyber-activistes pro-Biya, Alain Joker et deux de ses compagnons ont été tués par les «terroristes sécessionnistes» (ce sont leurs termes) parce qu’ils venaient de signer avec la commune de Bamenda 2e un marché de rénovation des locaux de la municipalité. Une telle collusion avec l’oppresseur vaut peine de mort pour les indépendantistes, selon la version du pouvoir de Yaoundé. Aucune précision n’est faite sur l’entreprise d’Alain Jokey ayant gagné le marché ni sur les références du marché en question. Comme dans pas mal de cas similaires dans cette zone en conflit, l’expérience a prouvé que lorsque les griots du régime Biya se précipitent à accuser les séparatistes dans un crime, c’est qu’en réalité les commanditaires sont tapis au sommet de l’Etat.

En effet, d’après des sources concordantes, ce sont des soldats camerounais en civil, qu’accompagnaient des combattants de l’Ambazonia Defence Forces (ADF), une milice de l’armée camerounaise, qui ont tiré sur ces 3 hommes se trouvant à bord d’une voiture: «ceux qui ont tiré sur le véhicule avaient un accent des francophones», nous a confié un habitant de Bamenda qui nous a contacté. Les services de la communication d’ADF ont démenti l’implication de leurs troupes dans cet assassinat. Qu’est ce qui peut avoir poussé des éléments des forces de défense et de sécurité du Cameroun à éliminer physiquement Alain Jokey?

D’après nos investigations, l’homme d’affaires était bien connu des officiers généraux et supérieurs de l’armée et de la police camerounaises à Bamenda. Grâce aux armes que lui remettaient des policiers notamment de la Division Régionale de la Police Judiciaire de Bamenda (nos sources avancent le nom d’un certain Loukak Loukak Paul, en service dans cette unité de police), Alain Jokey montait des gangs qui allaient braquer des banques. Le fruit du braquage (les sommes variaient entre 5 millions et 10 millions de FCFA) étaient partagé entre commissaires de police, colonels et généraux de l’armée.

Nos sources indiquent également qu’Alain Jokey avait des démêlés avec le Chef de la Division de la Sécurité Militaire, le colonel Joël Émile Bamkoui, au sujet de 600 millions de FCFA que ce dernier devait à l’homme d’affaires dans un business relatif au trafic d’or avec des Chinois. Bamkoui menaçait d’ailleurs de l’assassiner s’il persistait à lui réclamer les 600 millions en question. Quelques jours avant l’assassinat d’Alain Jockey, Loukak Loukak Paul de la DRPJ de Bamenda découvre que l’homme d’affaires est un grand ami du petit frère de General No Pity, patron du Marines Forces of Bambalang (un groupe armé séparatiste). Loukak informe immédiatement sa hiérarchie et celle militaire à Bamenda. C’est dans ces circonstances qu’intervient l’assassinat du businessman. Alain Jokey était aussi celui-là qui livraient des jeunes filles à l’appétit sexuel des colonels et au général Nka Valère en personne, commandant de la 5e région militaire, contre de fortes sommes d’argent.

A en croire nos sources, General Nka Valère tout comme le colonel Bamkoui, sont pointés du doigt comme les principaux commanditaires de l’assassinat d’Alain Jokey. Mobile évoqué: de possibles accointances avec le redoutable Général No Pity, via le petit frère de ce dernier".

Auteur: Michel Biem Tong