Climat des Affaires - Insolvabilité de l’Etat : Mauvais payeur !

Sat, 31 Oct 2015 Source: Eitel Elessa Mbassi

60% des entreprises se plaignent des délais prolongés de paiement de leurs factures tant pour les prestataires au public qu’au privé.

C’est connu, l’Etat du Cameroun ne paye pas ses prestataires à temps. Elles sont nombreuses, les entreprises qui trainent depuis des années des factures impayées, attendant que les pouvoirs publics s’acquittent de leurs dettes.

« On est obligé de raser les murs des ministères régulièrement, dans l’espoir d’être payés », s’apitoie un chef d’entreprise. Cet état des choses n’est pas ignoré des pouvoirs publics.

« Il faut une discipline, car il y a un ordre de paiement chronologique qu’il faut respecter. C’est une mesure ponctuelle qui vise à rassurer les créanciers, à mettre les comptables sur les rails et aussi à rassurer les banques », expliquait le directeur général du Trésor en 2013. D’après lui, dans la zoneCémac, le délai fixé à l’Etat pour régler ses créanciers est de 90 jours.

« Mais au niveau du Cameroun, on s’est fixé un délai de 60 jours », assurait-il. Deux ans après cette annonce, l’on n’observe pas d’avancées significatives. Plusieurs entreprises qui sous-traitent avec l’Etat continuent d’égrener des chapelets de plaintes.

« Le retard de paiement est mortel pour nous », soutient Antoine Elame qui dirige une Pme à Douala. En fait, explique-t-il, en l’absence des fonds, et ayant contracté des dettes auprès des banques, l’entreprise a du mal à honorer ses engagements non seulement vis-à-vis des banques, de ses employés, mais de tous ses autres prestataires. Ce qui entraine la fermeture de certaines entreprises.

Le non-paiement des prestataires par l’Etat a fait dire que l’Etat manquait de liquidités dans ses caisses. Déjà en 2012, le ministre des Finances affirmait que le montant des factures payées par l’Etat s’élevait à plus de 10 milliards FCfa. En juin 2015, le directeur général du Trésor a soutenu dans les colonnes de Cameroon Tribune que les prestations depuis deux ans, sont payées en deux mois. Des allégations qui semblent peu convaincantes puisque de nombreux prestataires attendent toujours d’être payés plusieurs mois après leurs prestations. Toutefois, un cadre du ministère des Finances, attribue les lenteurs observées à la mauvaise constitution des dossiers par les prestataires.

« Ces retards sont très souvent dus au mauvais montages des dossiers. Si le dossier est mal monté, il est rejeté », explique-t- on aux Finances. Pour Ariel Ngnitedem, économiste, cette situation de retard dans les paiements des prestataires de l’Etat est due à « l’indiscipline budgétaire ». « On remarque que l’argent destiné à une ligne est renvoyé à une autre ligne. De même les crédits préalablement destinés à une activité sont affectés à une autre activité. Cela relève de l’indiscipline budgétaire. Cela peut aussi relever du détournement de fonds publics. Cela pose alors le problème de la transparence dans la gestion des fonds publics », fulmine l’économiste.

Auteur: Eitel Elessa Mbassi