Cameroun: sacré tonneau des danaïdes

Me Amedée Touko Dimitri

Tue, 27 Sep 2022 Source: Me Amedee Dimitri Touko

Si l’État du cameroun a dépensé 3000 milliards pour la CAN, pourquoi la Fecafoot ne demanderait-elle pas aussi 14 milliards pour la coupe du monde ?

Le Cameroun c'est le Cameroun! Paul BIYA, auteur de cette boutade aujourd'hui tristement célèbre, trône encore, bon gré mal gré à la tête de ce pays devenu une vraie cour des miracles .

Ce pays dans lequel, la satisfaction des besoins énergétiques, des besoins en eau, des besoins en infrastructures routières et de communication renvoient au moyen âge, a réussi la prouesse historique dilapider, au nom du football, donc pour le plaisir et le jeu, la somme cyclopéenne de 3000 milliards de Francs CFA.

Dans la perspective de la coupe du monde 2022 au QATAR, la Fédération Camerounaise de Football a l'outrecuidance de demandé à l’État camerounais de mettre à sa disposition, la somme astronomique d’environ 14 milliards de Francs CFA, pas moins…

Bien que comparaison ne soit pas forcément raison, qu'il nous plaise, à toutes fins utiles, de rappeler que la France, 30 fois plus riche que le Cameroun, prévoit de dépenser pour la coupe du monde, la somme de 16 millions d’euros, soit environ 10 milliards de Francs CFA. Elle espère que ses performances (au moins 1/2 finale) lui permettront de gagner 18,5 millions d’euros, donc d’avoir un retour sur investissement et un bénéfice d’au moins 2,5 millions d’euros.

On peut dès lors légitimement apprécier la logique managériale, le comportement économique qui peut être celui des gestionnaires de ces deux pays dits « amis » de longue date. D’un côté, on apparaît comme englué dans une civilisation de la joie pour la joie, même dans la plus profonde des indigences. De l’autre, on essaye de conjuguer le plaisir, le jeu avec la dimension économique ou « utilitaire » de celui-ci.

*AU-DELÀ DE LA PASSION*

Les empoignades en cours au Cameroun, au sujet du contentieux, devenu une véritable affaire d’État qui a embrasé tout le pays, entre le FECAFOOT et LE COQ SPORTIF, son équipementier, témoignent de la dimension essentiellement passionnelle et passionnée, dans laquelle ce peuple consomme comme une drogue, le football. Son bonheur désormais semble se réduire à des bouts de plaisirs fugaces du football, de la bière, des églises, du sexe... sans aucune mise en perspective de la dimension économique d’une telle dépendance. On dépense d’abord, « on profite de la vie » (en réalité on perd sa vie), on jouit et on meurt ensuite de choléra, d’insécurité ou d’accident sur les routes les plus accidentogènes au monde.

C’est ainsi que la crise FECAFOOT - LE COQ SPORTIF - ONE ALL SPORT, qui en réalité, ne devrait être qu’une affaire juridique et économique, s’est transformée sous l’effet catalytique de cette véritable narcopolitique-économique camerounaise, en une foire dans laquelle on parle de tout, sauf de l’essentiel qui devrait être :

- LE COQ SPORTIF a t-il dans l’exécution du contrat qui le lie à la FECAFOOT, commis une faute pouvant justifier qu’une rupture unilatérale du contrat soit envisagée par cette dernière, sans encourir des dommages et intérêts qui ruineraient l’avantage escompté de cette rupture ?

- Les intérêts financiers que présente le nouveau contrat avec ONE ALL SPORT sont-ils de nature à couvrir, à la fois, plus que les avantages de l’ancien contrat et permettre la réparation éventuelle, amiable ou sur décision de justice, d’un préjudice qui découlerait d’une rupture de contrat avec LE COQ SPORTIF qualifiée d’abusive ?

Pour évidemment répondre à ces questions, il eut fallu que soit connu les conditions du contrat avec ONE ALL SPORT, y compris par l’ancien cocontractant LE COQ SPORTIF, qui aurait pu choisir soit de s’aligner sur les conditions de la concurrence et ainsi donner une chance à la poursuite des relations contractuelles, soit négocier avec le FECAFOOT, une rupture de contrat moins abracadabrantesque.

Il manque donc à tout ceci de la transparence managériale, ce qui n’empêche pas, que sur la base des éléments qui procèdent essentiellement des sécrétions des esprits fertiles et donc du registre passionnel, qu’on agite l’opinion, qu’on se déchire, qu’on oublie même de demander à la FECAFOOT sous quelles nouvelles conditions elle entend désormais vendre l’image du Cameroun. Pire, on oublie qu’on n’a pas d’électricité depuis une semaine à DOUALA, capitale économique du Cameroun et que les 3000 milliards en fumée pour la dernière CAN, auraient pu changer la vie des camerounais. On s'en fout, on se drogue au foot, devenu notre cache misère.

On est résolument dans la politique économique de la chasse et de la cueillette.

Me Amedee Dimitri Touko Tom

Auteur: Me Amedee Dimitri Touko