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CAN 2021, drame d'Olmebé : comment nous n’avons pas su lire signes et symboles…

Le Cameroun va difficilement oublié cette CAN

Mer., 9 Févr. 2022 Source: Jean-Marc Soboth

Avant le début de la compétition, l’historien Simon Nkén qui est très spirituel attirait mon attention sur le fait que nous ne gagnerions pas la coupe d’Afrique 2021. « Il y a trop de haine au pays », « des mauvaises ondes » disait-il ; « du sang qui coule, militaire et civil; trop de gens emprisonnés injustement, la misère est généralisée; trop de gabegie… » Pour gagner, « il faut un minimum de cohésion nationale ». Bien sûr que tous ceux qui pensaient ainsi devaient se faire discrets au début, au gré de notre patriotisme renouvelé. Mais ce qui devait arriver est arrivé.

Parmi les causes de nos déconvenues, il se peut que nous ayons été inattentifs à ces signes qualifiés de superstitions par notre académisme "cartésien".

Après toutes les péripéties réglées avec, dit-on, des arguments sonnants et trébuchants au plus sommet des pyramides, vint (entre autres) l’intermède des morts du stade Paul Biya à Olembé. Tout un message pour ceux qui savent lire la nature. Cela voulait peut-être dire que ce stade n’était « pas bon » pour la circonstance et la suite. Du moins pour l’équipe hôte. La loi du sol. La mort brutale de jeunes dans la cosmogonie bantoue — bien que devenue extrêmement banal au Cameroun — charrie toujours un symbolisme sans précédent, réglé dans des rites ancestraux très rigoureux... Par chance, la suite de la compétition a été officiellement délocalisée au stade… Ahmadou Ahidjo, du nom du premier président camerounais exilé puis inhumé au cimetière musulman de Dakar au Sénégal. Celui-là même que ce régime a refusé de ramener à son Garoua natal post-mortem après des décennies. C’est Ahidjo qui avait choisi lui-même ce successeur définitivement inamovible sous la houlette de Paris.

Retour donc au stade Ahmadou Ahidjo où, rappelait-on, les Lions Indomptables n’avaient plus perdu de match en un demi-siècle. La métaphysique est toujours si complexe. Puis, coup de théâtre. Le nouveau retour inattendu au stade d’Olembé aurait été motivé par une décision politique. « Des hiérarques du pays » auraient estimé que les honneurs du succès inéluctable des Lions Indomptables à cette coupe d’Afrique ne devaient être partagés entre M. Paul Biya et un certain Ahmadou Ahidjo dont le stade risquait d’abriter l’éclatante victoire finale. Ou plutôt que le fantôme d’icelui influencerait peut-être négativement le parcours victorieux trop évident des Lions qui, au cours de cette compétition en particulier, nous replongeaient dans la grande époque de la gloire.

Les Camerounais se sont-ils un peu trop investis spirituellement aux côtés des Pharaons dans le but de punir leurs amis ivoiriens (soutien sans borne, apprentissage de l’hymne, etc.) au point de s’oublier eux-mêmes, au point de transférer carrément leur puissance sans retour? On craignait qu’ils n’aient plus le pouvoir de récupérer à leur propre compte tant d’énergie offerte à leur pire adversaire.

En tout cas. Le stade d’Olembé a confirmé le message des oracles au moins sur l’atmosphère démoniaque au pays.

Voilà que tout pourrait finalement bénéficier aux Lions de la Teranga. Ce pays garde en ses terres, disais-je, les restes de l’homme dont le principal stade du pays porte à nouveau le nom — après avoir été longuement débaptisé — et dont le village natal, Garoua, nous a fourni l’autre finaliste, l’Égypte des Pharaons. Ahidjo, c’est l’homme qui a été privé de retour au bercail.

Les Sénégalais n’ont pas tort de penser que M. Ahmadou Ahidjo à qui ils ont offert l’hospitalité éternelle en leurs terres leur offrira leur première coupe d’Afrique. C’est un signe des temps.

Pour refonder notre football et envisager le Qatar, il faudra dorénavant être attentif aux signes dont le principal est connu : une vraie cohésion nationale.

Auteur: Jean-Marc Soboth