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Calibro Calibri sur RFI: voici ce que vous ignorez sur le journaliste Alain Foka

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Wed, 13 May 2020 Source: Abdelaziz Mounde

D'habitude, les thèmes du Débat Africain ne suscitent aucun remous au sein du pouvoir ou de la presse au Cameroun, jusqu'au dernier...

Il y’a quelques jours, à la suite de l’affaire Eric Kouatchou, j’ai adressé une lettre ouverte à des figures camerounaises du journalisme en France, reconnues pour leurs talents et jouissant d’une notoriété établie dans la profession, dont Alain Foka, pour leur silence public sur ce cas de détention arbitraire et dans de précédentes affaires et situations critiques, cruciales et décisives au Cameroun.

Je n’ai lu, alors, nulle part ni de référence à sa tribu, ni d’allusion à son ethnie, encore moins de proximité " sociologique " avec un homme politique camerounais originaire de l’Ouest Cameroun, en pays Bamileke. Aucune occurrence d’une réaction du ministère de la Communication ou une réaction d’un de ses responsables dont M. Atangana Manda.

Bien au contraire, d’aucuns ont, curieusement, rangé Alain Foka dans la catégorie des soutiens passifs du pouvoir au Cameroun, soucieux d’y préserver des intérêts ou y entretenir ses relations et réseaux. A gorges déployées même...

Après son émission, Le Débat Africain, consacrée, à juste titre, aux lanceurs d’alerte, sujet d’intérêt compte tenu du surgissement de leur activisme et de leurs effets viraux sur les réseaux et dans l’opinion, une allusion subite est faite à la fois à son ethnie et à un soutien nouveau à un homme politique issu de son ethnie.

C'est, en réalité, une resucée de nos Pavlov du 237. Disons-le, d'ailleurs, un profond cancer de chez nous. Beaucoup n'arrivent pas ou plus à retenir, en toile de fond des débats et rivalités politiques, leur fibre tribaliste. Avec la circonstance aggravante de l'incitation à la haine. On a fini par en être décomplexé, comme les racistes ont trouvé en Europe et aux Etats-Unis, un véhicule d'expression à travers l'extrême-droite et les présidents dits populistes.

Alors, sur la toile comme dans le dédale de la haute administration, l'on scrute à chaque sortie, prise de position ou opinion, votre tribu. On furète à chaque indignation contre une injustice, les travers de notre société et les défaillances visibles de la gouvernance, pour retrouver votre village. On appelle cela, alors, la " proximité sociologique ". Un de ces camerounismes qui a pris en otage le sens de la sociologie, définie comme l'étude des relations, actions et représentations sociales par lesquelles se constituent les sociétés.

On a donc plus de sociologique, à réveiller Antenor Firmin, Auguste Comte, Emile Durkheim, Bourdieu ou Max Weber de leurs tombes, que l'assignation à résidence dans sa tribu : la défaite du sens. On a plus de sociologique que l'écrou de l'ethnie : la prison de la pensée. Calfeutrés, vous ne pouvez plus penser par vous-mêmes. Vous n'avez plus droit à vos opinions. Vous êtes, quand vous faites, tel Alain Foka, librement le choix d'un thème d'émission, le nouveau dévot de la " secte ". Tribale. Ethnique. Le parti du village...

Dans la stratégie d'émergence du Cameroun, il y'a à en juger par cette vérole des opinions, la viralité du tribalisme et ses effets diffus, nocifs, un oubli fondamental : l'objectif de la réconciliation des mémoires et des cœurs et la construction d'une véritable identité plurielle nationale, pour enfin affronter avec sérieux, profondeur et courage, le cancer du tribalisme dans toutes ses formes et traductions ( institutionnelles, politiques, sociales, médiatiques et culturelles ). D'autres pays, pour donner corps à l'idée de Nation, tel l'Indonésie l'ont fait. Si nous importons des tissus de ce pays, nous pouvons en suivre le fil.

Auteur: Abdelaziz Mounde