CAMEROUN :: Christine Lagarde : Dg du Fmi ou de la Cemac ? :: CAMEROONBien que n’étant pas venu « donner des leçons », selon ses propres termes, la Directrice générale du Fmi, en véritable patronne de la sous-région, a réuni les ministres des finances des six pays membres de la Cemac, pour leur donner des instructions sur la conduite à tenir par ces temps de chute du prix du pétrole. A quoi ça rime ? A qui la faute ?
La récente visite de la patronne du Fonds monétaire international (Fmi) était axée sur des « questions de réformes structurelles », l’ «investissement en infrastructures », l’ « intégration régionale » à la fois sur le plan commercial et sur le plan financier, les grandes questions géopolitiques qui ont une dimension économique et monétaire, le « risque créé par l’activité de Boko Haram », « les questions budgétaires», le défi économique auquel est confrontée la sous-région en raison de la chute du prix du pétrole… « Le pétrole représente aujourd’hui environ 70 % des exportations de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et plus d’un tiers de ses recettes budgétaires. Il va de soi que la chute des cours constitue un énorme défi », a expliqué Christine Lagarde.
Selon la patronne de l’institution de Bretton Woods, les Etats de la zone devront viser une diversification accrue de leurs activités, des dépenses publiques plus restreintes et un approfondissement des échanges commerciaux. Car, « le Cameroun et l’ensemble de la région de la Cemac sont aux prises avec le double-choc de la chute des cours du brut et des perturbations sécuritaires. Le renforcement de l’intégration régionale et la mise en oeuvre d’ambitieux programmes de réformes dans les pays de la Cemac seront déterminants pour assurer la stabilité macroéconomique et rétablir une croissance forte et inclusive dans la région », assure-t-elle. Et « Le Cameroun, dont l’économie est la plus vaste et la plus diversifiée de la Cemac, est à même d’entretenir et de renforcer la dynamique de l’intégration », nous apprend Christine Lagarde, comme pour justifier le choix de Yaoundé. C’est dire si le Fmi continue d’exercer son influence dans la sous-région. C’est ainsi qu’à propos de l’environnement des affaires, « un choix judicieux des affaires s’impose », a lancé Christine Lagarde à Paul Biya dans son discours tenu lors du dîner de jeudi dernier, en présence de membres du gouvernement camerounais, des ministres des Finances de la Cemac, de Pierre Moussa, président de la commission de la Cemac, et de Abaga Nchama, gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac).
« Tous les efforts du gouvernement pour faciliter l’essor économique ne pourront porter des fruits sans une amélioration du climat des affaires. Je veux parler d’une nouvelle philosophie de l’encouragement des forces vives du Cameroun et non pas l’introduction de nouvelles incitations financières, de régimes dérogatoires ou de forums d’investissement lancés à grand renfort de publicité », a poursuivi ma directrice générale. C’est pourquoi, pour la patronne du Fmi, « Il convient de se concentrer sur les infrastructures essentielles, sur les projets bien avancés, au lieu d’en multiplier indéfiniment ».
Les recommandations de la patronne
Au cours de sa visite, Christine Lagarde a suggéré que les pays membres de la Cemac devraient en finir avec l’utilisation généralisée des exonérations fiscales et douanières discrétionnaires. « Ces exonérations compromettent les recettes globales des États et affaiblissent la gouvernance » a-t-elle précisé lors de sa rencontre vendredi 8 janvier 2016 avec les ministres de l’économie des pays membres de cette sous-région. Ce qui paraît paradoxale au moment où l’occident est en train de nous imposer les Ape. Selon la Dg, la mobilisation de recettes intérieures doit également tenir compte des importantes questions de fiscalité internationale qui ont une incidence sur l’assiette des impôts liés aux industries extractives. Car « Ces considérations peuvent être particulièrement pertinentes dans les pays riches en ressources naturelles, comme certains pays de la Cemac, afin d’éviter l’érosion de la base d’imposition et les transferts de bénéfices », a rappelé Christine Lagarde, précisant que la sous-région doit poursuivre la mobilisation des ressources non pétrolières et leur faire atteindre le niveau de convergence communautaire de 17%.
Toujours selon elle, l’Afrique centrale doit prioriser désormais ses investissements dans les infrastructures. « Cela peut exiger que l’on réduise l’ampleur de certains plans. La sélectivité dans le développement des infrastructures-basé sur leur bienfondé économique et leur rentabilitépeut aider à orienter ce travail ». Enfin, elle a conseillé à la Cemac de renforcer son intégration sous-régionale et améliorer le climat des affaires. Aux autorités de Yaoundé elle a recommandé de sélectionner dorénavant les projets à la valeur ajoutée avérée : « Il faut se résoudre à admettre que malgré les besoins, on ne peut pas tout faire tout de suite. Il convient de se concentrer sur les infrastructures essentielles, sur les projets bien avancés, au lieu d’en multiplier indéfiniment », a-t-elle martelé. Au fait, qui gouverne finalement chez nous ? Devrait-on se demander si c’est le Fmi qui semble mieux connaître nos problèmes plus que nous-mêmes. En tout cas, si un étranger vient vous dire qu’il aime votre enfant plus que vous-même, c’est qu’il a des intérêts plus ou moins cachés. Comme quoi, le Fmi est loin d’être le bienfaiteur qu’on fait croire à certains naïfs.