Cameroun : la fraude électorale de 1992 racontée par Haman Mana

Aujourd’hui, tous les principaux acteurs reconnaissent que John Fru Ndi avait remporté l’élection présidentielle de 1992 devant Paul Biya. Lisons

“ Je puis aujourd’hui avouer que lors de cette couverture, j’ai assisté à un manège digne du plus incroyable des trafics d’arrière-boutique. La veille et l’avant-veille de la clôture des travaux de cette commission, arrivent par paquets, transportés par des gendarmes affairés, les procès -verbaux de la province de l’Extrême-Nord.

Tout se faisant en public, ceux qui avaient une calculatrice et qui prenaient la peine de suivre, pouvaient constater que le candidat John Fru Ndi et le candidat Biya étaient au coude à coude. Bien que l’oeil vigilant du Sdf, le professeur Carlson Anyangwe, ne soit plus là, il y avait tout de même les représentants des autres partis, qui regardaient.

Lorsqu’on a commencé à égrener les résultats venus de Maroua, Mokolo, Kousseri et autres, le candidat du Rdpc est passé devant. Jusqu’alors tous ces résultats avaient plus ou moins subi la courbe de ce qu’ils avaient été aux législatives, quelques mois auparavant. Comment expliquer ce renversement de vapeur en quelques mois ? Il existe en tout cas un «mystère» sur les procès verbaux de l’élection présidentielle de 92, provenant de la province de l’Extrême Nord, et ayant consacré la courte victoire de Paul Biya sur Ni John Fru Ndi.

Je venais d’achever ma couverture de l’événement politique le plus proéminent de ma jeune carrière. Et j’avais assisté en direct au fonctionnement de cette moulinette qui se met en marche à chaque fois pour reconduire les mêmes aux commandes du Cameroun.

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C’est tout de même dans un climat de tension assez perceptible que se déroulent tous ces événements. Où à Bamenda, John Fru Ndi s’est déclaré vainqueur, avant d’être mis en résidence surveillée; où à Santa, Aladji Tita Fomukong, un militant du Rdpc, a été brûlé vif dans sa maison; où à Yaoundé, dans certains quartiers, ont éclaté des rixes sur la base des appartenances tribales. Augustin Kontchou Kouomegni, ministre de la Communication, tient;

une conférence de presse, pour faire le point.

Où il déclare que le rapport critique du NDI (National Democratic Insstitute) est «un scandale intellectuel». Lors de cette conférence de presse, j’ose une question : « Quelle est la situation juridique de M. Fru Ndi en ce moment»? Réponse de l’un des plus éminents juristes du Cameroun: « Laissez-nous les sophismes juridiques, M. Fru Ndi est dans les conditions qui nous permettent de l’empêcher de menacer la paix civile au Cameroun». …