Cameroun : La crise de confiance entre les patients et le personnel médico-sanitaire des formations hospitalières (Première partie)

Serge Aimé Bikoi

Mon, 17 Apr 2023 Source: Serge Aimé Bikoi

Les différents scandales ayant meublé l'environnement de la santé au Cameroun inclinent à répertorier une nomenclature de déterminants qui traduisent, de manière globale, la crise de confiance entre les patients et le personnel médico-sanitaire. Ces déterminants sont pluriels et intègrent, entre autres, l'accueil dans les hôpitaux, la salubrité, les finances, le comportement des sages-femmes, le manque de personnel médico-sanitaire.

1. L'accueil dans les hôpitaux

C'est le point de départ de l'interaction entre le patient et le personnel médico-sanitaire. Très souvent, la communication entre le malade et l'infirmière est propice au lynchage médical. Lorsque l'infirmière use des propos discourtois, insolents et offusquants à l'endroit du patient, l'interaction va être, sans conteste, jalonnée de conflits, voire de tensions. Avec la recrudescence des problèmes de santé mentale à l'heure actuelle, il peut arriver que le patient lui-même soit violent, fougueux, agressif et impulsif dans sa manière de s'exprimer face au médecin. Résultat des courses : discorde entre le patient et le corps médical débouchant sur une ou des scènes de tension.

2. La salubrité dans les formations hospitalières

Il y a des hôpitaux, des cliniques, bref des centres de santé qui sont insalubres et plongés dans un environnement pollué de moustiques au point où un patient qui s'y rend pour la première fois peut contracter, contre toute attente, le paludisme suite à la piqûre des moustiques.

3. Les finances

Il s'agit, ici, des formes de dépenses dans les hôpitaux qui intègrent, en l'occurrence, les factures à payer. Dans un contexte de précarité financière existentielle, les ménages pauvres ont du mal à solder leurs factures au bout du compte. D'où la séquestration de certains patients dans des formations hospitalières pour non-paiement des factures. Le cas des femmes ayant accouché, mais ne disposant pas de revenus substantiels à l'instant "t" s'est soldé généralement par la séquestration de ces dernières. Il y a des situations où certains médecins ne tentent même pas de comprendre l'état de paupérisation du patient, mais leur disent carrément que l'hôpital n'est pas pour les pauvres. Lorsqu'un Ophtalmologue d'un hôpital public de la place, dont nous taisons délibérément le nom, face à un patient souffrant du mal d'yeux, lui avance, pendant la consultation, ce genre de propos, comment ne peut-il pas avoir une crise de confiance entre ce malade et ce spécialiste ? Comment ce patient ne va-t-il pas être frustré à l'issue de cet échange ? Ce médecin ne peut-il pas adopter une autre approche communicationnelle plus rassurante à l'endroit dudit patient que celle-là, qui est répulsive et frustrante ? Pourquoi cette propension au mercantilisme en surévaluant le déterminant marchand dans la prise en charge médicale dans les hôpitaux publics ? Les patients issus des ménages pauvres sont-ils condamnés à ne pas payer et, donc, à mourir à la longue? Ne doit-on pas penser à l'humanisation des soins dans les formations hospitalières ?

4. Le comportement des sages-femmes

Le comportement discourtois, insolent et violent de certaines sages-femmes est porteur de tensions. Quand une sage-femme ne soigne pas son langage à l'endroit d'une femme enceinte à terme dans une salle d'accouchement, cela pose un problème donné. Le comportement désobligeant est, généralement, marqué par la diffusion des mots et expressions choquants du genre : "Écarte bien tes jambes-là!" "Quand tu t'enjailles souvent dans une partie de jambes en l'air avec les hommes, tu écartes bien tes jambes !" Telles sont,entre autres, les phrases incongrues prononcées par ces infirmières très furieuses en pareille circonstance. Parfois, ces sages-femmes usent, en dehors de la violence verbale, de la violence physique et claquent les jambes de ces femmes enceintes à terme lorsque ces dernières n'exécutent pas à la lettre leurs injonctions. Le type de réactions à l'emporte-pièce de ces sages-femmes n'est pas de nature à rendre l'environnement médico-sanitaire viable et serein. Il y a un véritable problème de santé mentale qu'il faut autopsier et soigner dans les hôpitaux.

5. Manque de spécialistes dans les hôpitaux

Le véritable problème, en matière de santé publique au Cameroun, est celui du déficit du plateau technique. En effet, bien de médecins spécialistes manquent, de façon criarde, dans les formations hospitalières si bien que bien de patients sont contraints de migrer dans d'autres milieux hospitaliers, où se trouvent ces spécialistes-là. Certaines catégories sociales misérables et vulnérables sont obligées de partir des aires culturelles enclavées et reculées pour arriver dans les zones urbaines au mépris des conséquences dommageables qui peuvent survenir lors des voyages en termes de complication de la maladie, d'aggravation de la situation morbide du patient, voire en terme de survenue malencontreuse d'un ou des cas de décès. La mort d'un enseignant de rang magistral de l'Université de Ngaounderé, qui confronté à un problème de dialyse, s'est décidé à quitter momentanément son lieu de résidence pour Yaoundé, mais il est, malheureusement, décédé dans le train. Des cas malencontreux d'un tel acabit sont légions dans plusieurs villes camerounaises, où le plateau technique est déficient dans plusieurs formations hospitalières.

Auteur: Serge Aimé Bikoi